Tout au long de mon travail d'anthropologue auprès des mineurs des
Andes boliviennes, j'ai été frappée par ce paradoxe: l'argent de la mine
qui motive la migration de milliers de paysans vers les centres miniers,
puis leur travail acharné dans le tréfonds périlleux des montagnes sont, en
même temps, perçus comme illusoires. De La Paz à Potosi en passant par
Oruro, ces mêmes mineurs, dont les yeux s'étaient éclairés, quelques
minutes auparavant, à l'évocation de ce filon dont la découverte leur
permettrait de sortir de la misère, d'ouvrir une échoppe ou qui sait, de
devenir millionnaire, m'ont tous assuré que les revenus de la mine étaient
voués à être dilapidés dans les bars, auprès des prostitué