En 2004, lors de la publication du catalogue raisonné de son oeuvre, l'artiste
canadien Jeff Wall décide d'une typologie qui permettra d'organiser son travail
photographique selon deux catégories : ce qu'il nomme "documentary
photograph" et "cinematographic photograph". La première catégorie se
réfère aux images réalisées sans aucune intervention de l'artiste, bien qu'il en
ait cependant choisi le lieu et le moment. La seconde s'applique à celles qui ont
au contraire nécessité une véritable "mise en scène" de sa part : recours à des
acteurs, construction de décors… Cette typologie, qui accompagne
systématiquement toutes les images recensées par le catalogue raisonné propose
donc un parcours, non pas chronologique - Jeff Wall ayant également pratiqué
depuis les années 1980 l'un et l'autre type de photographie - mais processuel,
insistant sur des modes de réalisation.
On peut être surpris de ce découpage rétrospectif à l'intérieur d'un travail
qui semble, depuis ses origines, mener à un croisement des catégories
esthétiques plutôt qu'à leur cloisonnement. Les oeuvres de Jeff Wall ont
toujours paru affirmer l'aspect indécidable des divisions, l'artiste ayant plutôt
cherché à "faire tenir" ensemble des données que l'histoire de l'art tenait pour
inconciliables : tradition et modernité, peinture et photographie, cinéma et
photographie, unité et fragment…
