POÈME DE LA TRANSMISSION

Jeanne Hyvrard


LITTÉRATURE POÉSIE
Date de publication : mars 2007

En contrebas de l'escalier

Dans l'autre partie de l'exigu local

Dans lequel nous apprenons

Le travail de la terre

Dans ce modeste passage

Entre le recoin où est installé le four

Et le couloir qui remonte vers la cour

Je vois son pied nu

Pousser la roue de bois

Dans un geste ancestral

Elle est malhabile

Et penchée sur le tour

Son geste est bien loin d'être régulier

L'autre

La femme la plus expérimentée

L'encourage de la voix

Des mains

Et même parfois d'un geste

Qu'elle tente de substituer au sien

Tout autour

Nous toutes nous regardons

Silencieuses

Et anxieuses

Car ce que l'une parvient à faire

Les autres pourront le faire aussi

L'expérience l'a montré

Ainsi va ce groupe

Solidaire et pénêtré

En contrebas de l'escalier

Je regarde sous l'établi rustique

Son pied nu mettre en mouvement

Le roue de bois

Horizontale

Tournant archaïque

Au centre des beaux quartiers

Au coeur chic de la ville chic

Rappel

Des contrées éloignées

De la misère

De la fatigue

Et de la pauvreté

Oxymore inadéquat

Irruption de l'irréalité

Pourtant

Belle et bien réelle

Je pense à ma grand mère

Qui pédalait sur sa Singer

Cette machine à coudre

Qu'on trouvait alors

Dans chaque foyer

Et mesure désemparée

L'apport de l'électricité

Cette fée majuscule

Bouleversant le monde

En contrebas de l'escalier

Qui coupe en deux

Le local minuscule

Dans lequel nous apprenons

L'art et la manière de travailler la terre

A travers l'établi rustique

Je regarde la chair nue

Frotter le bois

Celle là a dû connaître dès l'enfance

Ce mouvement de la jambe

En chasse de l'éternel passage

Il n'est pas régulier

Et elle crispée

Se courbe en deux

Sur l'installation

L'engin fait un bruit sourd

Qui tranche avec celui de la ville

Un bruit qu'on reconnait pourtant

De l'avoir déjà ouï

Très au Sud

Lorsqu'il y signait l'effort humain

Pour prospérer

Ce n'est pas un grincement

Ni un battement

Ni un couinement

Ni un bruit métallique

Et encore moins un chuintement

Mais un bruit qu'on connaît

Et reconnait pourtant

On l'écoute

On l'entend

On lit à livre ouvert dans cette antiquité

Qu'on nous a mis là

Pour apprendre

En contrebas de ce local éxigu

Parce que cette installation là

Ne craint plus rien

Ni les erreurs ni les dysfonctionnements

Ni la paresse ni le délaissement

Ni même l'obsolescence

Déjà tellement présente

Sujet même de l'objet

Je regarde fascinée le pied nu

Agissant sur le bois

Découvrant que de cela

Je ne sais pas le nom

Pourtant aucun doute

L'ensemble est bien un tour

Et très antique

Je débute dans l'art et la manière

De travailler la terre

Et ne sais rien encore

Ni de la girrelle

Ni du volant

Je regarde fascinée ce pied nu

Qui donne le mouvement lent et saccadé

A cet engin ancestral

Dans le local exigu

Je regarde fascinée son pied nu

Donner le mouvement

Je regarde fascinée le pied nu

Je regarde le pied nu

Je regarde

Je re

Je garde

Je

     
  • mars 2007

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