S'il est vrai que la collaboration de Deleuze et Guattari trouve son origine dans l'événement/ avènement que fut mai 68 et que leur première œuvre commune, L"Anti-Œdipe, est un fruit de cet événement, on aurait pu craindre que la parution, fin 2007, de l'essai de François Dosse fût un précoce "coup éditorial" participant de la commémoration rituelle dudit événement; opération de marketing éditorial analogue à celui dont fut victime Anne-Lise Stern lorsqu'en 2004, au prétexte de commémorer l'ouverture des camps de la mort, Le Seuil choisit de publier dans une collection historique une compilation de ses textes intitulée Le Savoir-Déporté. Camps, histoire, psychanalyse. Mais Dieu merci, de même que nous n'avions pas attendu une telle opération pour connaître et apprécier la pensée d'Anne-Lise Stern, nous pouvons prendre plaisir et intérêt à revivre avec le livre de F. Dosse la "décade prodigieuse" qui, à partir de 1970, a vu se développer l'œuvre commune de Deleuze et Guattari; même si, pour des raisons douteuses, le contenu du livre couvre la biographie entière des deux écrivains. Qu'importent, donc, les commémorations ou les décrets de "liquidation" de mai 68: avec Deleuze et Guattari, c'est "Notre jeunesse", pour le dire avec Péguy, qui ressuscite, et nous fait signe.
