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UNE DERNIERE BRASSEE DE LETTRES

En 32 proses, ciselées dans une langue riche et travaillée, Claude-André DESSIBOURG, alias Claude LUEZIOR, romancier, nouvelliste et poète suisse reconnu en France, dépêche des "lettres" qui sont autant de cris du cœur et d'interpellations.

Le tutoiement employé dans la plupart des textes sert à merveille une sincérité qui est notamment celle d'un homme qui a "mal aux autres" ou à certaines choses du monde moderne. La familiarité voulue, mais drapée dans un style d'une rare élégance, empruntant ça et là à l'humour noir, est le plus souvent accusatrice ou ironique.

Claude LUEZIOR dénonce dans cet ouvrage aux éditions tituli les travers et dérives d'une société et d'un quotidien qui le déçoivent, l'irritent, le peinent, voire le scandalisent.

L'ordinateur, l'assureur, la maison de retraite, la chaîne de télévision, l'électronique en écriture etc…, sont des cibles de choix pour cet homme de cœur, déplorant la cruauté de la "déshumanisation" galopante, et qui dans plusieurs autres de ces textes laisse précisément affleurer au contraire cet amour de la vie et ce sens de l'humanité qui l'animent. En font foi, entre autres, les "Lettre à la mère d'un enfant handicapé", "Lettre à Deuil", "Lettre à Maison de famille", "Lettre à Cimetière"…

L'introspection est aussi présente, lorsque Claude LUEZIOR explore ses souvenirs de jeunesse ("Lettre à ma cousine"), ses qualités et ses défauts ("Lettre à Patience", "Lettre à Audace"), ses fantasmes ou ses propres oeuvres littéraires.

Dans chaque texte, de superbes images et des formules saisissantes servent à merveille le propos de l'auteur. On aimerait pouvoir toutes les citer :
"Les convenances, cette gangue imberbe dont on m'a drapé depuis l'enfance", "Ne pas tomber dans le misérabilisme, les violons de la pitié, l'orchestre de pacotille", "Mourir sur scène, un poème à la main, aux antipodes chamarrés de l'indifférence", "J'avoue parfois griffonner à la main des graffitis: que la police des caractères me le pardonne" etc…

Un ouvrage attachant, à la forme admirable et qui participe à l'unité du recueil. Une nouvelle réussite de son auteur et un vrai bonheur de lecture.

Philippe Veyrunes, lauréat de l'Académie française

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