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Gigéri ! C'est où, c'est qui, c'est quoi ?

Gigéri ! C'est où, c'est qui, c'est quoi ? Un comptoir antique sur la mer intérieure, un nid de pirates, une bourgade coloniale ? Igilgili, Jijel, Djidjelli. Une date ? 1664, une aventure désastreuse, une ombre sur le règne solaire du Quatorzième de nos rois, ou 1933, une photo minutieusement décortiquée ? Un nom, un pseudonyme : celui de Louis-Alexandre, dit Alex, dit Gigéri aussi, un rescapé par miracle du désastre susdit, labourant la mer entre Collo et La Calle. Un surnom aussi, un spectre à manger tout cru les enfants sages ?

Yves Sarthe

L'ALGÉRIANISTE, septembre 2019


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Roman en fin, mais il pourrait n'en avoir pas, quand il bascule dans la fable, tant il invite à l'imaginaire. Le douzième tableau peut se voir en livret d'opéra. Et s'entendre avec Saint-Saëns si on le veut seria, Rossini si buffa. Claudia soprano, Gigeri ténor, le Dey Ali Bitchin (sa mosquée fut Notre Dame des Victoires, paroisse Bab-Azoun, Casbah du bas) barytonnant, et Samir, voix de basse profonde en ottoman obèse et sombre empoisonneur du Seigneur et Maître, usant de quelque Viagra du Cameroon qui le met hors d'état de vivre. Décor du très vieil Alger, blanche de chaux, la darse encombrée de chebeks, les quais de filets, les palais de richesses, les hammams de sodomites, les mille et une nuits de ronflements mélodieux. Ou quand le narrateur, qui semble l'auteur comme un frère, s'insinue dans le récit pour éclairer des lanternes, apporter la saveur de son grain de cette évaporite communément qualifiée de chlorure de sodium voire de sel pour des besoins mercantiles, tirant avantage de son anachronisme, plus encore quand il s'invite en ange-témoin du désenchantement de Louis-Alexandre-Alex- Gigéri. Le ciel est zinzolin, la mer outrageusement ultra-marine, le soleil aurifère s'abîme dans la légende… A lire et à relire.

Livre associé

Gigéri
2014

Auteur concerné