<< Homme animalisé ou animal humanisé ? >>. Vaste question à laquelle le médecin psychiatre lorientais Albert Le Dorze tente de répondre dans son neuvième livre publié enjuillet aux éditions L'Harmattan. Rencontre.
Sur la couverture de votre livre, un homme allongé sur un divan à côté d'une vache dans le rôle du psychanalyste. C'est votre idée ?
C'est mon idée mais l'illustration est d'Aurélie Abolivier, la fille d'un ami !orientais qui travaille dans la littérature jeunesse. Ce neuvième livre, "Homme animalisé ou animal hurnanisé ]", aux éditions l'Harmattan (collection Psychanalyse et civilisations), devait paraître en mars mais la parution a été reportée à cause du confinement. Depuis 2006, mes livres sortent après des séminaires et conférences à Paris, en particulier au Centre international de psychanalyse et anthropologie. Celui-ci résulte d'un séminaire local et de l'analyse de deux romans : "Le procès du cochon", de Oscar Coop-Phane (2019), et "Les Animaux dénaturés", de Vercors (1952), avec comme postulat de départ: l'homme est-il réductible à sa dimension biologique naturelle ou devons-nous le définir par de pures dimensions culturelles et spirituelles ?
L'homme est-il un animal comme les autres?
Je suis parti de l'étude des spécificités supposées de l'animal humain. l'.animal n'est pas libre: un bonobo reste- un bonobo toute sa vie et n'aura pas la capacité à se représenter le monde extérieur, de se préoccuper d'autrui, de mentir, de souffrir.
Certaines théories prétendaient que les animaux comme les nouveau-nés, simples mécaniques, ne· ressentaient pas la douleur. Or les hommes·et les animaux partagent une intelligence émotionnelle, affective commune. Jean de la Fontaine l'avait bien compris. Les politiques animalisent aussi leurs ennemis (âne, cafard, poule mouillée...). Le rire non plus n'est pas propre à l'homme. Les orangs-outans ou les perroquets, par mimétisme, sont capables de fous rires. Auriez-vous écrit la même chose depuis le confinement ?
Les sujets abordés dans ce livre se sont exprimés de plein fouet pendant cette crise sanitaire, synonyme de restrictions (consenties ou pas) des libertés. Cela aiguise la question de la valeur de la vie biologique: la vie nue, animale pour certains, faitelle passer la culture à l'état d'accessoire ? Le confinement, où la vie est réduite à rien du tout, n'est-il plutôt qu'une parenthèse, où l'homme a été moins animalisé que numérisé, réduit à des codes et algorithmes ?
Autre sujet d'adualité : la violence. Spécificité de l'homme ou de l'animal?
On voudrait considérer que la violence est pathologique, voire maladive mais si on considère qu'on est des animaux comme les autres, cette violence ne peut être qu'inhérente à l'humain, endogène, et non réductible aux dysfonctionnements sociaux ou culturels.
Katell Brélivet
JOURNAL LE TÉLÉGRAMME DU 06, août 2020
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