Le Gouvernement Provisoire Piémontais au Citoyen Musset Commissaire Politique et Civil du Gouvernement Français en Piémont
(Archives de Dominique-Joseph Garat qui fut Ambassadeur du Directoire à Naples.)
Citoyen Commissaire
Turin, du Palais National le 9 germinal,, et le an 7 ème de la République…. Piémont.
Le Piémont après avoir souffert pendant huit années consécutives tous les maux que la tyrannie la plus atroce pouvait lui causer : après avoir vu couler le sang des plus zélés Patriotes immolés à la politique astucieuse de ses despotes : après avoir fait tous les sacrifices que la force d'un Gouvernement orgueilleux et dissipateur lui a su arracher, a vu enfin suivre sans nuages d'heureux jours où la liberté vient y établir son empire.
L'élan avec lequel le Peuple Piémontais entra dans sa nouvelle carrière, le calme imposant par lequel il se montra digne de la liberté en sacrifiant ses vengeances aux vertus Républicaines, fera toujours son éloge : il fut dès lors le digne émule de ses libérateurs et de ses frères.
Malheureusement les vertus de ce Peuple n'ont pas obtenu le prix qu'il avait droit d'en attendre. Des circonstances impérieuses ont obligé ceux qui furent préposés au Gouvernement à frapper des coups rudes pour redresser les finances et le crédit public. L'économie la plus sévère qui aurait été la seule ressource, leur fut impossible. Le Peuple se crut trahi, le Gouvernement resta sans force, et le remède devint de jour en jour plus difficile.
Cependant ce Peuple a certainement des Droits à l'estime des vrais amis de la liberté. Ses mœurs simples, son caractère bon mais énergique et fier, la position de fertilité de son sol, tout le rend intéressant. Il mérite que l'on sacrifie tout pour lui, et le Gouvernement emploie encore une fois tout pour le sauver, celle de vous instruire de la vérité, et d'intégrer à son sort votre Patriotisme.
Parmi les causes de l'état actuel de détresse et d'embarras où se trouve le Piémont, le Gouvernement en connaît deux principales.
La première est la ? des dettes anciennes, l'épuisement des finances au moment de la révolution, et l'impossibilité de faire face aux Dépenses extraordinaires et aux besoins qu'a entraînés le nouvel ordre des choses.
La seconde est le défaut de détermination précise des pouvoirs et des attributions du Gouvernement Provisoire, et l'incertitude où il s'est trouvé sur l'étendue de l'autorité confiée aux différents agents français en Piémont.
Le Gouvernement va vous donner sur ces articles des notions affligeantes, mais exactes. Son devoir exige aussi de lui, de vous proposer des remèdes.
L'état des Finances est le suivant
1 Le Piémont avait, à l'époque de sa régénération une masse de deux cens millions environs de dettes. Un coup hardi mais nécessaire ayant porté au tiers de leur valeur nominale les billets de Finances, la dette fut réduite à cent millions environ qui portent intérêt outre vingt-cinq millions environ de billets restans.
2 Les revenus du Piémont calculés sur l'état des recettes de l'an 1790, montent à 22, 945,930 lires. La dépense de cette même année a été de 22, 754,968 lires.
3 Les démembrements de la Savoie et de Nice du Piémont ont porté une diminution à ces revenus de deux millions et demi environs.
4 La révolution ayant amené l'abolition des droits féodaux et d'autres de même nature et occasionnée une diminution très considérable dans la recette des gabelles, les revenus ordinaires doivent souffrir une réductions plus grande encore, de façon que le calcul le plus favorable que l'on puisse faire pour cette année, on peut pas même aller à douze millions.
Malgré de si faibles ressources le Gouvernement a du pouvoir aux besoins ordinaires de l'état et à ceux de l'armé Française. L'insuffisance du revenu ordinaire l'a donc obligé à avoir recours à des emprunts et à des contributions extraordinaires. Leur premier produit a fait face aux dépenses les plus urgentes: ce qui reste à percevoir n'entre qu'avec une grande difficulté ne suffit pas aux besoins toujours renaissans de l'armée Française. Le Piémont a cependant, dans l'espace de trois mois fourni à ce titre des contributions qui sont certainement bien au dessus de ses forces.
1 Les caisses Nationales ont fournis, depuis le ig.frimaire jusqu'au os.ventose, soit pour l'armée Française, soit sur les instances des agens Français, la somme de 10,338,610,j1,11,3,dent.
2 La valeur des effets existants dans les magazins militaires, dont se sont emparés les Agens Français, et dans les quels on a du ensuite faire entré des nouvelles fournitures se monte a plus de trois millions.
3 Les effets et les fondes d'artillerie existans dans la seule Place du Turin, dont les Agens Français ont aussi disposé, vont a onze millions, et l'on ne s'écarte surement pas de la vérité en calculant à une somme égale ceux des autres places ; en ne donnant même à ces effets qu'une valeur veglée sur leur prix d'avant la Guerre.
4 Les réquisitions faites tant en denrées, fourrages et bestiaux, qu'en argent dans la presque totalité des communes à l'occasion du passage ou du cantonnement des troupes Françaises, forment surement la somme de dix millions et plus.
5 Tout le mobilier des Maison de la simplement annoncées du directoire exécutif, est aussi un objet de quelques millions : le Gouvernement ne peut en préciser la valeur, parce qu'on l'a privé des moyens de la pouvoir déterminer.
En résumant tous les faits ci-devant énoncés, il en résulte que dans le court intervalle de trois mois le Piémont a fournis à l'armée Française en argent ou en effets, la somme presqu'incroyable de 34 ou 35 millions.
Le Gouvernement ne vous parlera pas d'autres demandes faites par les commissaires des Finances Françaises relativement aux biens immeubles de la familles Royale et des Corporations Cisalpines supprimées, dans l'intime conviction où il est que le Gouvernement Français ne voudra pas priver la Nation Piémontaise et ces ressources nécessaires pour assurer la datte sacrée de la Nation, et concourir selon ses forces au services de l'Armée.
Il vous fera seulement observer que la difficulté où il se trouve actuellement de supplées aux dépenses ordinaires et aux payement, soit des dettes contractées après la révolution, soit des intérêts dus aux anciens créanciers de l'état, ne fait qu'augmenter son embarras, et rendre encore le tableau de la détresse du Piémont plus affligeant.
Il vous fera observer de même que la manque de confiance dans son autorité rend presque nulles les ressources qu'il pourrait opposer à ces maux, et que ce défaut de confiance et dû à la seconde des causes énoncées.
La séparation des pouvoirs a été de tout tems et en tout lieu, la source de l'ordre dans l'administration des affaires publiques et sans elle tous les Gouvernements ont toujours été la proie de la désorganisation la plus complète.
Si cette séparation est essentielle dans les rapports intérieurs de l'état, elle est indispensable dans les rapports extérieurs de Gouvernement à Gouvernement : et sa nécessité devient encore plus sensible quand un Gouvernement étranger exerce cumulativement avec les naturels du pays une autorité quelconque. La confusion et le désordre sont une suite nécessaire de la concurrence de ces deux pouvoirs, si leurs attributions ne sont pas exactement déterminées et religieusement respectées par chacun d'aux. L'état politique du Piémont depuis son heureuse régénération en fournit la preuve la plus évidente.
Le Gouvernement Provisoire avec les meilleurs intention possibles n'a pas pû faire le bien parce que cette séparation de pouvoirs ne fût pas établie : Ne connaissant ni l'étendue, ni les limites de son autorité, sa marche a du nécessairement être pénible et incertaine : Il a du faire trop et trop peu pour l'avantage réciproque du Piémont, et de l'Armée Française sa libératrice.
Comment aurait-il en effet obtenu l'heureux résultat qu'il espérait de ses opérations de finance, si elles étaient à chaque instant entravées par une multitude d'Agens Français subalternes qui, se disant munis d'ordres supérieurs, l'empêchaient d'utilisé, pour le bien des deux Nation même, les ressources Nationales ?
Comment porter une main ferme et hardi sur ces ressources, si une défiance continuelle contre son autorité, occasionnée par le défaut de connaissance de ses pouvoirs, et augmentée pour la malveillance des ennemis de le Liberté et de la chose publique, rendaient difficiles et souvent même impossibles les moyens de s'en servir ?
Comment enfin régulariser la marche des administrations financières, économiques et civiles ; et la coordonner sous un seul et même système avantageux au Piémont et à la Rép. Française, si la principal de ses administrations, celle qui dans les circonstances étais la plus importante, c'est à dire l'administrations militaire a été mise hors de sa compétence ?
Il serait inutile de faire ici l'énumération des inconvéniens produits par la non-fixation des limites entre les autorités Françaises et Piémontaises: il s'agit d'y apporter des remèdes, et nous vous soumettrons nos vues à cet égard.
La Nation Piémontaise étant redevable de sa liberté à la République Française doit concourir de tous ses moyens à seconder les efforts fait par le Gouvernement Français pour assurer par une glorieuse et solide l'indépendance des Nations qu'il a soustraites au despotisme. C'est là un devoir que son propre intérêt et la reconnaissance lui impurent. Le mode seul au concours resté à déterminer, et il ne s'agit que d'examiner quel est celui qui dans les circonstances actuelles peut être le plus avantageux à la France et au Piémont.
Celui qui dans sa simplicité et dans la facilité de son exécution assurerait des ressources réelles et déterminées et hommes et en argents à la France et mettrait en même temps la Nation Piémontaise à l'abri de l'incertitude et des prétention toujours renaissantes et de la part des agents Français, serait certainement le seul préférable. Il serait aussi le seul capable de rétablir la confiance de la Nation Piémontaise dans son gouvernement, confiance dans la quelle celui-ci ne peut plus se soutenir.
Nous nous flatterions de l'obtenir si le directoire voulait prendre un arrêté, par le quoi l changeât son commissaire politique et civil en Piémont.
1 de se concerter avec le Gouvernement provisoire pour donner au Gouvernement du Piémont une organisation provisoire qui par sa force, par sa séparation des pouvoir, et par la fixation exacte des attributions des fonctionnaires publics, soit capable d'assurer a la Nation Piémontaise la tranquillité et le bonheur, et de la disposé par degré a jouir des bienfait d'une constitution libre.
2 de convenir avec le di Gouvernement des sommes en argent, denrées ou autres effets quelconque que la Nation Piémontaise doit fournir à la République Française, soi pour les prétention que celle-ci peut avoir sur les biens meubles ou immeubles appartement a la famille ci-devant Royale, soit pour l'entretient des Troupes Piémontaise réunie a l'Armé Française, soit enfin pour le service Troupe Française elle même.
3 de convenir aussi sur le nombres des Troupes que le Piémont peut fournir comme auxiliaires à l'armée Française et que servait sous le commandement des Généraux Français par rapport au service militaire, mais dont l'organisation est l'entretient dépendrait du Gouvernement Provisoire.
Le retour de l'ordre dans l'administration, qui suivrait de près l'adoption de ces mesures et la considération que celle marque de confiance du directoire donnerait au Gouvernent provisoire, mettrait celui-ci en état de remplir ses engagement envers la République Française et rendraient moins pénibles au Peuple Piémontais les sacrifices que sont Gouvernement serait dans le cas de lui demander pour le soutien de la Liberté.
D'ailleurs quelque soient les vues du Gouvernement Français sur le sort futur du Piémont, les mesures prononcées, en assurant dans ce moment la tranquillité du Piémont et les ressources de l'armée Française, ne peuvent que repérer les liaison de l'amitié qui doit unir à jamais les deux Nations, soit qu'elles forment par la suite un seul corps politique, soit qu'elles restent séparées en différentes familles.
Le Gouvernement Provisoire, vivement affecté du tableau que présente l'état actuel du Piémont, se voyant dans l'impossibilité de faire le bien de sa Patrie, et de montrer sa reconnaissance envers le Peuple Français, si une nouvelle régénération ne s'opère dans son existence politique, et dans le système de ses finances, met toute sa confiance. Dans les bons offices qu'il espère, que vous voudrez interposer près de directeur exécutif pour obtenir les dispositions sus-énoncées.
Votre Patriotisme connu, vôtre amour pour la cause de la Liberté, et l'intérêt que vous avez témoigné pour assurer le bien du Peuple près du quel vous exercez vos pouvoirs, persuadent le Gouvernement, que les considérations supérieures qu'il a mises sous vos yeux, vous rendrons près le directoire exécutif l'organe de ses désirs, et le soutient de la Nation Piémontaise. Salut Républicain.
Signé : Caprita, Présid.
Cellisseur, sous-sécretaire Genl.
Motifs, et Résultat
De la Nôtre présentée à Musset.
Le Gouvernement du Piémont, voyant des le commencement même de son administration, la nécessité de fixer les subcides que le Piémont devais payer chaque mois à l'Armée Française, avait porté le Citoyen Aymar à signé une convention, dont le projet fut envoyé a Paris pour recevoir la sanction du directoire, pendant qu'une députation à Milan devais appuyer près du Général en Chef de l'Armée d'Italie.
Jamais on a reçu de Paris une réponce définitive sur cette convention : Aymar n'eut aucune instruction pour la mettre à éxécution, le Général Joubert, dont les bonnes intentions étaient connues et qui voyait la nécessité de mettre des bornes aux dilapidation et aux demande des agents Français en Italie, fut vaypélé au moment même.
Alors le Piémont ne vit en proie à une multitude toujours croissante de vautours qui suivaient l'Armée Française. Des Commissaires Civils, de finances, de vérification des comptes, des caissier, inspecteurs, sous caissier, et autres agents subalteunes - des ondonnateur en chef, et de détail -des commissaires pour la vente des effets jadis royeux, pour les revenus des propriétés de la courone qu'on pretendait dévolùs à la France par droit de conquête.Enfin des agents pour l'artillerie, pour l'aprovisionnement des places, pour la topographie, pour les fortifications, pour l'abilleument des troupes, s'emparent tour à tour des revenus publics, et ne laissent au gouvernement que le triste devoir de lutter inutilement contre leurs demandes journalieres, puisqu'en dernière analyse en omployait le mot magique du salut de l'Armée Française pour le forcer à une aveugle obeissance.
Plusieurs fois on s'adressa au Commissaire Aymar pour qu'il prit les meusures nécessaires pour faire cesser ces inconveniens, dont les suites accuraient été funetes au Piémont et l'Armé Française
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