La notion de “mainstream”, qui sous-tend beaucoup de fictions américaines contemporaines, repose pour son fonctionnement sur la recherche d'une voix narrative capable de relier la vie de l'individu aux rêves collectifs de la nation. Dans Continental Drift, Russell Banks explore les dégâts produits par ce mythe du “mainstream”, en introduisant une faille dans le discours qui lie son personnage, un Américain “moyen”, aux grands récits de la réussite matérielle, sociale et sexuelle. Par le recours à un narrateur qui se compare au “mouth-man” de la culture haïtienne, Banks étudie les diverses strates de la vie de son personnage qui, telles des plaques tectoniques, bougent et se déplacent selon une logique qui échappe au contrôle du personnage. Parallèlement, il construit un autre récit, celui d'un groupe de Haïtiens qui cherchent à atteindre la Floride. À travers ce récit, qui illustre le fonctionneemnt d'une voix investie de la foi d'une communauté, Banks met en évidence le vide que recouvre la notion de “mainstream” dans la culture américaine.