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François Montmaneix décortique le quotidien et le recompose selon un réseau complexe de fils entremêlés. Dans cette toile ainsi tissée se prennent de riches instants, d'impénétrables sensations, d'invisibles présences. Le lyrisme, dans ces pages, est dépouillé du superflu pour n'être qu'un chant - rigoureux mais étonné - de mots. Un humour discret vient parfois teinter des phrases d'un semblant de dérision ou d'ironie - de nostalgie, peut-être. Il y a du théâtre dans ces poèmes, du monologue, de l'aparté, de la tirade. Et les thèmes sont à la hauteur de l'écriture : l'origine, la disparition, la nature, l'autre, l'ontique, l'ontologique. Autrement dit : la vie. La musique occupe une place importante dans ce livre. Non seulement elle figure dans les vers, mais son évocation est souvent présente, voire, elle est directement convoquée. Ainsi, dans la section intitulée "An Die Müsik" - composée de vingt-huit distiques et d'un tercet - dans laquelle sont réunis des compositeurs tels que William Byrd, Carlo Gesualdo, Jean-Philippe Rameau, et, incontournables diraient d'aucuns, Bach, Beethoven, Schubert, Berlioz, Chopin, Schumann, Wagner, Verdi, Franck, Brahms, Debussy, Strauss, Ravel, Chostakovitch, Britten, Messiaen, et quelques autres. Un seul regret : l'absence de Mahler… La poésie de François Montmaneix respire profondément comme on pourrait le dire d'un alpiniste ou d'un marathonien. La scansion paraît naturelle, et le poème relève autant du langage parlé que d'une recherche littéraire subtile car discrète. Lorsqu'on a pris le rythme - cela vient vite - la parole du poète nous accompagne comme un ami fidèle.
A minuit sur le promontoire veille seul un vieux pin silencieux depuis son tronc la mer est infinie du lointain remonte un troupeau avec l'écho d'une voix d'homme à laquelle répond un chien heureux Affronte sans détour le vent qui vient du large et quand l'eau décidera d'emmener la lune et ton ombre en voyage fais monter à bord de ta barque la plus jeune ombre du vieux pin
Livre magnifique qui vous confiera ses précieux bagages et son voyage éminemment humain.
Daniel LEDUC
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