
Abdelmajid Bennour
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Descriptif auteur
Je suis enseignant dans le secondaire, mais aussi chercheur au centre d'études des solidarités sociales et chargé de cours à Paris 8 entre 1998 et 2005. Je postule pour la qualification pour devenir maître de conférence.
Marocain, né à casablanca en 1964. Cependant je suis en France depuis l'âge de 10 ans. Marié, deux enfants. J'ai entrepris ou participé à diverses recherches de terrain (Argenteuil, Chatney-Malabry, La Courneuve, Boulogne-Billancourt, Montreuil S/bois, Berlin, Rome, Quebec...) autour des problématiques relatives aux politiques publiques urbaines, et à leur évaluation dans certains quartiers en difficulté.
Structure professionnelle : bechmann.cesol@wanadoo.fr
Titre(s), Diplôme(s) : doctorat de sciences de l'éducation; DEA sociologie urbaine; DESS aménagement urbain et développement local
Fonction(s) actuelle(s) : Enseignant dans le secondaire
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AUTRES PARUTIONS
Militants des quartiers périphériques urbains (revue "Pour", Jeunes militants, cap sur les pratiques, n° 166 - Juin 2000)
LES ARTICLES DE L'AUTEUR
La participation des habitants : état de la question (1)
- un article de la loi du 18 juillet 1985, relative à l'aménagement urbain, rend obligatoire « la concertation préalable à l'engagement de certaines opérations d'urbanisme. » (3)
- et un autre de la loi du 6 février 1992 va encore plus loi n dans le sens d'u ne plus grande expression de la démocratie locale : « Le droit des habitants de la commune à être consultés sur les décisions qui les concernent » est un principe « indissociable de la libre administration des collectivités territoriales. » (4)
Principe acquis, reconnu et donc sanctionné par la loi. Mais alors, comment se fait-il que des critiques viennent de toutes parts pour dénoncer - quand elles sont modérées - l'inadéquation entre le principe et la réalité - quand elles sont passionnées - « la manipulation et la supercherie » ? Pourquoi dans la vie quotidienne, la participation des habitants apparaît-elle insuffisante, sujette à caution, voire inexistante ? Pourquoi les habitants, pourtant les premiers concernés, ne participent-ils pas, ou insuffisamment, ou encore s'ils participent, ne le font-ils pas dans les lieux qui sont prévus pour cela ?
Le constat est pour le moins mitigé. Tous les observateurs, ou presque, sont d'accord sur ce point, à défaut de l'être sur les causes ou les raisons qui l'expliquent. Quels que soient les lieux et les méthodes proposées, en général par des institutions publiques, il est difficile de faire participer l'habitant à des actions qui pourraient améliorer son cadre de vie. La remarque d'ailleurs est valable pour d'autres champs. La participation politique, syndicale ou associative connaît régulièrement, depuis une vingtaine d'années, une « décrue » significative de la part des citoyens, électeurs, salariés ou bénévoles.
Mais la participation, telle qu'elle est proposée aux habitants de certains quartiers défavorisés - ou disqualifiés, pour reprendre le terme de Robert Castel (5) - est aujourd'hui une thématique centrale de la politique de la ville - ou, plus précisément comme le rappelle à juste titre Jean-Marc Stébé (6), des « politiques de réhabilitation urbaine ». En ce sens, toutes les institutions qui sont chargées de mettre en uvre ces politiques se trouvent directement mises en cause dans leur capacité à mobiliser les habitants autour de projets visant à améliorer leur cadre de vie.
Résultat : Depuis le début des années 1980, hormis quelques rares expériences de participation réussies, l'échec dans l'ensemble est patent (7). Quel que soit leur niveau d'intervention, les promoteurs de la participation - élus, administratifs, professionnels du développement social - déplorent l'apathie, le retrait ou le manque de sens civique de la part des habitants, l'absence ou l'insuffisance d'une vie associative dans tel ou tel quartier, le repli sur soi, l'accentuation de l'individualisme négatif, une vie sociale de plus en plus anomique Le jargon abonde pour décrire ces quartiers périphériques urbains qui concentrent toutes les difficultés économiques, sociales, psychologiques et où le nombre de « familles à problèmes » et de « cas a-sociaux » - comme les nomment pudiquement les médias - ne cesse de croître. Populations « captives » - selon le terme utilisé par certains rapports officiels - qui résident dans des quartiers marqués par une dérive inquiétante vers la marginalisation et la ghettoïsation - à l'instar des quartiers ghettos américains - et qu'on a du mal, en dépit des
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Notes :
1. Intervention à l'INFREP dans le cadre de la préparation des formations « Développeurs de projets éducatifs territoriaux », niveau 1, 16 novembre 2000. Thème : « Participation des habitants aux projets collectifs locaux ».
2. Cf. A. Bennour, Logiques des participations citoyennes, Paris, L'Harmattan, coll. Logiques sociales, avril 2006, 191 p.
3. L. 300.2 du code de l'urbanisme. Cf. J. Baguenard, La démocratie locale, Paris, P.U.F., 1995, 127 p.
4. L. 192. 125, article10
5. Cf. R. Castel, Les métamorphoses de la question sociale. Une chronique du salariat, Paris, Librairie Arthème Fayard, 1995, 488 p.
6. J.-M. Stébé, La réhabilitation de l'habitat social en France, Paris, P.U.F., 1995, 127 p.
7. Remarque : recenser et capitaliser les expériences réussies est une chose, et même une bonne chose. Mais il n'est pas certain que leur transfert ou leur généralisation soient efficients, et même pertinents. En ce « domaine du vivant », il faut sans doute raisonner en termes de configuration, comme le proposait Norbert Elias, et de processus interactionnel. Cf. N. Elias, Quest-ce que la sociologie ? Trad. De l'allemand de Yasmin Hoffmann, Editions de l'Aube, 1991 [1970], 222 p.
8. Cf. J.-C. Kaufmann, La vie hlm : entre usages et conflits, Paris, Editions ouvrières, 1983, 182 p.
9. D. Fablet, Le travail social en mal de participation, Thèse de troisième cycle présentée sous la direction de G. Ferry, Université Paris X Nanterre, 1988, 247 p.
10. Cf. H. Millet (sous la direction de), Les modalités d'implication des habitants dans les politiques publiques urbaines. Evolution de la problématique de la participation, D.I.V.-D.S.U., 1990, 140 p.
11. J.-M. Delarue, Banlieues en difficultés. La relégation, Syros-Alternatives, 1991, p. 75.
12. Revue Ensemble n° 28, juillet1990, D.I.V., p. 10.
13. D. Ferrand-Bechmann (sous la direction de), La démocratie locale en question dans les villes de banlieues, Etude réalisée pour l'Association des Maires des villes des banlieues françaises par l'équipe du C.E.S.O.L. (Centre détudes des solidarités sociales), cofinancée par la D.I.V. et le F.A.S., Paris, A.M.V.B.F., 1992. p. 8. Dans le même ouvrage, Dan Ferrand-Bechmann constate par ailleurs que la recherche d'une « connaissance évolutive des besoins amène souvent les décideurs à remplacer la consultation directe des habitants par celle d'experts et d'évaluateurs. » Démarche paradoxale s'il en est qui multiplie les réseaux intermédiaires pour arriver à l'expression des habitants.
14. A. Jazouli, Les années banlieues, Paris, Seuil, 1992, p. 124.
15. M. Blanc, « La participation des pauvres et des mal logés à la réhabilitation de leur habitat et de leur quartier dans les villes françaises », in D. Ferrand-Bechmann (sous la direction de), Pauvre et mal logé, les enjeux sociaux de l'habitat, Paris, Editions L'Harmattan, pp. 1 17- 128
16. P. Calame, « L'essentiel et l'accessoire », article paru dans le numéro 36 de juin 1992 de la revue Ensemble, financée par la D.I. V., p. 32.
17. F. Ménard, in Informations sociales, Participer : le concept, n° 43, 1995, p. 37
18. Cf. A. Meister, Vers une sociologie des associations, Paris, Editions ouvrières, 1972, 220 p.
19. Th. Joliveau, Associations d'habitants et urbanisation : l'exemple lyonnais (1880-1983), C.N.R.S., 1987, p. 209.
20. J. Godbout, La démocratie des usagers, Editions Boréal, 1987, p. 67.
21. Op. cit.
22. J.-M. Stébé, op. cit., p. 92.
23. A. Touraine, Production de la société, Paris, Editions du Seuil, 1973, p. 92.
24. J.-P. Clément, La participation dans l'entreprise, Paris, P.U.F., 1983, p. 34.
25. J.-P. Clément, op. cit., p. 35.
26. Cf. M. Crozier, La société bloquée, Paris, Seuil, 1994 [1970], 222 p.
27. J. Godbout, op. cit., p. 67.
28. M. Crozier, op. cit.
29. Cf. A. Sauvage, Les habitants, de nouveaux acteurs sociaux, Paris, Editions L'Harmattan, 1992, 200 p.
30. D. Fablet, op. cit.
31. J.M. Stébé, op. cit., p. 93.
32. Circulaire R. Barre du 03 mars 1977 relative au
Les paradoxes de la participation des habitants

On peut affirmer que l'un des problèmes particuliers à la participation des habitants réside dans le fait que les habitants ne sont presque jamais consultés sur les modalités mêmes de leur participation. Et c'est un problème important, étant donné que pour que les habitants puissent prendre part concrètement et entièrement à une action collective qui les concerne ou qui peut améliorer leur situation ou leur cadre de vie ou leur quartier ou leur logement ou leur rue, il faut au moins qu'ils puissent définir ensemble les règles de base qu'ils devront accepter et respecter pour se regrouper et discuter, surtout pour pouvoir discuter. Or, comme nous avons souvent eu l'occasion de le dire et de le rappeler [Bennour 2006, 1997](1) la participation des habitants n'est pas réductible à ce qui est proposé par ailleurs, notamment par des associations plus ou moins institutionnalisées ou par les pouvoirs publics, et particulièrement les pouvoirs locaux qui, souvent, investissent un quartier, dans l'objectif certainement d'améliorer la situation des gens, mais qui définissent seuls et au préalable - c'est-à-dire avant même de procéder à ce que ces pouvoirs locaux appellent la "consultation" - des règles qui ne sont pas toujours connues par ceux auxquels elles devraient en principe s'appliquer. C'est une forme d'aporie dans laquelle s'enferment tout seuls et de par leur propre initiative les responsables de ces pouvoirs locaux, en voulant d'ailleurs bien faire le plus souvent. Ce n'est évidemment ni par méchanceté ni duplicité que ces derniers agissent de la sorte, mais plutôt par ignorance, ou peut-être, pour être moins catégorique, par méconnaissance des démarches que l'on veut proposer pour faire participer tel habitant ou tel groupe d'habitants.
La participation des habitants se pose à différents niveaux et dans des systèmes d'action locaux différents. Pour autant, on ne peut pas à la fois dire que les habitants ne participent pas ou ne veulent pas participer, ou encore n'ont pas le temps de participer, et dans le même temps créer des espaces qui leur sont éloignés ou fermés pour telle ou telle raison particulière à l'institution qui met en uvre cette démarche participative. C'est une manière quelque peu paradoxale de prévoir des espaces limités pour lesquels on va sélectionner ceux qui devraient venir participer, discuter, négocier au nom des uns et des autres. Or une telle démarche participative ne peut être véritablement porteuse d'échanges et de discussions, et donc d'amélioration à terme de la situation des gens des quartiers généralement définis comme en difficultés que si l'on prévoit d'emblée un espace le plus ouvert possible dans lequel pourraient se reconnaître, et donc y entrer plus aisément, le maximum d'habitants qui se sentiraient, par là même, du fait de cette ouverture large des espaces de discussion et de négociation, concernés.
Il arrive très souvent qu'une démarche participative soit d'abord et avant tout l'occasion de faire émerger des conflits lesquels, sans cette démarche, n'auraient peut-être jamais vu le jour, ou seraient restés cachés, latents, ou encore, ces conflits se seraient manifestés ailleurs et de manières différentes selon les cas, par la violence, la dégradation de son lieu de vie, voire par la dépression ou le suicide. Et cela se produit bien que l'intention ou l'objectif des initiat
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Notes :
1) A. Bennour, Logiques des participations citoyennes, Paris, L'harmattan, collection "Logiques sociales", avril 2006, 191 p.
2) M. Crozier, La société bloquée, Paris, Seuil, 1994 [1970], 222 p.