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Jean-Marc Streicher

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LES ARTICLES DE L'AUTEUR

Une Année Sans Printemps <em>(extrait)</em>

TABLEAU 1
Violente tempête
LES ACTEURS
- Et soudain les eaux du fleuve dans un sifflement perçant se soulevèrent et fendirent les
digues en argile.
- Des ruisseaux de sang et de larmes rouges jaillirent des falaises de craie et de calcaire et
les murs mêmes de la mer reculèrent de plusieurs mètres.
- Trois fois, sous les assauts de la nuit noire, on entendit des mugissements monter du
sol.
- Partout, on fuyait sans se retourner, en hurlant que la terre accouchait d'un monstre et
que ses soubresauts et ses tremblements n'étaient que les efforts pour l'étouffer.
- Le malheur roulait ses pierres sur le front fragile des vivants.
- Des nuages de glace avec la fulgurance de l'éclair fondirent sur le sol pour le pétrir.
- Très vite, la coulée de boue n'amassa plus que détresses et souffrances.
- Elle roulait. Elle progressait.
- Elle s'épaississait des vies qu'elle avalait et broyait.
- "La mort grossit à vue d'oeil. Elle enfle. Voyez ses tumeurs qui gonflent."
- C'étaient les paroles que l'on entendait encore parmi les hommes.
- Certains piétinaient leur peur sous leurs pas, d'autres cherchaient une posture avant de disparaître.
DES PERSONNAGES
- Aidez-moi !
- Montez sur le toit !
- Les enfants ! Quelqu'un sait où sont les enfants ?
LES ACTEURS
- Ce fut comme un hiver aveuglant, une tempête de neige en plein midi, une meute hurlante de décombres,
- Une armée que l'on croyait morte.
- Le troisième jour, l'orage sortit de son lit.
- Et des trombes d'eau se déversèrent, déchiquetant les arbres et noyant ceux qui avaient saisi une branche, une branche creuse, un fragment d'écorce.
- Et l'on vit passer, dans la pâte noire de la terre, des noyés, des criants muets, des appels se perdant au large de toute espérance, des lambeaux d'obscurité arrachés au plein jour, des pans entiers de montagnes jetés contre les cloisons tremblantes de la voûte céleste.
(…)
Au public - A présent, nous allons vous jouer un sauvetage, qui est aussi l'acte de naissance
de notre héros.
- Il avait cinq ans.
- Et vous raconter un fait émouvant et unique dans les annales de l'humanité.
- Sa mère l'avait calé dans un cageot en bois.
- Et vous prouver que, dans ce chaos, un coeur plein de vie remonte toujours à la
surface.
- Ecoutez ses dernières paroles.
LA MERE DE L'ENFANT - Ne bouge pas, mon petit, ne quitte pas cette nacelle. Elle
est plus légère que la boue. Elle seule te gardera en vie. Serre tes petits poings très fort.
Surtout ne te retourne pas. Moi, je resterai sur le bord et je prierai pour toi.
- A présent regardez cette frêle barque.
- Portée par des déferlantes qui lui cachaient le ciel.
(…)

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Fiche de Lecture 2<em> (extrait)</em>

Une troupe de théâtre répète une pièce. Il s'agit de l'errance d'un jeune garçon orphelin dans son pays d'origine dévasté par un hiver métaphorique et de son apprentissage de la cruauté, de la souffrance et du désespoir de l'homme. Mais les mots du théâtre sont comme ses costumes bricolés, l'artifice du théâtre ne satisfait pas toujours leur souci de vérité.


La pièce s'ouvre par une vision d'apocalypse en un récit très fort, très poétiquement efficace porté par le groupe des acteurs et on imagine qu'elle s'inscrit dans un imaginaire biblique. Cet enfant que sa mère abandonne sur l'impétueux fleuve de boue n'est-il pas un nouveau Moïse, celui qui remettra les hommes sur le chemin de la raison ? Mais déjà son costume est inapproprié et l'acteur qui l'incarne devra se contenter de chaussures trop étroites. Le fossé entre le projet de raconter la catastrophe et les moyens techniques et artistiques de la petite troupe ne fait que se creuser au fil des épreuves de force. De la même manière que se creuse le fossé entre le constat de la désolation et les forces de l'humanité pour remédier à son malheur. Nous croyons marcher sur la terre. En fait, nous marchons sur la boue et il n'y a que l'épaisseur d'un pas entre le vivant et le mort. Que valent les efforts du théâtre ? Rien d'autre que d'affirmer sa propre nécessité "ce silence n'est pas pour nous. Pauvre idiot, parle et sois joyeux."


C'est un texte riche dans son propos comme dans sa forme. Une oeuvre singulière, très bien écrite, solidement construite et dont la générosité (certains la jugeront excessive) semble vouloir embrasser toute l'histoire du théâtre. On y croise l'esprit d'Hamlet, des citations de Beckett, le Brecht des paraboles chinoises, le mythe du chariot de Thepsis, toute cette légende fondatrice qui paraît impuissante à raconter le monde d'après la catastrophe. Cette conscience si fragile qu'il convient de préserver comme un enfant dans un cageot, confié à la clémence du fleuve. "L'acteur a besoin d'indulgence. Et de compassion. C'est vrai, sa révérence au bord de la scène est dérisoire. Mais s'il disparaît, c'est la vie qui s'en va."

Signature :
Gilles Boulan et le Comité de lecture

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Fiche de lecture

Une année sans printemps
12 comédiens jouant plusieurs rôles.



Un jeune homme, Côme, rescapé miraculeux d'une immense coulée de boue est élevé et protégé par une mère adoptive jusqu'au jour où il décide d'aller à la rencontre de son " arrière-pays " et de partir en quête de son origine et de son identité.
Il va ainsi voyager dans les décombres d'un monde dévasté par les guerres et les catastrophes. Peu à peu, c'est l'hiver de l'humanité qui semble sortir de terre : des estropiés, un idiot, un déterré… des personnages qui interrogent l'humanité, l'inhumanité aussi, qui parlent de leurs blessures et révèlent la cruauté et la misère du monde, la présence du mal… En filigrane, ce sont les horreurs du monde contemporain qui défilent. Même si elles sont évoquées sans repères temporels ou géographiques, elles finissent par tisser une épopée hivernale et foisonnante qui n'est pas sans rappeler Tête d'or de Paul Claudel et L'apocalypse joyeuse d'Olivier Py.
" Qui oserait remuer la cendre des mots avec sa propre langue. Déterrer une immensité de deuil. Dire notre éloignement de tout ? " Tel est le projet de l'auteur…
Il est rare de trouver une pièce contemporaine qui ose prendre la question de l'être à bras-le-corps. L'auteur prend le pari d'un face-à-face, qui est d'autant plus efficace qu'il se fait sous le mode du théâtre dans le théâtre, d'une certaine manière " par un théâtre de bande " : des ruptures sont ménagées dans l'histoire dans lesquelles les personnages redeviennent des acteurs, dans lesquelles cette humanité atrophiée redevient troupe de théâtre. Grâce à cette distanciation, les questions que se posent les comédiens sur l'authenticité, la vérité et le sens de leur art deviennent aussi des questions d'humanité. C'est en outre un bel hommage au théâtre.
Une pièce qui nécessite une distribution nombreuse, jeune, enthousiaste.

Signature :
Comité de lecture

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Quand le chaos fait sens

Jean-Marc Streicher enseigne les lettres au lycée de Ribeauvillé et les arts du spectacle à l'université Marc-Bloch de Strasbourg. Il vient d'écrire sa première pièce de théâtre " Une année sans printemps ", passerelle entre les deux disciplines.

Le titre annonce la couleur. " Une année sans printemps ", tragédie en 16 tableaux, parue à l'automne 2007, n'est pas une pièce gaie. Jean-Marc Streicher a l'ambition de traiter du chaos qui règne dans le monde. Vaste sujet que l'auteur aborde par le biais du théâtre dans le théâtre. Rescapé d'une immense coulée de boue, le personnage principal se met en quête de ses origines, son " arrière-pays " comme il dit. Dès lors, dialogues de la pièce et interrogations des personnages alternent. Ce voyage à travers le monde dévasté est l'occasion d'un état des lieux bien sombre.
 Le professeur agrégé de lettres fait partie de ceux pour qui le pire est devenu possible : " Depuis Auschwitz, le XXe siècle n'a cessé de le démontrer. A la folie meurtrière des hommes au Rwanda, en Bosnie font écho les catastrophes naturelles ". Jamais nommées, ces catastrophes peuvent se lire en filigrane.
Pas de caractère inéluctable.
 Jean-Marc Streicher transcende le constat. Il propose au spectateur de s'interroger sur notre condition et notre aptitude à faire face. Comme dans la Bible et le Livre de Jonas, cités en référence par l'enseignant, les catastrophes n'ont pas, à ses yeux, de caractère inéluctable : Jonas annonce la destruction de la ville de Ninive, mais la cité est épargnée, les habitants ayant décidé de se repentir. " La catastrophe amène les gens à se repositionner et à s'interroger sur leur propre rôle dans la vie ".
 Nourri de Brecht, Jean-Marc Streicher reprend à son compte le flambeau du théâtre engagé, mais il se borne à suggérer une voie : " Aucune idéologie ne peut aujourd'hui prétendre donner un sens cohérent au monde ".
 Une association de metteurs en scène a proposé au théâtre de l'Odéon à Paris une lecture publique de la pièce et des acteurs du théâtre universitaire de Strasbourg sont intéressés par " Une année sans printemps ". Avant cette pièce, Jean-Marc Streicher a écrit en 2003 " Passages ", le texte d'un long métrage qu'il a co-réalisé avec Daniel Coche. Le film a été diffusé en Alsace et sur des chaînes câblées.
" Il n'y a pas que Phèdre ". 
Ancien élève de l'Institut National Supérieur des Arts du Spectacle, Jean-Marc Streicher a travaillé avec Jean-Pierre Vincent, directeur du Théâtre National de Strasbourg, puis avec Pierre Barrat à La Manufacture à Colmar. Il a aussi animé de nombreux ateliers de formation.
 A ses élèves du lycée Ribeaupierre et de l'IUFM, il souhaite donner le goût du théâtre, même si le milieu scolaire reste un peu frileux : " Il n'y a pas que Phèdre. Le programme permet de s'ouvrir aux auteurs contemporains ". Pour preuve, le lycée Ribeaupierre organise le jeudi 17 janvier à 17 h 30 dans ses murs une rencontre avec l'auteur.

Signature :
Agnès Muller - Dernières Nouvelles d'Alsace - Samedi 12 janvier 2008

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