
Josaphat-Robert Large
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Descriptif auteur
Poète et romancier, Josaphat-Robert Large écrit en français, en créole et en anglais. De plus en plus, sa présence prend de l'ampleur dans l'espace des littératures insulaires. En mars 2006, la Société des professeurs français et francophones d'Amérique ont organisé un colloque autour de son oeuvre, à Fordham University, à New York.
Josaphat-Robert Large est né à Jérémie (Haïti), en novembre 1942. Il a fait ses études primaires chez les Frères de l'Instruction chrétienne (F.I.C), et ses secondaires, au Collège Fernand Prosper et au lycée de sa ville natale. A New York où il s'est rendu à la fin des années 1960, il a étudié l'anglais à Colombia University et la Photographie à New York Institute of Photography. Il a aussi suivi des cours de linguistique à New York University.
Structure professionnelle
:
37 berkshire Rd
Rockville Ctr
New York 11570 USA
tel (516) 887-2733
Titre(s), Diplôme(s) : Photographe
Fonction(s) actuelle(s) : Traducteur
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AUTRES PARUTIONS
Chute de mots (poésie), Editions Saint-Germain-des-Prés, Paris, 1989
Pè Sèt ! (poésie créole), Edisyon Mapou, Miami, 1994 rééd. 1996
Keep On Keepin' On (Traduction anglaise du recueil Pè Sèt) Traducteur: le poète américain Jack Hirshman. Editions: iUniverse, Lincoln, Etats-Unis, mars 2006
LES CONTRIBUTIONS DE L’AUTEUR
LES ARTICLES DE L'AUTEUR
Partir sur un coursier de nuages
Ouvrir un nouveau roman de Josaphat-Robert Large ressemble à un rendez-vous jalousement espéré. On sait que l'on retrouvera, sans aucun doute, un récit dont la trame produit un effet de réel qui contribue à l'intensité dramatique. Le rythme est déterminé par les rapports entre le temps de la fiction (celui de la durée de l'intrigue) de la narration (celui nécessaire pour raconter l'histoire). Et ce, au moyen d'ellipses qui s'ajoutent aux repères temporels aussi bien qu'aux repères spatiaux.
Partir sur un coursier de nuages, second tome de la trilogie les empreintes de la vie dont le premier. Les terres entourées de larmes (l'Harmattan 2002) avait remporté le prix littéraire des Caraïbes en 2003, semble restituer toute la mesure des techniques de construction romanesque de Dos Passos. Il obéit au postulat des formes nouvelles de création du genre chères à Mussil et Durrell.
Loin des routines narratives imprescriptibles, Josaphat-Robert Large demande au roman autre chose qu'un récit, une analyse, une étude socio-historique. Il propose que le roman soit une recherche, une quête esthétique avant d'être un récit soucieux des formes polyphoniques, musicales, stéréophoniques. Son intention est carrément phénoménologique, encore que s'y mêlent subjectivité et objectivité. Le roman est présenté comme une matière fluide, à essence poétique. On y entre à plaisir sans aucun désir d'en sortir. Cela va de soi.
D'emblée, il est loisible de suivre l'aventure personnelle de Cyparis, le rescapé de la déflagration qui se déploya au-dessus de la Grand-Case puits de la Montagne-Guirlande. Explosion labyrinthique. Le fond du tableau n'est plus la réalité objective sur laquelle se découpe la silhouette du protagoniste, mais c'est son profil mythique qui domine une certaine tranche de l'histoire déjà légendaire en raison de la pneumatologie qu'elle sous-tend.
Romancier de l'histoire, Josaphat-Robert Large entreprend d'amasser, de codifier et d'annoter le passé ou certains de ses aspects émouvants ou terribles avant qu'il ne se perde dans le tourbillon de l'oubli. C'est la tâche surhumaine qu'il s'est assignée. "L'Afrique est une forêt que mes pas ont arpenté de long en large. C'était le lieu où j'avais l'habitude de franchir tous les obstacles pour atteindre les bleds où se maintenait l'équilibre de mon existence". (p. 11)
Le miroir brisé du romancier
Clins d'oeil sur la revanche de l'Histoire, de l'assassinat systématique de la mémoire collective prise sous un angle d'éternité, instruction apparente du procès du néocolonialisme et de ses instances de légitimation, ce roman de Josaphat-Robert Large est tout cela. Et plus encore. Sûr d'avoir tout compris jusque dans ses idées reçues, le Narrateur est capable de toutes les émotions comme de toutes les lucidités. "Je suis né une fois dans le ventre d'un requin. Comme Jonas dans sa baleine. J'ai fait le tour du monde à l'intérieur du terrible prédateur, et c'est là que j'ai curieusement appris à me défendre". (p. 12)
En tout, c'est l'homme et l'homme seulement et les contours passionnants de son existence qui intéresse le romancier au miroir brisé, mais l'homme tel qu'il se sent lui-même, dans la méditation intime du moi plein et profond. La force de ses sentiments est telle qu'il lui faut un ciel, un purgatoire et un enfer pour pulvériser les motifs secrets de sa violence concentrée, de ses utopies jubilatoires, de son impossible idéal, de sa mélancolie presque toujours sérieuse et grâve. Quel auteur avait écrit, on est pessimiste pour rendre les tâches collectives encore plus urgentes. Large semble voué au pessimisme affectif, voire métaphysique. Son image s'apparente à celle de Sisyphe qui signifie que la douleur est sans remède et que le propre de cette souffrance c'est d'être encore plus pénible (par les temps qui courent), d'exiger de tous les hommes, dans une action concertée, solidaire l'effort qu'il faut sinon pour la vaincre du moins pour la
Notes :
Article paru dans Le Nouvelliste du 22 août 2008,
Section : Culture
Littérature, Histoire et Identité dans Partir sur un coursier de nuages
A cheval entre sa société d'accueil (NY) et sa société d'origine (Haïti), Josaphat-Robert Large s'affiche comme l'écrivain transnational par excellence et son uvre littéraire le démontre amplement : il écrit en créole Pè Sèt, 1996 et ce volume a été traduit en anglais sous le titre Keep On keeping'On par le poète américain Jack Hirschman en 2006 ; en français deux recueils de poésie Nerfs du vent (1975) et Chute de Mots (1989); et trois romans : Les sentiers de l'enfer, Les récoltes de la folie, et Les terres entourées de larmes, tous trois publiés chez L'Harmattan à Paris en 1990, 1996, et 2002 respectivement. Le roman Les terres entourées de larmes a obtenu le Prix littéraire des Caraïbes en 2003.
Partir sur un coursier de nuages constitue le second tome d'une trilogie amorcée avec Les terres entourées de larmes. On y retrouve les principaux personnages de ce dernier roman : le pharmacien Auguste Cadet, du Cap-Haïtien, sa femme, Gisèle Villegrâce, de Jérémie, sa seconde femme Monique, la sur de Gisèle, que Auguste Cadet avait épousée en secondes noces, croyant que Gisèle avait été tuée "au cours de l'embuscade meurtrière qui avait coûté la vie" à ses parents. Mais là s'arrête toute tentative de relier l'histoire qui se déroule dans les deux volumes. En fait, il faudrait se demander dans quelle mesure le second volume fait vraiment suite au premier. Après tout, "Partir sur un coursier de nuages" peut très bien se lire sans se référer absolument au précédent roman. Le lecteur n'est pas obligé d'avoir recours aux principaux personnages de Les terres entourées de larmes.
Pour expliquer ce paradoxe, il faut comprendre que Partir sur un coursier de nuages semble avoir été conçu comme un texte tout à fait nouveau. La problématique qui y est posée rejoint des questions fondamentales puisant ses sources dans l'essence identitaire à partir des grandes migrations africaines forcées vers le Nouveau Monde. La structure même de ce second volume diffère largement de celle du premier. Partir sur un coursier de nuages est bâti en petites tranches d'histoire, dix-huit tranches exactement qui changent de contenu, de voix narratrice, et de perspective générale à mesure qu'elles se déroulent. Elles mettent en scène le nommé Cyparis, unique rescapé de la formidable et meurtrière éruption du volcan la Montagne Pelée qui détruisit la ville de Saint-Pierre en Martinique sous un amas de flammes, de lave et de cendres le 6 mai 1902. En tant que seul survivant, Cyparis raconte à la première personne les détails de l'engloutissement de Saint-Pierre et comment il a pu survivre une telle catastrophe. Il revient en arrière pour expliquer les lentes transformations de l'évolution de l'homme, débutant en tant que petit-fils de l'homme-gorille des plaines de l'Afrique, devenu singe, orang-outang, être bipède, doué de paroles, et changeant de régime alimentaire. Capturé, il se retrouva enchaîné au fond des cales des négriers en partance pour le Nouveau Monde où sa force de travail fut exploitée "pour favoriser l'enrichissement de ceux qui fabriquaient les chaînes qu'on attachait à [ses] pieds." Cyparis raconte son histoire avec sa perspective d'insulaire martiniquais, mais il aurait pu tout aussi bien être né au Brésil, en Haïti, aux États-unis, à Cuba
En fait, Cyparis symbolise l'homme noir et sa condition dans le monde. Il fut évangélisé par les missionnaires, devint prêtre, répandit la parole de Dieu, passa boxeur sous la houlette des entraîneurs et "gravit l'esplanade des rings" pour "rapporter plus d'argent aux Maîtres". Cyparis a été tour à tour esclave manchot, dévoré par "des meutes de chiens galeux assoiffés de sang", lynché "dans une rue ensoleillée de l'Alabama", arrêté pour vol et incarcéré dans une cellule crasseuse de Saint-Pierre, combattant aguerri dans l'armée de Toussaint Louverture, "fusillé pour la millième fois s
Notes :
Article paru dans Haitian Times
Vol 10 #35, septembre 2008