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Philippe Raggi

Philippe Raggi

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Philippe Raggi

Descriptif auteur

Directeur du département Asie du Sud Est à l'Académie Internationale de Géopolitique.
Chargé de recherche au Centre Français de Recherche sur le Renseignement (CF2R).
Né à Madagascar en 1965.
Etudes de Philosophie (hypo-Khâgne Honoré de Balzac, Khâgne Henri IV).
Deux ans dans les Parachutistes (17ème RGP, 1987-1989).
Documentaliste à Paris.
Travail à l'étranger (Hong Kong, 1992-1993).
Documentaliste, enseignant de Français Langue Etrangère.


Fonctionnaire à l'Institut Géographique National (septembre 1996, rédacteur de marchés publics, puis chargé de la Mission Archives en mai 2005).


Fonctionnaire à la DDTM de la Vendée depuis 2013, comme chargé d'études puis en tant qu'Instructeur Police de l'eau (Commissionné).


Voyages à l'étranger (particulièrement en Asie du Sud-Est dont l'Indonésie, très régulièrement).
Rédacteur d'articles dans des revues spécialisées (Revue de la Défense Nationale, Revue Française de Géopolitique, Renseignement & Opérations Spéciales, Intelligence & Sécurité, La Lettre Sentinel, TTU, Revue Militaire Suisse, etc.) et sur différents sites internet (Net4war, checkpoint on line, Fondation pour la Recherche Stratégique, etc.).
Intervention sur radio et TV (Radio Canada, radio Notre-Dame, radio Téhéran, radio Courtoisie, radio-france Bleue, LCI, RT en français).

Structure professionnelle : DDTM de la Vendée
19 rue Montesquieu
85021 La Roche sur Yon

Titre(s), Diplôme(s) : Etudes de Philosophie (Classes Prépa à l'ENS)

Fonction(s) actuelle(s) : Instructeur Police de l'eau

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AUTRES PARUTIONS

GUERRE SECRETE CONTRE AL-QAEDA, Denécé Eric (coord.), Coll. Référence géopolitique, ISBN : 2-7298-1375-6, Ellipses 2002
GEOPOLITIQUE DES ETATS-UNIS (édition 2005), Chauprade Aymeric (sous la direction), Revue française de géopolitique, ISBN : 2-7298-2179-1, Ellipses 2004
AL-QAEDA : LES NOUVEAUX RESEAUX DE LA TERREUR, Denécé Éric (sous la direction de), Coll. Référence géopolitique, ISBN : 2-7298-2238-0, Ellipses 2004


LES ARTICLES DE L'AUTEUR

Pierre Schoendoerffer : une mémoire (bien) française 2 mai 2004

Peu de cinéastes, comme Pierre Schoendoerffer, ont si bien restitué l'histoire récente de notre pays, précisément depuis 1945. En quelques films, il a donné offert aux spectateurs une vision esthétique sur la guerre et les hommes de guerre ; toujours en partant du singulier pour atteindre l'universel, il a tracé une œuvre unique, non seulement en servant de modèle à nombre d'autres cinéastes - français et étrangers - mais aussi en laissant dans les toutes les mémoires, des modèles d'humanité.

Les passionnés de Schoendoerffer - "Schoen", comme l'appellent ses intimes - vont pouvoir enfin renouer avec le plaisir de voir une de ses œuvres ; le 5 mai 2004, quarante-huit heures avant la célébration du cinquantenaire de Dien Bien Phu, sortira sur les écrans français la dernière œuvre de l'académicien : "Là-haut".

Voilà près de deux ans que ce film est terminé mais il fut difficile pour "Schoen" de trouver un diffuseur. "Là-haut" est tiré d'un des derniers romans de celui qui est aussi écrivain, rappelons-le, avec plus de cinq romans-récits, presque tous récompensés par de vrais instances littéraires françaises comme l'Académie Française.

Que relate "Là-haut" ? Nous sommes en 1975, une équipe de cinéma est sur les hauts plateaux de Thaïlande, pour tourner des plans d'un film intitulé "Un Roi au dessus des nuages". Un jour, le cinéaste, Pierre Lanvern (Jacques Perrin), annonce à son équipe qu'il part, seul, en repérage pour trois jours. Il disparaît sans aucunes traces. L'équipe repart en France, le film est arrêté. Causant tout autant le désarrois et la stupéfaction que la colère et l'indignation, cette disparition va conduire une jeune journaliste (Florence Darrel) à enquêter sur cet homme "pas vraiment comme les autres". On apprend vite que le cinéaste a été arrêté par le régime communiste Laotien et qu'il est menacé de la peine de mort pour espionnage : en fait de repérages, Lanvern est allé vers la frontière Lao pour participer à la fuite de son ami, un prisonnier laotien, le Général Cao Ba Ky, ancien soldat de l'Armée Française, bête noire des marxistes de Vientiane.

Enquêtant en France, la journaliste rencontrera ceux qui ont connu Pierre Lanvern, à commencer par celui qui dirige le journal où elle travaille (Claude Rich). Au fur et à mesure que son enquête progresse, la journaliste rencontrera - souvent de manière moins volontaire qu'elle ne le croit - la plupart de ceux qui ont connu Lanvern. Ainsi, peu à peu, elle découvrira - tous comme nous spectateurs - l'itinéraire et l'histoire de cet homme à présent menacé de la peine capitale dans un pays à dix mille kilomètres de là. Par son enquête, la jeune femme va pénétrer plusieurs "cercles" composés d'anciens militaires, de cinéastes, de membres des services secrets (Bruno Cremer), tout un monde dont elle ignorait jusqu'à lors l'existence. Parfois manipulée ou seulement "conduite gentiment", la naïve journaliste découvrira par facettes le disparu, en empruntant les traces de Pierre Lanvern, de sa douce adolescence bretonne aux fureurs de la guerre d'Indochine.

Mais ce n'est pas seulement une banale enquête historique que la jeune journaliste entreprend : celui qu'elle cherche à découvrir est au même moment entre la vie et la mort ! Il y a donc une tension supplémentaire puisque le sort de Lanvern se joue alors même qu'elle dévoile le cinéaste dans sa complexité d'homme aux multiples facettes (reporter, cinéaste et espion ?). La journaliste finira-t-elle son enquête ? Lanvern sera-t-il sauvé ? Laissons aux spectateurs le plaisir de le découvrir.

Dans "Là-haut", Schoendoerffer nous conduit de témoignage en témoignage vers des "territoires" qu'il affectionne : l'Asie, les hauts plateaux indochinois mais aussi la guerre, les hommes d'Armes, l'honneur et la fidélité.

Un film de Schoendoerffer est toujours un événement. Avec seulement quelques uns, il a marqué l'esprit de plusieurs générations de français, ravivant la mémoire de notre passé colonial et la grandeu

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INDONESIE : LA QUESTION DE LA SECTE AHMADIYAH POSE LE PROBLEME DE L'INTRUSION DE L'ETAT DANS LA SPHERE DU RELIGIEUX Note au 15 juin 2008.

Après que le gouvernement indonésien ait plutôt longuement tergiversé au sujet de savoir s'il fallait interdire ou non la secte musulmane Ahmadiyah par la publication d'un décret, et alors que de nombreuses mosquées et biens appartenant au groupe "déviant" sont détruits ici et là en Indonésie depuis plusieurs mois - ceci dans le silence ou l'indifférence totale des politiques sur ce point (1) et également sans aucune intervention ou interposition des forces de Police lors des dégradations commises sous leurs yeux - quelques précisions s'imposent pour une meilleure compréhension de la question.

Par le développement en Indonésie d'un Islam plus puritain, rigoureux, aux accents wahhabites, il fut et il est aisé depuis quelques années, aux mouvements islamistes radicaux de manipuler les masses musulmanes dans la voie de l'intolérance et de les inciter à se dresser contre l'infidèle, à agir contre des "hérétiques". C'est ainsi que non seulement des églises (ou lieux de cultes improvisés) ont été vandalisées, d'autres détruites par le feu (2), mais également de nombreuses mosquées et des bâtiments afférents appartenant à des sectes diverses ont été rasés par des foules en colère (3) et enfin des individus molestés et mis en prison car prêchant un Islam déviant (4).

Le cas de la secte Ahmadiyah

L'Islam fourmille de sectes en tout genre et la secte Ahmadiyah n'est que l'une d'entre elles. Elle est née dans le Penjab indien, précisément à Qadian, fondée en 1889 par Hadhrat Mirza Ghulam Ahmad (1839-1908) lequel était considéré comme l'Imam Mahdi (le dernier prophète, l'envoyé de la fin des temps, le Messie) (5). En 1914, à Lahore - située au Pakistan actuel - naissait une variante de cette secte (6), la Ahmadiyya Anjuman Isha'at Islam (le mouvement Ahmadiyah pour la propagation de l'Islam). Si les membres de ces deux sectes sont appelés les Ahmadis, les deux mouvements s'excluent néanmoins radicalement l'un l'autre pour des raisons théologiques (7) profondes.

C'est un peu plus tard, dans les années 20 que la Ahmadiyah est apparu en Indonésie. Tout d'abord, en 1924, la Ahmadiyya Anjuman Isha'at Islam par l'entremise de Maulana Ahmad et de Mirza Wali Ahmad ; ces derniers nommèrent leur mouvement Gerakan Ahmadiyah Indonesia (GAI), le mouvement Ahmadiyah indonésien ; il est aussi connue sous le nom d'Ahmadiyah Lahore (issue de la variante du mouvement).

En 1925, c'est le tour de l'autre mouvement Ahmadiyah, arrivant dans l'archipel, par l'entremise de Mohammad Rahmat Ali. Ce dernier appela son mouvement la Jemaah Ahmadiyah Indonesia (JAI), la congrégation Ahmadiyah indonésienne ; elle est aussi connue sous le nom d'Ahmadiyah Qodiyani (du nom de la ville de Qadian).

Aux motifs du ressentiment et de la radicalisation

JAI et GAI rassemblent aujourd'hui près d'un demi-million de "fidèles" ou membres en Indonésie. Des deux mouvements Ahmadiyah, la JAI - dirigée par Ahmad Basit - est considérée comme étant la plus importante en nombre et, paradoxalement, comme la plus "puritaine". Paradoxalement, car si la JAI considère Mirza Ghulam Ahmad comme le dernier prophète après Mahomet, la GAI ne le considère en revanche que comme un réformateur.

La question de savoir si Mirza Ghulam Ahmad est ou non le dernier prophète est un point important quant à l'orthodoxie musulmane. En effet, celle-ci considère Mahomet comme LE dernier prophète ; c'est d'ailleurs un des premiers éléments de la profession de foi musulmane : "La ilaha illa-llah, Mohammad Rassul-allah" (Il n'est pas d'autre divinité que Dieu et Mahomet est son prophète).

Par ce biais, il est aisé de manipuler les musulmans indonésiens qui, dans leur majorité, ne connaissent pas grand'chose aux questions théologiques. S'ils n'ont retenu qu'une chose de leur enseignement coranique, c'est tout de même leur profession de foi. Il s

Notes :
Notes:
(1) Dans tel ou tel province ou district, certains hommes politiques du PDI-P par exemple (parti nationaliste séculier), alors qu'ils étaient au mieux avec les Ahmadis, ont changé complètement leur fusil d'épaule lorsqu'il s'est agit, en vue d'élections proches, de bénéficier du soutien de Kyais locaux - un Kyai est un Ouléma dirigeant une Pesantren, une école coranique traditionnelle. (Cf. le cas d'un Bupati - un régent - à Java Ouest). Les politiques utilisent la religion comme une carte, en fonction de leurs intérêts particuliers ; mais ce jeu peut s'avérer dangereux à long terme, surtout avec les islamistes.
(2) Ceci au motif qu'elles n'avaient pas d'autorisation légale. Beaucoup d'églises en Indonésie sont, il est vrai, "techniquement" illégales. Ceci à cause d'un décret gouvernemental stipulant que tout établissement d'un édifice religieux (église, temple ou mosquée) doit recevoir préalablement l'approbation de la communauté locale. Etant donnée la démographie respective des communautés chrétiennes (protestants et catholiques) face à la communauté musulmane dans le pays, un tel décret ne peut-être que forcément discriminatoire à l'encontre des non-musulmans dans la plus grande partie de l'archipel. Enfin, le processus d'autorisation d'un lieu de culte - utilisant les canaux d'une bureaucratie "lourde" - est-il, faut-il le souligner, long et onéreux.
(3) Cf. le cas de la Yayasan Kanker dan Narkoba Cahaya Alam (YKNCA), un groupe actif dans l'aide aux victimes du cancer et des psychotropes, et dont le centre d'activités situé à (Java Est) fut attaqué début 2005 par une foule "anonyme".
(4) Cf. le cas d'Yusman Roy à Malang (Java Est) qui avait le "tort" de proposer des prières en langue indonésienne. Il purge actuellement deux ans de prison à Malang. Une Cour de Justice de Jakarta, par ailleurs, a condamné Lia Aminuddin, chef de la secte Salamullah, à deux ans de prison. Quant au prophète auto-proclamé Ahmad Mushaddeq, chef de la secte Al-Qiyadah Al-Islamiyah de Bogor, il recevait fin avril 2008, une peine de quatre ans pour "blasphème envers l'Islam".
(5) L'actuel dirigeant du mouvement est Hadhrat Mirza Masroor Ahmad, élu en avril 2003. Son titre officiel est Khalifatul Massih V.
(6) C'est en 1974, sous le règne du "socialiste" Zulfikar Ali Bhutto, que la secte des Amadiyah de Qadian est déclarée non-musulmane et, de la sorte, victime de discrimination.
(7) Les Ahmadis de Lahore ne reconnaissent pas Mirza Ghulam Ahmad comme le dernier prophète après Mahomet. La Ahmadiyya Anjuman Isha'at Islam, d'ailleurs, n'a de cesse de souligner ce fait important à leurs yeux (Cf. son site internet < http://www.ahmadiyya.org/clarifi.htm >) tant ils ne souhaitent pas être ostracisés, subir d'attaques physiques et tomber sous le coup de la Loi.
(8) Le MUI est un organisme créé le 26 juillet 1975, sous l'ère Suharto, et qui joue un rôle consultatif et de coordination en matière religieuse musulmane auprès de l'exécutif ; en dehors de promulguer des Fatawa, il est l'organisme habilité à distribuer le label "Hallal". Suharto a utilisé à quelques reprises le MUI et ses Fatawa pour défendre sa politique, lui donner une assise et une légitimité.
(9) Deux personnes rencontrées, Chairul Imam (ancien Attorney General d'Indonésie) en Septembre 2007, et Agus Suradika (Recteur de l'Université Muhammadiyah) en Mars 2008, considèrent sans ambages que les Ahmadis ne peuvent, en aucun cas, se réclamer de l'Islam ; la fatwa du MUI est donc pour eux justifiée. La question de légiférer sur la question et donc d'incorporer cette interdiction dans le Droit indonésien ne leur a cependant pas été posée. A l'opposé, une autre personne, intellectuel éminent de la Muhammadiyah, Habib Chirzin, pense que la question de la Ahmadiyah ne se pose même pas, tant "les Ahmadis sont consubstantiels à la Muhammadiyah" (ils ont en effet participé à la rédaction de la "Constitution" du mouvement d'Ahmad Dalhan en 1912). Mais, compte-tenu de la situation présente
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Hérauts malgré nous février 2006

Nous sommes toujours l’Autre de quelqu’un. Qu’on le veuille ou non, lorsque l’on voyage - en touriste ou non -, a fortiori loin de ses pénates, nous ne transportons pas que notre petit moi et ce qui peut l’identifier parmi notre entourage immédiat mais également ce qui nous constitue par-delà ces caractéristiques contingentes égotiques ; nous sommes en effet aussi les hérauts d’autres éléments qui participent à ce que nous sommes, à savoir une couleur de peau, l’appartenance à un pays, à une civilisation, à une culture particulière, à une histoire. Et cette identité s’opère malgré nous et sans nous, par le seul regard qu’offre notre présence, simplement parce que le regard de l’autre ne nous perçoit pas en tant que même : cet autre est d’une autre couleur de peau, d’un autre pays, d’une autre civilisation, d’une autre culture, d’une autre histoire, d'une autre tradition.
En ayant conscience de cet état de fait, nous portons le moins de préjudice à qui que ce soit. Mais force est de constater que certains touristes voyagent dans le monde en aveugle, en voulant reproduire souvent ce qui constituait leur environnement là où ils résidaient, voyageant non pour trouver et découvrir l’autre et le différent mais pour re-trouver le même en toute chose, avec certes un léger vernis exotique pour se dire ailleurs.
Un exemple concret. Que penser par exemple, de ce qui se passe dans le sud de la Thaïlande depuis longtemps maintenant. Deux « spots » voient converger des milliers de touristes : Phuket, Phang Nga. Que peut-on y voir ? A Phuket, une « Gay Pride » diurne organisée dans les rues de la ville, avec son cortège de musique « techno-trans » et de comportements avilissants, suivie d’une bacchanale qui ressemble tant aux autres nuits de la ville. A Phang Nga, une « Full Moon Party » mensuelle qui n’est qu’une longue soirée orgiaque cannabique et alcoolisée, sous les étoiles et sur le sable, suivie là aussi par d’autres nuits tout autant malsaines.
Ces deux endroits sont situés dans le sud thaïlandais, dans cette région jouxtant la Malaisie et théâtre d’une lutte islamo-séparatiste depuis près de quarante ans. Les habitants sont majoritairement malais, musulmans et d’une culture encore et profondément traditionnelle.
Comment dès lors peuvent être perçues ces manifestations de touristes sans « tenues » - dans tous les sens du terme - ni re-tenues ? Heureusement, jusqu’à lors, les mouvements armés à l’œuvre dans ces cinq provinces ne se sont jamais attaqués aux touristes occidentaux, contrairement à ce qui a pu se passer ailleurs, comme à Bali en 2002 et en 2005.
Mais imaginons un instant que, voulant donner plus de résonance à leur lutte, ces mouvements islamo-séparatistes visent directement les touristes… Si les responsabilités premières seront bien sûr celles des terroristes, il n’en demeure pas moins que les touristes irrespectueux auront également quelques parts de responsabilités dans le drame qui pourrait les meurtrir.
La liberté implique la responsabilité et être touriste, en Thaïlande du sud comme ailleurs, c’est aussi être responsable de ses actes. Chaque homme est un héraut, chaque homme est un ambassadeur, malgré lui. Et nous ne pouvons ignorer qui nous sommes, ni échapper à ce que nous sommes, surtout loin de nos pénates...

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Un terroriste meurt, l’autre s’évade

Deux informations capitales liées au terrorisme en Indonésie : d’une part la mort du Docteur Azahari Bin Husin, d’autre part l’évasion d’Omar al-Farouq. Si la première est récente, l’autre est beaucoup plus ancienne bien qu’elle ait été portée non officiellement à la connaissance des autorités indonésiennes le 1er novembre 2005.
Alors que l’unité anti-terroriste de la Police nationale indonésienne était sur le point de l’arrêter, Azahari s’est suicidé par explosion, après avoir reçu trois balles dans la poitrine. Cela s’est passé le 9 novembre 2005 dans l’après-midi, dans la maison qui servait de refuge à Azahari, au n°7 villa Flamboyan, dans les environs de Batu, non loin de la ville de Malang (Java Est). Considéré comme un des deux responsables au plus haut niveau du mouvement terroriste Jemaah Islamiyah (avec Noor Din M. Top), Azahari est tenu pour responsable, entre autres faits, de l’attentat de Bali de 2002, de celui contre l’hôtel JW Mariott de Jakarta en 2003, de celui contre l’ambassade d’Australie en septembre 2004 ainsi que du dernier attentat de Bali, du 1er octobre dernier. Ingénieur malaisien, titulaire d’un doctorat de l’Université de Technologie de Johor (Malaisie), il est celui qui aurait rédigé le manuel de la Jemaah Islamiyah sur la fabrication de bombes ; Azahari, qui était affublé du surnom de « Demolition man », était un des deux hommes les plus recherché d’Indonésie avec Noor Din M. Top. La disparition d’Azahari est une excellente nouvelle pour les autorités indonésiennes, comme pour toutes les personnes en charge de la lutte contre le terrorisme d’ailleurs.
Omar al-Farouq, quant à lui, s’est évadé le 10 juillet 2005 de la prison dite de « haute sécurité » de Bagram (Afghanistan) en compagnie de trois autres prisonniers. Arrêté le 5 juin 2002 par une équipe des forces spéciales de l’armée de terre indonésienne (Kopassus), sous le commandement du Major Andika Perkasa (fils de l’ancien chef des services indonésiens, Hendropriyono), Al-Farouq était remis discrètement aux autorités américaines sans que la police nationale indonésienne (Polri) ne puisse l’interroger. Emprisonné en Afghanistan depuis, l’Indonésie n’a jamais eu l’autorisation américaine pour le questionner alors que ses aveux auraient pu servir « à charge » pour une condamnation lourde et définitive d’Abu Bakar Baashir. Citoyen irako/koweitien, Omar al-Farouq était néanmoins marié à une indonésienne, demeurant au Kampung Pasirjambu, dans le village de Cisalada, district de Cijeruk (Bogor ; Java Ouest). Al-Farouq est tenu responsable des explosions en nombre ayant eu pour cibles des églises indonésiennes en 2000, ainsi que d’une tentative d’attentat contre l’ancienne Présidente de l’Indonésie, Megawati Sukarnoputri. Les Etats-Unis accusent Al-Farouq d’être rien de moins qu’un des lieutenants de Ben Laden, tout en étant un des responsables de la Jemaah Islamiyah ; le fait est qu’Omar a été entraîné au camp de Khaldan (Afghanistan) en compagnie d’Abu Zubaidah. On retrouve sa trace, un peu plus tard au Sud des Philippines, où il tissa des liens avec le MILF (front de libération islamique Moro), tout en créant un réseau se propageant jusqu’en Indonésie. Peu avant son arrestation - établit cette fois en Indonésie - Al-Farouq dirigeait des escouades qui œuvraient de manière sanglante contre les chrétiens tant à Poso (Sulawezi) qu’à Amboine (Moluques).
Quelques questions peuvent se poser quant à cette évasion à partir d’une prison dite de « haute sécurité », entourée de plusieurs lignes de barbelés, et d’un terrain miné. Certains analystes, indonésiens notamment - dont l’ancien chef du BIN, Hendropriyono -, se demandent si Al-Farouq ne travaillerait pas en fait comme agent de la CIA, chargé d’infiltrer les réseaux islamistes d’Asie du Sud-Est, voire de les contrôler pour le compte des Etats-Unis. Les Taliban auraient apparemment participé à cette évasion car

Signature :
Paru dans TTU n°560 du 16 novembre 2005

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Indonésie : le retour des Etats-Unis

Comme l’a très bien exprimée Condoleezza Rice, le 18 janvier 2005, devant les membres de la commission des affaires étrangères du sénat des Etats-Unis, le Tsunami a été « une merveilleuse opportunité » pour les américains de montrer à la face du monde que leurs intentions étaient bonnes, motivées par le soucis de l’autre et une grande générosité ; cette démonstration aura servi, dit-elle, à prouver au monde musulman du monde entier que les Etats-Unis ne sont pas engagé dans une guerre contre l’Islam, mais plutôt « contre le terrorisme » (1). Ce que Rice n’a pas dit, c’est que cette « générosité » des Etats-Unis est aussi celle d’un retour durable et massif de Washington dans le sud-est asiatique, avec des bases militaires (aéro-terrestres et maritimes) ouvertes et une présence permanente de soldats de l’oncle Sam. Mais si cette politique s’engage aujourd’hui avec pour cible privilégiée l’Indonésie (2), les Etats-Unis ont déjà marqués des points avec le retour américain aux Philippines, sous couvert de lutte contre le terrorisme, ceci dès l’opération « Balikatan 2002 ». En 2002 également, le redémarrage des relations militaire-militaire avec l’Indonésie avait bien été tenté, mais un incident fâcheux sur le sol de Papouasie occidentale (Indonésie), avait fait échouer l’affaire ; deux instituteurs américains avaient été en effet tués par des tireurs inconnus au cours d’une embuscade, et l’armée indonésienne tenue pour responsable de cette négligence dans la sécurité des personnes.
Mais 2005 sera l’année d’un « haut réchauffement » dans les relations entre Washington et Jakarta. Plusieurs indices récents le prouvent, à commencer par la visite de Collin Powell dans les premiers jours de janvier dans l’archipel indonésien ; un séjour durant lequel, l’ancien secrétaire d’Etat avançait que Washington était prêt à reprendre la fourniture de pièces détachées pour les avions de transport militaire Hercules C-130 (3). Le 2 février 2005, les premières pièces détachées pour cinq C-130 étaient livrées.
Pour bien saisir la nouveauté de la situation, il faut savoir que depuis 1999, suite aux conséquences de l’affaire du Timor Oriental, la vente de tout matériels militaires ou afférents était interdit par Washington ; cette limitation intervenait après déjà une forte restriction dans la coopération militaire entre les Etats-Unis et l’Indonésie en 1991 (4), suite à l’amendement au Congrès américain proposé par le sénateur démocrate (du Vermont) Patrick Leahy. Autant dire que ces dernières années, aucun matériel issu des usines du complexe militaro-industriels américain n’a pu être exporté vers Jakarta, et aucun officiers supérieurs ou subalternes indonésiens n’a pu se rendre dans les centre de formation de Fort Bragg ou d’ailleurs, et n’a donc pu pratiquer et se familiariser avec la technique comme avec la structure des forces armées américaines (5) ; de même, le programme IMET (International Military Education and Training Program) était-il, lui aussi, interrompu.
Autre élément participant à la certitude de la reprise effective et massive de la coopération militaire entre les deux pays, la publication en mars d’un rapport américain (6) préconisant entre autres choses, la reprise du programme IMET, l’accroissement de la coopération en matière de contre-terrorisme, « la participation américaine au renforcement de l’armée indonésienne (TNI) plutôt que de continuer à l’affaiblir par une politique d’isolation », en fait la fin de l’amendement Leahy. Ce rapport de 58 pages a été sponsorisé par la USINDO (United State-Indonesia Society), fondation dont les membres américains sont tant d’anciens haut fonctionnaires du Département d’Etat, que des personnes issus des conseils d’administration de sociétés comme Freeport McMoran, Exxon-Mobil, Boeing, Bank of America, ChevronTexaco Corporation, Conoco Inc., Edison Mission Energy, Unocal Corporation et
Signature :
Texte paru dans la Lettre Sentinel de février 2005

Notes :
(1) Mais a-t-on idée d’une guerre menée contre un mode opératoire ? C’est un peu comme si Churchill, en 1940, avait lancé une guerre contre la « blitzkrieg » et non contre l’Allemagne hitlérienne…
(2) le pays du monde comptant le plus grand nombre de musulmans (plus de 85% des 240 millions d’habitants).
(3) l’armée de l’air indonésienne (TNI-AU) en possède 24, mais seuls six sont en état de voler à cause justement des restrictions américaines.
(4) Des manifestants timorais anti-Jakarta avaient été tués par l’armée indonésienne à Dili, au Timor Oriental.
(5) Comme ce fut le cas sous le règne de Suharto.
(6) Intitulé « Améliorer la sécurité des relations américano-indonésiennes : une occasion à ne pas manquer »
(7) webmemo #639 du 12 janvier 2005.
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Entretien avec Mohammad Nur Juli Responsable-négociateur du GAM (Mouvement pour un Aceh Libre), directeur de l'International Forum for Aceh

Quels sont les buts de l’International Forum for Aceh dont vous êtes le Directeur ?
Ces buts sont simples : l’établissement de la justice et le respect des Droits de l’Homme à Aceh.

Auprès de quels pays, de quelles organisations (politiques, humanitaires) trouvez-vous les meilleurs soutiens ?
Nous avons de nombreux contacts avec diverses organisations internationales et nous nous tournons plutôt vers les ONG que vers les organisations proprement politiques. Concrètement, nous avons des contacts réguliers avec TAPOL (GB), Human Right Watch/Asian Division (USA), Amnesty International, Terre des Hommes (Allemagne), IHR Network (USA), Asian Forum for Development and Human Rights, Center for Global Peace (USA) et l’International Institute for Dialogues (Philippines).

Que pensez-vous des réunions avec le Gouvernement indonésien à Genève sur la question achenaise ?
Le 2 février 2002, il y a eu une réunion entre les représentants de Jakarta et ceux du GAM (Gerakan Aceh Merdeka, le Mouvement pour un Aceh Libre) au Centre Henri Dunant de Genève ; l’International Wisemen Group en était le coordinateur. Plusieurs hautes personnalités internationales y ont participé également, comme le Général Zini, Lancer (ancien Ministre Yougoslave), Lord Eric Avebury (House of Lord), Surin Pitsuwan Ministre des Affaires Etrangères Thaïlandais, représentant Kofi Annan. Il est en est résulté quatre points d’accord :
- la mise en place du statut de « Territoire Spécial d’Aceh Darrusalam » est le point d’entrée pour des négociations ultérieures.
- La reconnaissance du souhait des achénais à se gouverner eux-mêmes dans la paix.
- Pour 2002 : fin des violences et élections d’un gouvernement par des voies démocratiques.
- Pour 2003-2004 : vérification des trois points précédents, et en Mai 2004, tenue d’élections générales démocratiques et équitables pour décider de l’avenir d’Aceh.
Une rencontre devait se tenir 30 à 45 jours après la réunion du 2 février 2002, mais elle n’a pas eu lieu. Jakarta tenant à une rencontre entre le GAM et les autorités indonésiennes mais sans participants extérieurs.
Je rappellerai qu’après le retour des négociateurs achénais à Banda Aceh, cinq d’entre eux ont été retenus par la TNI et ont vu leurs passeports confisqués ; ces personnes ont été relâchées après tortures. Tout ceci alors qu’il y avait eu des accords à Genève sur la non-arrestation et la protection des participants négociateurs du GAM, et ce durant et après les négociations.

En quoi la poursuite dans cette voie négociée et la possibilité d’un compromis politique n’est-elle pas la bonne ?
On ne peut pas établir de négociations sans la fin des violences.

Depuis le 1er janvier 2001, il y a eu la mise en place d’un statut spécial de la Province d’Aceh. Y trouvez-vous des éléments satisfaisants et pourquoi ?
Ce « nouveau statut » a été pensé et revu par Jakarta de façon unilatérale ; il ne correspond en rien aux aspirations des achénais. Par ailleurs ce statut d’autonomie en question n’est pas définitif ; il est soumis à l’approbation de Jakarta. Alors, je pose la question : quelle est la valeur d’une autonomie qui peut être à tout moment remise en question ? De toute manière, ce que souhaite les achénais ce n’est pas une « autonomie » mais l’indépendance. De toute manière, nous ne croyons plus Jakarta et ses promesses depuis longtemps.

Comment se situe IFA par rapport au mouvement indépendantiste GAM ?
L’IFA reconnaît le combat mené par le GAM et l’AGAM ; c’est un fait que l’affrontement avec les forces indonésiennes conduit à des rapprochements entre le GAM et nous. Le but n’est cependant pas univoque en faveur de l’indépendance. Les deux côtés (TNI et AGAM) doivent respecter les Droits de l’Homme ; c’est notre combat au sein de l’IFA.

Pensez-vous que l’idée d’une intervention de l’ONU, avec mise en place d’une force d’interposition, serait

Signature :
Propos recueillis par Philippe Raggi, à Paris, le 21 Mars 2002.

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Quelques racines intellectuelles de l’islamisme radical

Quelques racines intellectuelles de l’islamisme radical
Dans l’univers islamique, il existe une galaxie islamiste ; à l’intérieur de celle-ci, gravite des planètes qui ne suivent pas la même écliptique. C’est peut-être en prenant cette métaphore que l’on peut entrer dans l’intelligence du phénomène islamiste.
Le premier des problèmes dans cette entreprise, c’est que souvent plusieurs termes sont utilisés pour désigner plus ou moins la même chose ; des termes d’autant plus différents qu’ils seront le fait de chercheurs occidentaux ou non, islamologues ou non, arabisants ou non, anglophones, francophones, etc. Et nous lisons et entendons partout ces mots, dans toutes les langues : islamistes, islamistes « modérés » et islamistes radicaux, militants islamistes, terroristes islamistes, salafistes, wahhabites, Frères Musulmans, jihadistes, salafistes-jihadistes, kharijites, musulmans réformistes, fondamentalistes, traditionnels, intégristes, etc. bref, chacun des rédacteurs allant de sa terminologie non seulement pour essayer de se faire comprendre - effort louable - mais aussi, souvent, pour créer « sa » différence, il faut l’avouer.
D’un autre côté, pour essayer de décrypter la galaxie islamiste, on peut aussi tenter de déterminer les pôles d’attraction et les satellites ; à partir de là, il est possible de reconstituer le mouvement de la dite galaxie (1) dans son l’ensemble et donc mieux l’intelliger.
Lorsqu’un mouvement islamiste radical commet un acte terroriste, il tente souvent, sinon toujours, de l’inscrire dans une eschatologie particulière, de justifier en fait son acte meurtrier - a priori ou a posteriori - tant en interne au mouvement, qu’à destination des non-initiés, ou encore à l’adresse de ceux-là même qui sont visés. Cela se fera au moment de prêches, dans des manuels destinés aux nouveaux arrivants, dans des communiqués aux médias, enfin dans des édits religieux (fatawa).
Ces actes de communications auront donc différentes fonctions : il s’agira soit de se faire connaître, soit de convertir, soit de renforcer l’ardeur du convaincu, ou enfin de semer la terreur et le doute dans l’esprit de celui qui est désigné comme « ennemi ».
Pour dépasser l’autojustification, et par delà les motifs politiques plus immédiats, ces différents mouvements font appel dans leur raisonnement et leurs argumentaires, à des théologiens, des penseurs, des exégètes, en un mot à des intellectuels islamiques. Plusieurs noms reviennent souvent, et nous pouvons par ce biais reconstituer un écheveau, celui de la galaxie islamiste dont nous parlions plus haut. Ceci permet non seulement de catégoriser les mouvements en question, d’en déduire les filiations, de voir ce qui les fédère par delà les divergences politiques contingentes, en fin de compte de mieux les appréhender, de mieux les connaître.
Les noms brossés ici sont limités à certains intellectuels référents afin de ne pas se perdre dans la nuée de ceux qui ont laissé des traces dans les mentalités et dans la religion pratiquée par les islamistes radicaux, car le nombre de ces personnalités auxquels ils se réfèrent est très important. Nous présentons donc les noms les plus souvent cités, les personnes vraiment signifiantes, aux racines intellectuelles les plus vives.
Les mouvements islamistes radicaux sont de tous les pays, depuis le Maroc jusqu’aux confins de l’Indonésie, en passant par le Proche-Orient et l’Asie Centrale. Ce qui va réellement fédérer ces mouvements ne sera pas en fait l’Islam en tant que tel, mais une interprétation singulière de cette religion, mutée en une idéologie de combat, à l’instar du communisme international des années vingt et trente du XXème siècle.
Jules Monnerot a dit, dans sa « Sociologie de la révolution », que l’Islam serait le Communisme du XXIème siècle ; en cela il n’avait pas tort, pour autant en fait que l’on entende « islamisme » quand il dit Islam. A titre de comparaison, les socialistes d’aujourd’hui chantent, tout comme les communistes

Signature :
Philippe Raggi - Décembre 2004

Notes :
1) en tout cas une partie de celui-ci
2) Il faut souligner le nombre incalculable de courants et tendances de toutes sortes existant au sein de « la mouvance islamiste »; la plupart de ces groupes s’excluent les uns les autres, même si, bien sûr, ils savent s’allier pour telle ou telle circonstance (ils savent pratiquer l’« alliance objective » pour reprendre une terminologie marxiste ; une terminologie d’ailleurs que ces mouvements reprennent souvent à leur compte pour mobiliser les populations déshéritées). La plupart du temps donc ces mouvements sont loin d’être d’emblée solidaires.
3) Comme le disent les britanniques « The past is a foreign country, they do things differently there ».
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L'Utopie américaine dans toute sa splendeur Sortie du film "Madagascar" (le 22 juin)

Petit pamphlet

Le dernier film d'animation des studios Dreamworks peut-être regardé comme l'utopie américaine portée à l'écran. De quoi s'agit-il ? Un zèbre ayant des envies d'ailleurs, s'évade du zoo de New York, en compagnie d'un lion, d'un hippopotame et d'une girafe ; ils se retrouvent accidentellement à Madagascar et découvrent avec étonnement la vie sauvage avec bien des péripéties.
Un des réalisateurs, Tom McGrath, déclarait lors d'une conférence de presse à Paris : "Nous avons regardé à l'autre bout du monde. Pour des Américains, on ne peut pas aller plus loin que Madagascar. Et il y a là-bas des animaux qui n'existent nulle part ailleurs". Mais où est donc le problème, me direz-vous ? Le problème c'est qu'il n'y a ni lions, ni zèbres, ni girafes ni hippopotames sur l'île de Madagascar.
Certes, "c'est une fable, ce n'est pas une histoire réaliste, ça parle d'un lion dont le meilleur ami est un zèbre", soulignait le producteur Jerry Katzenberg. Nous sommes donc bien dans l'utopie. Et le cocktail représente parfaitement le rêve américain hors des frontières américaines : faire cohabiter des individus irréconciliables, dans un environnement où ils ne sont pas les bienvenus, et où ils n'ont pas leur place, dans le seul désir de remodeler certaines portions de la planète (selon l'expression américaine bien connue "reshape the world"), à partir d'une conception du monde irréaliste.
Dans le film, Marty, le zèbre, serait un peu celui qui met en œuvre la feuille de route ("road map") et l'île de Madagascar peut-être vue comme un Proche-Orient, pour utiliser une terminologie française (les américains nomment cette partie du monde "moyen orient", middle east). Circonstance atténuante pour le zèbre, il débarque sur l'île, lui, par hasard ; ce qui n'est pas le cas des politiciens américains quand ils se rendent en Irak ou en Israël, quand ils établissent, avec le succès que l'on sait, la démocratie en Afghanistan ou ailleurs.
Si l'utopie américaine se réalisait uniquement au cinéma, cela ne causerait pas vraiment de soucis majeurs pour les habitants de la planète ; mais tel n'est pas le cas lorsque l'implacable stratégie américaine (avançant sur trois axes simultanément : diplomatique, culturel et militaire) se met en oeuvre.

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Le conflit des Moluques (Indonésie) Texte arrêté au 6 février 2002

Après un long temps de tumulte, le calme semble aujourd’hui revenu aux Moluques. En effet, après trois ans d’affrontements meurtriers, les accords de Malino (1) entamé le 12 janvier 2002, et sous les auspices du Gouvernement de Jakarta (2), vont sans doute enfin mettre un terme à un massacre qui a fait entre six et douze mille victimes, un demi million de personnes déplacées, quinze mille maisons et commerces détruits, plus d’une cinquantaine d’églises, autant de mosquées, un centre hospitalier et des dizaines d'écoles. Ce conflit a vu émerger dans le temps deux camps belligérants : d’une part des musulmans (dénommés les « blancs », en référence à la pureté de l’Islam - santri) et d’autre part des chrétiens (appelés « les rouges » par opposition - abang) ; il serait cependant abusif de faire de ces affrontements un des lieux de rencontre et de choc civilisationnels comme le prétendrait un Huntington. Les motifs, quand bien même ils se sont cristallisés sur le fait religieux, n’ont pas été au bout du compte les seuls à entrer en jeu.

C'est le 19 janvier 1999 que le conflit commença, dans la capitale des Moluques, Amboine, par une altercation entre un chauffeur de bus local et un passager, l'un chrétien et l'autre musulman ; mais ce qu’il faut également souligner c’est que l'un était originaire de l'île d'Ambon et l'autre de Célèbes (Sulawesi). Ce conflit, peu médiatisé et qui n’a pas semblé susciter le moindre intérêt de la part des instances internationales ou encore des "grandes consciences morales", est devenu presque deux à trois fois plus meurtrier que ceux du Kosovo et du Timor Oriental réunis. Une "affaire intérieure" qui n’a pas nécessité la mise en oeuvre d'un quelconque "droit d'ingérence humanitaire" ou autre, alors que cela se met en place facilement pour certains pays quand ces derniers s'inscrivent dans la logique du nouvel ordre mondial et qu'au bout du compte, les retombées financières et géopolitiques sont assurées. Il semble désormais possible d’aborder ce conflit et d’y voir plus clair, de ne pas tomber dans le piège des idéologies proposant une lecture manichéenne de l’événement.

Situées à l’Est de Java, l’archipel des Moluques se situe entre Célèbes et la partie occidentale de la Papouasie. Peuplé de près de deux millions cinq cent mille habitants, cette partie de l’Indonésie compte un grand nombre de chrétiens (essentiellement Protestants) comparativement aux autres provinces indonésiennes ; dans l'ensemble de l’archipel des Moluques on compte 36,9 % de protestants et 5,8% de catholiques contre 56,8% de musulmans. Cependant, au Nord de cet archipel, les taux sont différents (71,4% de musulmans, 27,2% de protestants et 1,3% de catholiques) (3). Pour autant il serait plus qu’abusif de réduire le conflit des Moluques à un affrontement où l’élément religieux tiendrait la première place.

Ce conflit est une des composantes des forces centrifuges secouant l’archipel indonésien (Acheh et Riau sur Sumatra, Papouasie indonésienne, Timor oriental, Kalimantan et Célèbes), et il se situe dans une dialectique centre-périphérie quasi archétypique. Dans les rapports entre les Moluques et Java, nous trouverons effectivement un des éléments de ce conflit. Comme les autres îles d’Indonésie, les Moluques recèlent un grand nombre de richesses (ressources minières, agricoles, etc.) lesquelles ne sont pas redistribuées équitablement entre les provinces et l’Etat ; jusqu’à la mise en place au premier janvier 2001 de la loi sur l’autonomie régionale, Jakarta reprenait la quasi totalité de ces richesses, favorisant l’émergence d’un réel sentiment d’injustice chez les habitants de la périphérie.

Un des facteurs belligènes qui est aussi à prendre en compte, est la politique de transmigration engagée par Jakarta depuis des dizaines d’années. Avec cette transmigrasi, l’archipel aux épices a vu s’inverser le taux de chrétiens par rapport aux musulmans, et celui des « moluquois de souche » par rapport aux « transmigrants ».

Quelques orientations bibliographiques :
Indonesia : overcoming murder and chaos in Maluku. International Crisis Group ; Asia report n°10. 19 december 2000
Indonesia’s crisis : chronic but not acute. International Crisis Group ; Asia report n°2. 31 may 2000
Guns, Pamphlets and Handis-Talkies : How the military exploited local ethno-religious tensions in Maluku to preserve their political and economic privileges. Georges Junus Aditjondro, Dpt. of Sociology and Anthropology, University of Newcastle, Australia. In http://www.go.to/ambon
The Tragedy of Maluku. Georges Junus Aditjondro, Dpt.. of Sociology and Anthropology, University of Newcastle, Australia. In http://www.geocities.com/baguala67/
Notes on the Jihad Forces in Maluku. Georges Junus Aditjondro, Dpt.. of Sociology and Anthopology, University of Newcastle, Australia. In http://www.geocities.com/baguala67/
Your God is no longer mine : Moslem-Christian Fratricide in the Central Moluccas after a Half-Millennium of Tolerant Co-Existence and Ethnic Unity. Dr. Dieter Bartels. In
http://www.geocities.com/ambon67
Analysis of the sectarian conflict in Maluku, and it’s role in the Islamisation of Indonesia. A report by Jubilee Campaign UK, december 1999, in
http://www.jubileecampaign.demon.co.uk/church/ind5.htm
Indonésie, Christianisme et islam ; l’histoire de rapports parfois conflictuels et toujours complexes. Andrée Feillard. Dossier et documents n°8/99, supplément EDA 295, Octobre 1999.
Indonésie, l’Islam indonésien et la vague islamiste. Andrée Feillard. Dossier et documents n°8/96, supplément EDA 229, Octobre 1996.
I’m a fundamentalist. An Ideological Reflexion on the Challenges Facing the Muslims of Indonesia. H. Ahmad Sumargono. KISDI. Translator and editor : Jafar Kareem. June 2000.
The Maluku crisis. Rapport de mission de l’ONU effectuée conjointement avec le gouvernement indonésien et des organisations humanitaires, entre le 22 et le 27 janvier 2000.
The Myth of global ethnic conflict. John R. Bowen, Journal of Democracy 7.4 (1996) 3-14
The Church and Human Right in Indonesia. Dr. Med. Paul Tahalele, M.D. INDONESIA; Christian Communication FORUM (ICCF). 30 novembre 1998.

Notes :
(1) Ville de Célèbes où s’est effectué entre les belligérants le 20 décembre 2001, la signature de la « Déclaration de Malino »
mettant fin au conflit de cet archipel situé entre Kalimantan et les Moluques.
(2) avec la participation active du Ministre des affaires sociales Yusuf Kalla.
(3) Sources BPS (Bureau des Statistiques Indonésiens), mars 2000.
(4) entendue dans ce cas précis comme guerre sainte contre les "infidèles", et non comme lutte intérieure contre les démons.
(5) le MPR, l'assemblée consultative du peuple; la haute assemblée d’Indonésie.
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Tsunami : indécence médiatique janvier 2004

Alors que l'Asie est touchée très durement par les suites du raz de marée consécutif au tremblement de terre, les commentaires médiatiques frisent parfois le scandale.

Trois jours après la catastrophe, le bilan en pertes humaines augmente d'heure en heure, l'Indonésie étant le pays le plus touché avec le Sri Lanka, et l'Inde. Des chiffres de 68 000 morts sont déjà annoncés, mais nos médias français se contentent de parler de la Thaïlande et des malheurs d'un groupe hôtelier(1) avec ses établissements touchés. Mais où sommes nous ?
Voilà plusieurs dizaines de milliers de personnes décédées, disparues, blessées, les survivants ayant perdu tous leurs biens dans la catastrophe, et c'est le groupe susnommé qui récolte des temps d'antenne (radio et télévision) pour conter ses malheurs ! Mais c'est proprement scandaleux ! Ignoble ! Faire de la publicité à un groupe hôtelier dans les journaux alors que l'on ne parle que très peu de l'Indonésie et ses 40 000 morts (au moins) de la province d'Aceh, au nord de Sumatra.
Pourtant, dès les premières heures du drame, il était certain que cette région serait la plus durement touchée car la plus proche du tremblement de terre sous-marin (150 Km). Mais non, les caméras étaient en Thaïlande, soit au mieux, au Sri Lanka. Aller en Thaïlande, c'est plus intéressant pour nos journalistes, pour sûr ! Ces derniers pourraient au moins faire leur travail et se rendre dans la province de Nanggroe Aceh Darusalam(2).
Comment peut-on tolérer que nos médias français ne parlent que des dizaines de français et d'occidentaux décédés dans la région de Phuket, Krabi et de Phang Nga(3), ainsi que dudit groupe hôtelier alors qu'ailleurs, ce sont des dizaines de milliers de personnes qui sont mortes ? Certes, il est normal que l'on signale le fait que certains de nos compatriotes comptent au nombre des victimes mais cela doit laisser place tout de même au drame des autres populations, plus qu'éprouvées, d'Indonésie, du Sri Lanka et d'Inde essentiellement.

Notes :
1 Accor, pour ne pas le nommer.
2 Les étrangers y sont désormais autorisés depuis les déclarations du vice-Président Ysuf Kalla. Jusqu'à la catastrophe, la zone étant sous état d'urgence civile, conséquence de l'instabilité persistante due aux menées séparatistes du mouvement achénais GAM, il y avait restrictions dans les déplacements.
3 Cet endroit est connu des routards du monde occidental ; il est le lieu où se déroule chaque mois la "full moon party", bacchanale géante sur fond de musique transe ou techno, arrosée d'alcool, coiffée de fumée cannabique ou davantage. Voilà le tableau de nos "ambassadeurs" en pays asiatique. Belle image pour les populations locales.
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Interview with Lieutenant-General Kiki Syahnakri Former Wakasad (TNI-AD Deputy Chief of Staff) Made on August 2002

1. The TNI will soon have a new head, what do you think of it, in particular regarding to the discussions on the fact that the future Panglima should be from AD or from AU ?

For me, whether the next TNI chief is from the Army is not an issue. The most important things is that he meets the criteria.

First on the list is that he must be capable and has access necessary to face current challenges, namely:

- The solution to the problems in Aceh, Irian and Maluku.
- Continue with the reform process.
- Maintain solidarity within the TNI.

2. You will reach soon the retirement limit, how do you consider your future? Will you remain in the Army if we proposed to you to extend your active command ? and why ?

I have a farm land in West Java (he had his first harvest of strawberry early this month!)

An extension of my service will not be a problem. As a soldier I must be ready to take up any task entrusted on me as long as it is in the interest of the nation and state.

3. If you must leave TNI, do you think like many Generals (Ret.) entering in politics ?

I'm not interested.

4. When you see few Generals put in examination concerning the Timor case, and the request of several NGO demanding the accusation on top military commanders, from which distance in this point are we from Justice and from Politics ?

I personally want a judicial approach, not a political approach. But the issue is highly politicized. Take for example the U.S. insistence that certain generals be implicated in the trial of those accused of human rights abuses in East Timor. If the law finds them not guilty, how can we conviction them? This (American pressure) for Indonesia to punish the generals is a political maneuver. It is a U.S. target (aim) to have certain generals convicted in the East Timor trial. It is not fair especially if the law does not find them guilty. It's an American ambivalence. On the one hand they want to help TNI, the police, by providing equipment, but dictates that the aid be used to hunt for terrorist of their choice. We cannot use the aid for things other than that. The U.S. argues that it is concerned about the possible human rights violations by the TNI and police if their aid is used for purposes other than the war on terrorists. But in 1998, for example, it asked TNI and police to help protect its citizens; there was no question about TNI or police committing human rights violation in doing so as long as its citizens were safe.

5. To who soldier has to obey initially ? To his direct seniors officers ? To the higher heads of the TNI ? To the directives of the Government? The question could arise in some remote provinces of your country.

Chain of command is a universal issue. There is hierarchy, for example, a platoon must follow the order of its platoon commander, a company must obey its company commander and so on up to the central government. An abuse of the chain of command could be fatal. Take for example the 1965 Sept. 30 communist coup (involving the military). It's true that in reality, sometimes you cannot strictly follow the chain of command. For example, a platoon of A Company in an area of operation happens to be closer to a battalion commander than to his company commander. The platoon commander then reports to the battalion commander and follows his order, assuming that the battalion commander knows the area better than the company commander. On the other hand, the battalion commander must inform the company commander of the situation. Abusing the chain of command by taking direct order from those other than your immediate superior could prove fatal, as had happened in 1965.

Abuse of the chain of command is usually political and happened when TNI was heavily involved in politics. As a consequence, politics placed a close grip on TNI. There is still some politicking within TNI but only at a very small level.

6. How should be work the articulat

Signature :
Philippe Raggi, Académie Internationale de Géopolitique

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Etats-Unis et Indonésie : des relations suivies 28 octobre 2002 Article paru dans la Revue Française de Géopolitique n°1

1945-1949 : hésitations puis engagement américain.

La République d’Indonésie voit le jour peu de temps après les bombardements américains d’Hiroshima et de Nagasaki, le 17 août 1945. Néanmoins, il ne s’agit, à cette date, que de la déclaration d’indépendance unilatérale (Proklamasi) par Sukarno vis à vis de la puissance coloniale : les Pays-Bas. Ce mouvement d’indépendance a été exalté par le Japon qui a défait les hollandais le 28 mars 1942 et qui a été jusqu’à garantir aux indonésiens, début août 1945, une indépendance au 24 du même mois. Après les bombardements atomiques américains, les japonais se rendent le 15 août aux alliés mais l’armée et la marine du Soleil Levant conservent le contrôle sur l’archipel ; le Japon acceptant de restituer l’Indonésie aux hollandais de manière graduelle.

Entre la date de la Proklamasi et le transfert officiel de souveraineté à la République d’Indonésie par les Pays-Bas (1), suivront trois années de luttes violentes tant interne à l’Indonésie (factions rivales, musulmans radicaux, communistes, séparatistes), que contre les hollandais (2), les australiens (3) et les britanniques (4). Dans ces toutes premières années de lutte pour l’indépendance, les Etats-Unis soutiennent les Pays-Bas. Il s’agit de ré-instaurer une souveraineté solide, quelle qu’elle soit, dans l’archipel.

Au même moment, dans la région, les Philippines, seule colonie américaine outre-mer, accèdent à l’indépendance le 4 juillet 1946. Les britanniques, quant à eux, quittent définitivement l’Indonésie le 29 novembre 1946 et, avec les Etats-Unis, l’Australie et l’Union Soviétique, ils soutiennent la cause de la République Indonésienne devant les Nations Unies. Ainsi, le 1er août 1947, le Conseil de Sécurité des Nations Unies appelle-t-il à un cessez-le-feu; trois jours plus tard, un accord entre Sukarno et les hollandais est ratifié mais, sur le terrain, il n’est pas respecté. Le Gouverneur Van Mook, tentent une dernière carte : l’établissement de plusieurs Etats dans l’archipel, dans l’espoir de créer une Indonésie Fédérale plus ou moins indépendante mais encore liée à la couronne néerlandaise.

Les Etats-Unis ne se désintéressent pas du sort de l'Indonésie. Ainsi, le 17 janvier 1948, c’est sur l’USS Renville (5) que les hollandais signent, sous les auspices des NU, un cessez-le-feu qui leur est plutôt favorable. Les Etats-Unis feront néanmoins pression sur les hollandais pour que soit inclus la mention « République d’Indonésie », condition préalable exigée par les indonésiens. Ce n’est toutefois pas l’indépendance.

Par la suite, plusieurs éléments vont modifier l’attitude, jusqu’à lors modérée, des USA vis à vis des hollandais. Puissance anti-coloniale par nature, les Etats-Unis constatent que la Hollande n'est même pas en mesure d'instaurer une paix durable et rapide dans l'archipel. En effet, en mai 1948, Kartosuwirjo se proclame Imam de l’Etat Islamique d’Indonésie (Darul islam) ; c’est le début d’une rébellion sanglante contre à la fois les hollandais et la jeune République indonésienne. Mais ce sont surtout les événements de Madiun (Java Centre) avec la tentative de coup d’Etat communiste du 18 septembre 1948 (6) qui fait se tourner les américains résolument aux côtés des indonésiens. La répression fait apparaître les républicains indonésiens comme franchement anticommunistes et, dès lors, les Etats-Unis exercent une pression très forte sur les Pays-Bas pour qu’ils accèdent pleinement à la demande d’indépendance de l’Indonésie. Le 11 octobre, Van Mook démissionne de son poste de « Lieutenant-Gouverneur des Indes néerlandaises », et la Hollande crée moins d’un mois plus tard un poste de « Haut représentant de la Couronne ». La puissance coloniale fait fi des pressions américaines et des Nations Unies (7), et poursuit sa politique propre vis à vis de l’archipel. En décembre 1948, à l’exception d’Aceh et de quelques endroits de Sumatra, toute l’Indonésie est sous contrôle hollandais. Excédés, l

Notes :
1 - le 27 décembre 1949.
2 - La puissance coloniale encore souveraine. Début 1946, les forces néerlandaises (la KNIL) comptent environ 20 000 soldats en Indonésie ; des effectifs qui monteront jusqu’à 92 000.
3 - Lord Mountbatten, le Commandant Suprême des Forces Alliées en Asie du Sud-Est, assigne aux australiens la responsabilité de Bornéo (Kalimantan) et de l’Est de l’Indonésie (Célèbes, Moluques, Papouasie, petites îles de la Sonde). A compter du 15 décembre 1945, les forces hollandaises commencent à remplacer, comme puissance occupante dans la partie orientale de l’archipel, les troupes britanniques.
4 - Le Général Mallaby arrive le 25 octobre 1945 avec le 49ème Régiment d’Infanterie Indienne. Les britanniques prennent en charge Sumatra et Java. Le Major Général Hawthorn remplace Mallaby le 30 octobre 1945, après l’assassinat de ce dernier quelques heures après la signature d’un cessez-le-feu avec Sukarno et Hatta, les deux leaders indonésiens. La plupart des forces britanniques présentes en Indonésie viennent des Indes ; Nehru protesta vivement contre l’utilisation de troupes indiennes à l’encontre des indonésiens. Ce fut une des raisons majeures du retrait britannique.
5 - Bâtiment de transport américain basé aux Philippines mais qui a mouillé, pour les négociations, au port de Jakarta.
6 - Le « coup de Madiun » fut la seconde tentative de révolte – infructueuse - du PKI, le parti communiste indonésien ; la première ayant eu lieu en juillet 1926.
7 - Humiliation par les hollandais des forces des NU à Kaliurang.
8 - Non sans que les Etats-Unis y soient étrangers.
9 - 24 décembre 1948.
10 - 28 janvier 1949
11 - Début 1950, ce n’est pas moins de 300 000 citoyens hollandais qui quittent l’Indonésie, et le 26 juillet 1950, l’armée royale des indes hollandaises (KNIL) est officiellement dissoute. La Papouasie occidentale reste toujours aux mains des hollandais.
12 - Aux Moluques avec la République des Moluques du Sud (RMS) et son chef Sumokil.
13 - Toujours le Darul Islam de Kartosuwirjo.
14 - Le PKI avec Aidit, son chef, de 1951 à 1965.
15 - Le 21 février 1957.
16 - Le 1er décembre 1957, Sukarno annonce la nationalisation de 246 sociétés hollandaises.
17 - Le 5 décembre 1957.
18 - Communistes et socialistes.
19 - Pemerintah Revolusioner Republik Indonesia.
20 - le 17 août.
21 - Le 15 août 1962.
22 - Sabah et Sarawak.
23 - Commandement des Réserves Stratégiques.
24 - « Surat Perintah Sebelas Maret ».
25 - le nationalisme (Kebangsaan), l'humanisme (Kemanusiaan), un gouvernement représentatif (Kerakyatan), la justice sociale (Keadilan Social), le monothéisme (Ketuhanan).
26 - La plus grande mine d'or et de cuivre du monde.
27 - Noam Chomsky, in "L'Indonésie, atout maître du jeu américain", Le Monde Diplomatique, juin 1998.
28 - programmes d’enseignement et d’entraînement militaires internationaux
29 - En mars, avril et surtout mai 1998.
30 - Le 21 mai 1998.
31 - Le 5 mai 1999, les portugais et les indonésiens signent un accord à New York sur un vote d'autodétermination de l'île.
32 - 78% en faveur de la séparation d’avec l’Indonésie.
33 - filiale indonésienne de Freeport-McRohan.
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Interview du Lieutenant Général (ER) Kiki Syahnakri Réalisé début Août 2002

Le Major-Général Kiki Syahnakri a été nommé Adjoint au Chef d'Etat Major de l'Armée de Terre Indonésienne (WAKASAD) le 6 Novembre 2000, et il vient de faire valoir ses droits à la retraite en Mai 2002. Agé de 55 ans, il fut diplômé de l'Académie Militaire (AKABRI) en 1971.
Entre 1994 et 1995, durant huit mois, il fut Commandant Militaire de Dili, l'actuelle capitale du Timor indépendant. Par la suite il devint "assistant opération" auprès du Chef d'Etat-Major de l'Armée de Terre, où il fut l'artisan d'une réforme de l'entraînement des soldats, afin d'améliorer leur professionnalisme. Plus tard, ce même programme d'entraînement a été appliqué à l'échelon Bataillon et des Commandements de Brigade.
A partir de Septembre 1999, Kiki Syahnakri devint Chef du Commandement Militaire d'Udayana (coiffant les petites îles de la Sonde, et donc le Timor). C'est le Général Wiranto, en ce temps chef des armées indonésiennes, qui le nomma Chef du Commandement Militaire d'Udayana, avec pour dure mission de "restaurer la sécurité et l'ordre au Timor" en deux semaines (!). Une mission quasi-impossible, laissait-il entendre, au moment de sa prise de commandement; le Major-Général ajoutait que même le Général Schwartzkopf n'aurait pu accomplir une telle mission.
Au cours de son Commandement, il réussit malgré les pires difficultés à infléchir la courbe des actes de violence et de destruction dans l'île de Timor. Cette île, livrée à l'anarchie, était la proie des "milices" pro-intégration et pro-indépendance depuis les résultats du vote du 30 Août 1999.
Quand le 27 Septembre 1999, les forces de l'INTERFET prirent le relais des forces indonésiennes, un semblant d'ordre était rétabli dans les deux côtés de l'île. En effet, le Général Syahnakri avait entrepris de désarmer les "milices" anti-indépendance qu'il préfère appeler "combattants pro-intégration". Ce fut un travail de longue haleine, et non encore totalement achevé; les multiples difficultés logistiques et le manque patent d'effectif étant les principaux obstacles.
Syahnakri ne fut pas un "étranger" au Timor; il parle couramment le Tetun (dialecte local), et il a des amis dans les deux camps, tant parmi les pro-intégrationnistes que parmi les indépendantistes.
Il fut de ceux qui respectèrent la décision prise par les Timorais de l'Est au cours du vote du 30 Août 1999; "même s'ils furent mes anciens ennemis, ils sont à présent un peuple libre qui nous est voisin; et il n'y a aucune autre alternative que de maintenir de bonnes relations avec eux, et je pense qu'ils ne défendraient pas leurs intérêts s'ils ne maintenaient de bonnes relations avec l'Indonésie", souligne Syahnakri qui connaît très bien les chefs indépendantistes tels Ramos Horta, Leandro Isac et Taur Matan Ruak.

Mon Général, la TNI va bientôt avoir un nouveau chef, qu'en pensez-vous, notamment eu égard aux discussions sur le fait que le futur Panglima [Chef d'Etat Major des Armées] devrait être de l'Armée de Terre ou de l'Armée de l'Air ?

En ce qui me concerne, que le prochain chef des armées soit de l'armée de Terre ou non n'est pas un sujet en soi. Le plus important est qu'il corresponde aux critères requis. Le premier sur la liste de ces critères est qu'il soit capable, doué, et qu'il ait la capacité indispensable pour faire face aux défis actuels, c'est à dire : la solution aux problèmes d'Aceh, d'Irian [la partie occidentale de la Papouasie
Nouvelle Guinée] et des Moluques, la poursuite du processus de réforme, le maintien de la solidarité au sein de la TNI.

Vous allez atteindre l'âge de la retraite comment envisagez-vous votre avenir ? Allez-vous rester dans l'armée si l'on vous proposait de prolonger votre période active ? Si vous quittez l'armée, pensez-vous comme beaucoup de Généraux (ER) entrer en politique ?

J'ai une ferme et des terres dans l'Ouest de Java [le Général a eu sa première récolte de fraises au début du mois]. Une prolongation de ma période d'activité ne serait pas un problème. En tant que soldat je dois être prêt à m'acquitter de toute tâche que l'on me confierait pour autant que cela aille dans le sens des intérêts de la nation et de l'Etat. Quant à entrer en politique, cela ne m'intéresse pas du tout.

Quand vous voyez certains Généraux mis en examen à propos du Timor, pensez-vous que ce soit oeuvre de Justice ou une affaire de politique ?

Personnellement, je souhaiterais une approche juridique, et non politique de la chose. Mais la question est hautement politisée. Prenez par exemple l'insistance américaine pour que certains généraux soient impliqués au procès portant sur la violation des Droits Humains au Timor Oriental.
Si la Loi ne fait pas d'eux des coupables, en quoi devrions nous les condamner ? Cette pression américaine sur l'Indonésie est une manoeuvre politique. C'est un objectif (un dessein) américain que de voir certains généraux coupables dans le procès concernant le Timor Oriental. Ceci n'est pas équitable d'autant plus si la Loi ne fait pas d'eux des coupables. C'est une ambivalence américaine.
D'un côté ils veulent aider la TNI, la Police, en fournissant des équipements, mais ils imposent que l'aide soit utilisée pour chasser les terroristes de leur choix. On ne peut utiliser l'aide pour autre chose que cela. Les Etats-Unis avancent l'argument de la violation des Droits Humains par la TNI et
la Police, si l'aide qu'ils donnent n'est pas utilisée pour autre chose que pour la guerre contre le terrorisme. Mais en 1998 par exemple, il a été demandé à la TNI et à la Police d'aider à la protection de ses citoyens; il n'était pas question pour la TNI, ou pour la Police, de violer les Droits de l'Homme en le faisant, pour autant que ses citoyens étaient en sécurité.

A qui le soldat doit-il obéir en premier lieu ? A ses supérieurs hiérarchiques directs ? Aux chefs supérieurs des armées ? Aux directives du Gouvernement ? La question peut se poser dans certaines provinces reculées de votre pays.

La question de la chaîne de commandement est universelle.
Il y a une hiérarchie; par exemple vous avez le cas d'une section qui doit suivre les ordres de son chef de section, une compagnie qui doit suivre les ordres de son commandant d'unité, et ainsi de suite jusqu'au gouvernement central. Un
abus dans la chaîne de commandement peut être fatal. Prenez par exemple le coup d'Etat communiste du 30 septembre 1965 (impliquant des militaires).
Il est vrai qu'en réalité, il arrive parfois vous ne pouvez pas suivre strictement la chaîne de commandement. Une section d'une compagnie "A" dans une zone d'opération, par exemple, sera beaucoup plus proche des ordres de son chef de bataillon que de ceux de son commandant de compagnie. Le chef de section rend compte au che

Signature :
Propos recueillis par Philippe Raggi

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l'Indonésie n'est pas le Pakistan 28 octobre 2002

Suite aux attentats de Bali et de Manado du 12 octobre dernier, d'aucuns ont avancé un parallèle entre la situation en Indonésie et celle du Pakistan. Cependant cette comparaison ne peut être soutenue.

- En un premier lieu, l'Indonésie n'est pas un Etat islamique alors que c'est le cas du Pakistan. Ceci n'est pas la moindre des différences, puisqu'il en découle un rapport aux minorités radicalement différents.

- Par ailleurs, l'Islam indonésien n'est pas l'Islam pakistanais. Il n'est pas nécessaire d'être ethnologue pour savoir que dans l'Islam indonésien existe des pratiques typiques et syncrétistes qui constituent ce que l'on appelle "la javanité". Les indonésiens musulmans sont fiers de leur culture ante-islamique (Sriwijaya et Majapahit) alors que les pakistanais n'ont pas cette diversité dans leurs origines. Et ce n'est pas au Pakistan que l'on trouverait deux mouvements musulmans, tels la Muhammadyiah et le Nadlatul Ulama (représentant l'Islam majoritaire dans l'archipel) opposés à l'instauration de la Loi coranique. Rappelons que la sharia n'est pas institué en Indonésie, hormis en Aceh (Nord de Sumatra) et encore fut-elle imposée par Jakarta aux achénais sans que la population locale ne demande son instauration, dans le but de diviser cette province sécessionniste.

- Le Pakistan et l'Indonésie ont eu certes un Général comme Président mais la comparaison s'arrête là; Suharto n'est pas Zia. L'approche de l'Islam par ces deux chefs d'Etat n'est en aucun cas comparable, comme leur rapport à la nation et à l'unité nationale vis à vis de la religion musulmane. A titre d'exemple, le principe constitutionnel indonésien du Pancasila (cinq principes (1)) est inconcevable au Pakistan; il serait même considéré comme hérétique, impie.

- La seule similarité apparente pourrait être la forte présence de l'armée dans le politique et le monde économique; là aussi s'arrête la comparaison. Cet élément pourtant n'est pas à même d'être suffisant. Le Myanmar, par contre, serait à même, lui, de soutenir une comparaison sérieuse avec l'Indonésie; les liens et la coopération entre ces deux pays sont d'ailleurs là pour le prouver.

- La corruption n'est pas un élément satisfaisant de comparaison car il n'est pas l'apanage de ces deux pays, loin de là…

- Géopolitiquement, l'Indonésie n'a pas d'Afghanistan, ni de Cachemire. Tel la Chine, l'Indonésie est assez vaste et a fort affaire avec ses forces centrifuges pour avoir des appétits territoriaux sur ses voisins du Sud-Est asiatique. Et ce n'est pas le recul de l'armée indonésienne sur la question de sa structure militaire territoriale ni la diminution (à cause de la réforme engagée) de sa présence sur la dizaine de millier d'îles que compte l'Indonésie qui pourrait avaliser la thèse de l'existence de "zones tribales" ou assimilé dans l'archipel.

- Les services secrets indonésiens (BIN et BAIS) ne sont pas l'ISI pakistanais. Il existe des divergences et dissensions entre ces services et l'armée en Indonésie, alors qu'au Pakistan, ces institutions fonctionnent plutôt en symbiose, avec l'ISI comme donneur d'ordre.

- L'Indonésie n'a pas un Brigadier Général S.K.Malik; cet officier général pakistanais a écrit officiellement un ouvrage, intitulé "Le concept coranique de guerre", qui peut être considéré comme le bréviaire des officiers de l'armée pakistanaise. Cet ouvrage officialise, entre autre chose, l'utilisation de la terreur non pas comme moyen mais comme fin dans les rapports avec les kafirs (infidèles).

- Enfin, les officiers indonésiens ne sont pas issus d'Ecoles coraniques islamistes radicales, comme beaucoup de leurs homologues pakistanais, lesquels sont de plus en plus nombreux a avoir ce cursus. Ce n'est pas non plus à l'Ecole des Officiers pakistanais que l'on trouvera des cours sur le respect des minorités et sur l'ouverture et la préparation au dialogue inter-culturel, comme c'est le cas à l'Académie Militaire Indonésienne (AKABRI).

Sans aller plus loin, fo

Notes :
(1) le nationalisme (Kebangsaan), l'humanisme (Kemanusiaan), un gouvernement représentatif (Kerakyatan), la justice sociale (Keadilan Social), le monothéisme (Ketuhanan).
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ACEH : fin de l'option diplomatique mai 2003

Déception après la rupture des négociations entre le gouvernement indonésien et le groupe rebelle indépendantiste GAM.

De passage à Paris le 22 mai 2003, le chef de la délégation du gouvernement indonésien dans la négociation avec les rebelles du GAM (Gerakan Aceh Merdeka, le mouvement pour un Aceh Libre), l'Ambassadeur Wiryono Sastrohandoyo, a tenu une conférence de presse afin d'expliquer le pourquoi de l'échec des pourparlers qui avaient pourtant bien commencé avec la signature le 9 décembre dernier d'un accord sous les auspices de l'ONG le Centre Henri Dunant en Suisse.

Organisée au Centre d'Accueil de la Presse Etrangère (CAPE), à la maison de la radio, il n'y avait malheureusement que peu de journalistes car au même moment, Collin Powell se trouvait non loin de là...

Depuis le 18 mai minuit, Aceh est sous la loi martiale (1) pour six mois (décret présidentiel n° 28/2003) et, depuis le 19 mai matin, une opération militaire de grande envergure a été lancée : près de 30 000 soldats et policiers indonésiens sont d'ores et déjà à pied d'œuvre dans la province.

Dans la partie nord de Sumatra, depuis 1976, un mouvement indépendantiste conduite par Hassan Di Tiro en exil en Suède (2), résiste à Jakarta et cherche à se libérer de l'Etat indonésien. Partie intégrante de la république depuis sa création en 1945, la province d'Aceh ne compte que quatre millions d'habitants et recèle d'importante ressources naturelles, notamment en gaz naturel liquéfié; Aceh est ainsi une des quatre provinces les plus riches et les plus rentables de l'archipel indonésien avec les îles Riau, Kalimantan Est et la Papouasie occidentale.

Comment sommes-nous arrivés à une telle situation en Aceh ? Le mouvement rebelle GAM ne compte que 5 000 partisans et près de 2 000 fusils; cependant, depuis près de 27 ans maintenant, aucune solution viable et pacifique n'a pu être mise sur pied par les différents gouvernements indonésiens successifs. Pendant dix ans même, à partir de 1998 et jusqu'à la chute de Suharto, Aceh fut classée zone d'opérations spéciale (DOM). Pendant cette période, les parties belligérantes ont causé du tort aux populations civiles, et l'armée indonésienne n'a pas précisément fait montre de réel professionnalisme. Par ailleurs, alors que l'armée indonésienne (TNI) se trouvait face à un relatif petit mouvement, son incapacité (volontaire ou non) à éradiquer l'insurrection armé à montré qu'elle était davantage une institution politique qu'une force opérationnelle professionnelle, un héritage des années Suharto. Rappelons que le conflit a fait jusqu'à présent près de 10 000 morts et causé des dégâts importants, rendant la vie impossible aux populations civiles locales.

Avec l'avènement du Président Abdurrahman Wahid, élu démocratiquement fin 1999, des négociations entre les autorités indonésiennes et le GAM ont été lancées sous les auspices du Centre Henri Dunant situé à Genève. Un travail de longue haleine qui avait conduit malgré tout à un accord signé le 9 décembre dernier et qui avait vu la situation nettement s'améliorer avec une diminution manifeste des altercations meurtrières qui étaient auparavant quotidiennes. La France a participé à ce processus de paix, dernièrement en permettant la rencontre des parties au petit Trianon de Versailles. A la suite à cet accord, avait été mis en place d'un COHA (Cessation of Hostilities Agreement) avec l'envoi sur place d'une cinquantaine d'observateurs étrangers, essentiellement thaïlandais et d'ailleurs sous l'autorité d'un général de l'armée royale de Thaïlande. Malgré le soutien du Japon, des Etats-Unis, de l'Union Européenne et de la Banque mondiale, à la conférence dite de Tokyo, qui visait durant la deuxième semaine de mai à finaliser et à appliquer les résolutions de l'accord, le GAM a fait volte face, demandant une renégociation. Le point litigieux pour le GAM portait sur l'acceptation d'Aceh comme province - certes à autonomie spéciale depuis le 1er janvier 2001 - mais partie intégrante de la République d'Indonésie. Le GAM est donc revenu sur ce préambule, comme d'ailleurs sur l'acceptation de

Notes :
1 une loi martiale appliquée conformément à l'article 23/prp 1959 amendée dernièrement par la loi n° 52/Prp/année 1960.
2 dont il a la nationalité.
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Le reste du monde… 11 janvier 2003

C'est en 1997 que paraissait aux Etats-Unis ainsi qu'en France, un ouvrage intitulé « Le grand échiquier » (Bayard éditions, collection Actualité, 276p. 1997.) avec pour sous-titre « L’Amérique et le reste du monde ». Le livre était l’œuvre d’un homme important en matière de géopolitique aux Etats-Unis, membre de la Trilatérale, membre du Bidelberg Group, ancien conseiller à la sécurité de la présidence des Etats-Unis, expert fort écouté du Center for Strategic and International Studies, membre du très influent Counsil on Foreign Relations (CFR), professeur à la Johns Hopkins University ; cet homme est Zbigniew Brzezinski. Son ouvrage est un examen sérieux de géopolitique mondiale, et il trace les objectifs stratégiques des Etats-Unis pour les prochaines décennies.

Il ne s’agit pas avec ce livre d’un énième travail de géostratégie présentant les forces, les interactions, les évolutions, les constantes du monde contemporain, mais bien d’une vision de géostratégie s’inscrivant dans une eschatologie terrifiante. Le but est clair : asseoir et renforcer le rôle dominant des Etats-Unis comme première puissance mondiale ; pour cela, nous dit Brzezinski, il faut à tout prix empêcher l’émergence d’une puissance sur le continent eurasien capable de rivaliser avec les Etats-Unis. Et il faut, nous dit toujours l’auteur, que la Maison Blanche veille au respect légitime de la primauté américaine sur cette Eurasie - le « grand échiquier » - car ses objectifs sont généreux (sic). Ainsi, dans cette logique implacable, défier l’Amérique reviendrait à agir contre « les intérêts fondamentaux de l’humanité ». Tout est dit.

Cette vison du monde si réaliste et cynique, n’est pas l’apanage du seul Brzezinski. Ainsi, d’autres auteurs et penseurs – plus ou moins habiles, il faut le dire – ont développé de tels propos. Citons George Kennan, Robert Strausz-Hupé, Dean Acheson, Charles Krauthammer et parmi les plus récents, Francis Fukuyama, le Général (ER) B. Sowcroft, ainsi qu'un des plus médiatiques : Samuel P. Huntington. Ce dernier - on s’en souvient - fit connaître sa conception du monde en publiant un article dans le magazine américain Foreign Affairs puis un ouvrage aujourd’hui mondialement connu : « Le choc des civilisations » (Editions Odile Jacob, 402p. 1997.). La thèse d’Huntington, simple, simpliste pourrait-on dire même, réside dans son approche originale du monde d’aujourd’hui et des conflits de demain ; nous sommes, dit-il, confrontés à une nouvelle structure organisationnelle du monde, laquelle n’est plus idéologique, politique, ou économique, mais culturelle et civilisationnelle. Toujours dans cette perspective, les Etats-Unis se réservent bien entendu une place de choix : ils sont le « pays phare » du bloc civilisationnel occidental. Sans aller plus loin car tel n’est pas notre sujet, disons que la thèse huntingtonienne comme d’ailleurs les discours et études issus de la Rand Corporation, de la Heritage Foundation, de la Brookings Institution, etc, « modèlent » le monde (shape the world). Et si ces discours américains ne sont pas univoques, force est de constater que cette modélisation se fait toujours à l’aune des seuls intérêts américains et de sa tradition puritaine, messianique.

Que retenir de ces différentes visions du monde américaines ? Premièrement que les américains pensent le monde, car produire un discours sur le monde, c’est d’abord percevoir celui-ci, l’analyser et donc le penser. Secundo, que leur pensée est proprement originale. L’analyse américaine n’est pas et ne pourrait être celle que pourrait produire des français, des européens, des africains ou des asiatiques ; l’on pense effectivement toujours à partir de son histoire, de sa tradition, de sa singularité. Tertio, qu’il ne s’agit pas de ratiocinations purement gratuites et futiles. Contrairement aux réflexions d’un grand nombre de nos intellectuels en France ou en Europe, lesquels sont souvent de purs jeux d’esprit, il faut reconnaître que les intellectuels

Article paru dans "Partenariat Europe-Maghreb"

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Pierre Schoendoerffer : un homme de vérité

Citation :
"Il disait en tout cas la vérité, la vérité libérée des oripeaux du temps. Que l'imbécile s'effare et frissonne ; l'homme digne de ce nom admet ces choses et peut les contempler sans sourciller (…) Pour affronter cette vérité il a besoin de tout ce qu'il y a d'authentique en lui, de toute sa force innée. (…) il faut une foi délibérée".
Joseph Conrad, Le cœur des ténèbres, chap.3.

L'année 2003 aura été un bon cru pour les admirateurs de l'œuvre pluridisciplinaire de Pierre Schoendoerffer ; ainsi ce n'est pas moins d'un roman et d'un film dont le réalisateur-écrivain de "La 317ème section" et du "Crabe-tambour" nous a gratifié.

En mars tout d'abord sortait "L'aile du papillon" (Ed. Grasset, 280p.), un roman de facture typiquement schoendoerfferienne, avec temps et contre-temps, récits à plusieurs voix, rencontres qui esquissent, en fin de compte, la réalité et la complexité de l'âme humaine, tout cela autour d'un événement tragico-maritime.

De nos jours, durant une course en solitaire, suite à la rupture d'une manille "à cinquante balles", un jeune marin, Roscanvel, se trouve entraîné dans une suite d'événements dramatiques. Tout commence par une collision avec un navire marchand, puis la montée à bord de ce navire "poubelle" à l'équipage composé d'un Commandant douteux, de marins traîne-misères de plusieurs pays, c'est enfin la découverte d'une autre vie... Puis c'est l'incident, l'enchaînement arithmétique du désastre, le grain de sable dans toute la mécanique qui conduiront finalement Roscanvel à être condamné pour … mutinerie et meurtre. Qu'a fait exactement Roscanvel ? le jeune marin sera-t-il condamné ? le livre contant son aventure verra-t-il le jour et sous quelle forme ? le narrateur-écrivain et son filleul de marin seront-ils vraiment toujours les mêmes après cette aventure ? Une histoire d'honneur et de fidélité dans la plus pure tradition des Conrad, Stevenson, Melville et autres sondeurs de l'âme humaine.

Deux voix dans ce récit, deux natures, deux âges aussi : Roscanvel, le marin d'exception, ingénieur brillant, fougueux, têtu - comme un breton -, et le narrateur, plus âgé, ancien légionnaire, ancien d'Indochine, écrivain quelque peu désabusé, aimant bien l'aventure mais aussi les bars bretons et leurs breuvages. Cela nous donne d'ailleurs quelques pages superbes d'envolées lyriques, comme par exemple la description "marine" du bar Le Cap Horn, avec Jenny son attachante tenancière - "un grand Capitaine" - et ses clients, cariatides de comptoir, frères de misère, fidèles à on ne sait quoi mais "qui doit exister", d'aucuns à "visages de souque-misères", à l'air "absents et vague de pré-salés au pâturage", "la vodka aidant, le lait de la tendresse humaine coulera bientôt dans leurs veines". Mais tous ne sont pas rentrés dans le rang…

Roscanvel charge donc son aîné d'écrire son histoire ; ceci sera le prétexte à un échange, fructueux et révélateur, entre les deux hommes, soulignant la question de l'interprétation des faits, de leur éclairage et en définitive de leur réalité "objective" car celui qui écrit n'est pas celui qui a vécu les événements. Il y a celui qui relate, verbalement, ce qui lui est arrivé et celui qui écrit, qui fait exister sur du papier des "choses" arrivées à un autre ; mais écrire c'est aussi juger. Nous sommes là dans une logique parfaitement conradienne du récit à multiples voix/voies, de constructions signifiantes et à la structure narrative magistralement exposée.

Grâce à ce dia-logue, au fur et à mesure des faits et des contradictions apparentes ou non, volontaires ou non, nous approchons l'humanité de l'homme, sa grandeur mais aussi son horreur ; "cette turbulente et déraisonnable humanité"…

Les schoendoerfferiens retrouveront dans ce roman des accents de ce qu'ils ont aimé par le passé dans l'œuvre de l'académicien (évocations de contrées ultra-marines, personnages bien campés et attachants, la confrontation de l'homme à la fatalité, le dépassement de soi, etc.) mais les lecteurs nouveaux y trouveront ironie, inquiétude métaphysique, lyrisme, le tout exprimée dans une langue de marin : claire, juste, vraie dirait-on. Voilà le premier beau cadeau que nous a offert Pierre Schoendoerffer avec son roman.

Le 1er juillet 2003, enfin, quelques privilégiés ont pu voir en première mondiale dans le cadre prestigieux de l'Ecole Militaire, en présence de toute l'équipe du tournage et des acteurs, la projection du dernier film de Pierre Schoendoerffer. Tiré de son avant dernier roman éponyme intitulé Là-haut, ce film, là encore - davantage peut-être que dans "L'aile du papillon" - nous fait retrouver le "mo

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Incertitudes sur les évènements du sud de la Thaïlande 29 mai 2004

Le samedi 4 janvier 2004, des bandes armées non-identifiées attaquaient 93 endroits du Sud de la Thaïlande – à prédominance musulmane –, faisant près de 40 morts (musulmans et bouddhistes). Les cibles (18 écoles détruites ainsi que des installations de la Police et de l’armée Thaï attaquées et volées) font penser que les auteurs sont issus des mouvements séparatistes musulmans connus (PULO, PULO Mai, BRN ; organisations ayant toutes leur base arrière respective en Malaisie), alors que depuis près de deux ans ces mouvements étaient en perte de vitesse, avec seulement 70 militants actifs recensés.

Dans l’éventail de ces attaques du mois de janvier, une a plus fortement focalisée l’attention des observateurs et des thaïlandais en général : celle qui a eu lieu sur une caserne dépôt de l’armée royale Thaï. Quatre soldats thaïlandais y étaient tués ainsi qu’un moine bouddhiste (égorgé devant témoins). Cette attaque a permis aux assaillants de dérober un grand nombre d’armes (300 fusils d’assaut, 40 pistolets, 2 M-60) ainsi que des munitions.

La Police thaïlandaise suit particulièrement un mouvement, le Gerakan Mujahideen Islam Pattani (GMIP, le Mouvement des Mujahiddines de la Pattani Islamique), et ses chefs Jehbumae Buteh et Nai Cigu Maah Gootay. Une récompense d’un million de bath est d’ailleurs promise à toute personne qui donnerait aux autorités des informations conduisant à leurs arrestations. Ce mouvement est un nouveau venu dans l’ensemble des groupes armés islamistes séparatistes opérant dans cette zone depuis plusieurs dizaines d’années. Peu d’informations circulent au sujet de ce groupe, dont on ne connaît clairement ni les effectifs, ni les racines idéologiques et financières véritables, ni les liens qu’il pourrait avoir avec d’autres mouvements transnationaux comme la Jemaah Islamiyah ou encore Al-Qaeda.

De nombreuses questions restent posées suite à ces attaques du mois de janvier 2004 menées dans près de 20 districts des provinces de Yala, Narathiwat et de Patani (proches de la frontière avec la Malaisie), sous Loi martiale depuis le 6 janvier. Si les soupçons se sont tournés immédiatement vers les mouvements séparatistes musulmans locaux, d’autres hypothèses apparaissent pourtant, ne disculpant pas pour autant les premiers mais développant autrement les motifs réels des attaques.

Le 11 février, le petit poste de police d’Ayer Weng, non loin de la frontière avec la Malaisie, était attaqué (1). Le 23 mars, une bombe explosait à Narathiwat non loin de l’endroit où se réunissaient les Ministres thaïlandais de l’Intérieur et de la Défense et des représentants de l’administration locale. Le 27 mars, une bombe posée sur une motocyclette explosait, toujours à Narathiwat, détruisant un club nocturne assez volage, blessant 30 personnes (2). Le 30 mars, des hommes armés volaient de la dynamite, des détonateurs ainsi que 1,4 tonnes de nitrate d’ammonium dans une carrière à Yala (3). Le 14 avril, des cheminots de la province de Patani découvraient une tentative visant à faire dérailler un train (4).

Mais c’est le 28 avril dernier que survenait un fait surprenant dans ses modalités. Ce jour là, quinze postes de police, des postes de défense des villages, des bureaux de districts étaient simultanément attaqués par des hordes de séparatistes en furie, brandissant des machettes et pour certains des armes à feu (5). Ces attaques amenèrent une riposte immédiate de l’armée thaïe et l’on dénombrait au final 113 morts dont 108 civils. Une partie des assaillants s’étant réfugiés non loin de Patani, dans la mosquée de Krue-Sae (6), les soldats thaïlandais, après plusieurs heures de combats, anéantissaient les 32 insurgés fanatiques, s’attirant les foudres des observateurs patentés - tant locaux qu’internationaux - pour la « brutalité de leur attaque » ; la mosquée fut en effet partiellement détruite. Quant aux victimes, elles étaient jeunes, moins de 25 ans pour la plupart, curieusement tous habillés de noir.

Le 21 févri

Signature :
Philippe Raggi, membre de l'Académie Internationale de Géopolitique et du Centre Français de Recherche sur le Renseignement (CF2R)

Notes :
(1) vraisemblablement par des membres du PULO.
(2) Il est à noter que c’est la première fois que des civils étaient touchés dans la série d’attaques menées dans la région.
(3) Il est plus que sûr que ces explosifs ne seront pas utilisés sur le sol thaïlandais mais bien plutôt dans d’autres pays du sud-est asiatique.
(4) les rails ayant été sabotés.
(5) Les armes employées pour cette attaque furent des AK-47, dont la provenance n’est pas encore établie officiellement ; notons que l’armée thaïe n’utilise pas ce type d’arme mais des M-16 de facture américaine.
(6) haut lieu de culte chiite local, bâti au XVIème siècle.
(7) réseau islamiste du sud-est asiatique.
(8) Tant d’origine malaisienne que thaïe.
(9) Cette tactique de pompier/pyromane est employée fréquemment dans plusieurs pays de la région, comme aux Philippines ou encore en Indonésie.
(10) qui implique fortement le Japon financièrement parlant.
(11) Cf. sur cette question les travaux de Xavier Rauffer et de ses étudiants de Paris I.
(12) C’est à dire sur la Birmanie, l’Inde et le Pakistan.
(13) Un terroriste lié à la mouvance Al-Qaeda aurait été appréhendé il y a peu en Corée du Sud après un « voyage d’étude et de faisabilité » au Japon ; il aurait notamment recueilli des informations sur les installations américaines tant en Corée du Sud qu’au pays du soleil levant. Ce terroriste serait actuellement interrogé par les autorités américaines. Le NIS (service de renseignement national Corée) n’a pas confirmé cette information.
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Colloque sur les forces spéciales

Les 11 et 12 juin 2001, à l’auditorium du CNRS, rue Michel Ange, s’est tenu un Colloque à l’initiative du CEHD (centre d’études et d’histoire de la défense) qui avait pour thème « Les forces spéciales : concept et histoire ». Près d’une centaine de personnes s’étaient déplacées pour écouter les différents orateurs. Dans l’assistance, de nombreux généraux en retraite, plusieurs anciens hauts responsables des affaires de défense et de sécurité. Une ombre au tableau pourtant, l’âge moyen de l’ensemble des auditeurs, relativement élevé.
Le président de séance, pour cette première demie journée, fut le Général Saleün (CR depuis le 1er janvier 2000), ancien chef du COS, et actuel Maire de Paimpol ; il passa rapidement la parole à Pierre Dabezies. Ce dernier nous parla des forces non conventionnelles en général, émaillant son propos de son expérience dans celles-ci. Ancien SAS pendant la seconde guerre mondiale, passé par le GCMA en Indochine jusqu’en 1953, il servit également en Algérie et l’on se souvient sa prise de position en faveur du Général de Bollardière et de son soutien à la légalité tout comme à l’éthique républicaine ; il est aujourd’hui Professeur émérite à la Sorbonne. L’orateur suivant, le Capitaine Philippe Guyot, officier d’active, passé par la Légion Etrangère, et aujourd’hui à la section d’études du service historique de l’armée de terre (SHAT), aborda un sujet original : la contre guérilla du Colonel Dupin au Mexique. La problématique que posait le Capitaine Guyot était de savoir si cet événement exotique relevait du concept de forces spéciales. C’est au Mexique que l’action se situe, précisément dans les années 1863-1865. Sur ce théâtre d’opération, où la France est engagée, le Colonel Dupin crée une « troupe spéciale » composée d’individus relevant de onze nationalités et qui menèrent la vie dure à l’ennemi. Très précis et très documenté dans son travail, ayant recours à la technique (ordinateur portable et diaporama animé) le CNE Guyot après avoir cerné le cadre historique, les étapes de la mise en place de cette « troupe spéciale », les différentes actions menées par cette dernière, sans oublier ses rapports avec les troupes françaises régulières, aborda le bilan global de l’action du COL Dupin ; il dégagea ainsi les principes d’action du meneur d’hommes français en Amérique du Nord :
- la sûreté (tant pour le personnel que le cantonnement, comme les déplacements),
- l’absence de mouvement sans renseignements préalables,
- l’intelligence du Chef (avant, pendant et après le mouvement) qui emploie la ruse avant la force,
- la rapidité et la détermination dans l’action.
Très construit, sans aucun délayage ni faiblesses d’aucune sorte, le propos et l’excellent travail du CNE Guyot méritait d’être salué.
La seconde intervention, écrite par Jean-Luc Susini (du Centre d’Histoire Militaire d’études de Défense nationale de Montpellier, malheureusement absent) et lue par Pascal Le Pautremat, traitait d’un sujet peu connu : Les Corps Francs allemands entre 1918 et 1922. Dans le temps qui lui fut imparti, le lecteur nous dressa un tableau général de ces troupes particulières qui furent avant tout « au service de l’Allemagne et non d’un Gouvernement » ; elles comptaient 150 000 hommes, répartis en 800 unités allant de la Section à la Division. Les Corps Francs bénéficiaient d’une très large autonomie dans le combat comme dans la logistique ; ils combattaient, ne stationnant pas après la victoire pour occuper le terrain, et ne faisaient pas de poursuite. Jean-Luc Susini note que trop peu d’études ont été faites sur cette troupe d’élite ; il fut cité quelques ouvrages sur le sujet, anglo-saxons notamment, mais à aucun moment les remarquables travaux de Dominique Venner (Baltikum, Les Corps Francs allemands de la Baltique) ne furent recensés ; une carence inexplicable. Après la Grande Guerre terrible de 1914-1918, les Corps Francs (tous des volontaires) combattirent encore cinq longues années, et l’on peut dire que c

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Le second front de la guerre contre le terrorisme Les mouvements islamistes du Sud Est Asiatique Texte de l'allocution du colloque "les montes en puissance en Asie" organisé par le club "Démocraties", (Sénat, Salle Médicis - Samedi 30 Novembre 2002)

Mesdames, Messieurs,

si l’on parle en Asie de montées en puissance, le premier des éléments concernés sera bien évidemment l’Etat. Mais l’on sait aujourd’hui que l’Etat ne détient plus le monopole du pouvoir. Nous pouvons ainsi constater qu’il y a de manière équivalente une certaine montée en puissance des mouvements terroristes islamistes.
Cependant la lutte engagée par ces mouvements ne se substitue pas à celle des Etats : elle s’y ajoute.
Avec la défaite du régime des Talibans en Afghanistan, un certain nombre de radicaux islamistes, ayant échappé aux mailles du filet, ont trouvé refuge dans différents pays « meubles », pas uniquement voisins, et c’est ainsi que certains d’entre eux se sont retrouvés dans différents pays d’Asie du Sud Est insulaire. Alors, pourquoi ces pays ?

Comme le signale John GERSHMAN, dans la livraison de Juillet/Août 2002 de FOREIGN AFFAIRS, ce choix réside dans la conjonction de plusieurs facteurs :
- Ce sont des Etats fortement touchés par la crise financière puis économique de 1997,
- Ce sont des Etats qui ne sont pas en mesure de faire respecter totalement la loi et l’ordre sur l’ensemble de leur territoire respectif,
- Ce sont des Etats, enfin, qui, pour quelques uns d’entre eux, pratiquent une certaine discrimination à l’égard de quelques franges de leur population.
Mais si ces trois conditions sont peut-être nécessaires, elles ne sont pas en tout cas suffisantes pour faire de certains pays le nids et le refuge des terroristes transnationaux de l’entité baptisée « Al-Quaida ». En effet, si l’Asie du Sud-Est est devenue le second front de la lutte contre le terrorisme, c’est essentiellement parce que les pays concernés recèlent sur leur territoire respectif - et ce depuis fort longtemps - des mouvements d’inspirations islamistes, différents mouvements à même de prêter aide, refuge et main-forte aux hommes d’Al Quaida. Toutefois, précisons qu’il existe également des mouvements qui, bien qu’inspirés seulement par Al Quaida et sa lutte contre l’hégémonie américaine, lui sont par ailleurs structurellement étranger.
Cette région d’Asie du sud-est est donc devenu, à compter du 11 septembre 2001, le second front dans la lutte engagée contre le terrorisme islamiste. Ainsi, les Etats-Unis intervenaient aux Philippines aux côtés des Forces Armées de Manille fin janvier 2002 dans le cadre de l’exercice « Balikatan 2002» (qui signifie littéralement "épaule contre épaule"); ainsi, étaient arrêtés plusieurs dizaines de militants radicaux tant en Malaisie qu’à Singapour qu’aux Philippines. A ce sujet, notons que l’Indonésie n’avait, avant les attentats de Bali et de Manado, pratiqué aucune arrestation tangible dans les milieux islamistes.
Ce sont quelques uns de ces mouvements islamistes que je me propose brièvement de vous présenter ; et cela, me semble-t-il, peut être d’un certain intérêt ne serait-ce que pour comprendre quelques événements passés, présents et futurs dans cette région.

Les Philippines

Je commencerais par les Philippines. C’est un sénateur américain, Sam BROWNBACK, siégeant à la commission des affaires étrangères, qui disait l’année dernière que les Philippines seraient « la prochaine cible après l’Afghanistan ». Par ailleurs l’intervention militaire américaine du début de l’année, devait s’appeler au départ, « Enduring Freedom-Philippines ».
Mais où se situe le théâtre ? Nous sommes au Sud des Philippines, entre l’île de Mindanao et la portion malaisienne du Nord de Bornéo (Shabah). Entre ces deux pôles, distants d’environ 300 Km, un chapelet d’îles : l’archipel des Sulu, situé entre la Mer du même nom et la Mer de Célèbes. Dans cette région, une concentration de musulmans sunnites, de l’école Shaféite, qui se regroupe sous la bannière du « peuple Moro ». Les Moros regroupent ces musulmans du Sud des Philippines qui ont été ainsi labellisé par les Espagnols au début du XVIème siècle.
Notons toutefois que les musulmans philippins, qui ne représentent que 5

Colloque "les montes en puissance en Asie"
Organisé par le club "Démocraties"
Sénat, Salle Médicis - Samedi 30 Novembre 2002.
Texte de l'allocution

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L’approche civilisationnelle en question Le monde huntingtonnien

Lancée par Samuel P. Huntington voilà quelques années, tout d’abord par la publication d’un article dans Foreign Affairs puis dans par livre traduit en français chez Odile Jacob, la thèse du « choc des civilisations » (Le choc des civilisations, titre de l’ouvrage de Samuel Huntington, est tiré d’une analyse de Bernard Lewis, datant de 1990, sur les racines de la violence musulmane) fait aujourd’hui recette en France d’autant plus après l’attentat multicible de New York, car il faut expliquer au public comment cela a pu être possible, trouver des fondements à l’inexplicable et mettre cela en perspective.

La thèse du livre tient dans sa vision originale du monde d’aujourd’hui et des conflits de demain ; nous sommes confrontés à une nouvelle structure organisationnelle du monde, laquelle n’est plus idéologique, politique, ou économique, mais culturelle et civilisationnelle. Sur cette vision du monde, quelques reproches, dont la liste des « civilisations » reconnues par l’auteur, liste contestable parce qu’implicitement en découle une dynamique relationnelle inter-étatique bien convenable pour les Etats-Unis. Le monde nous dit Huntington est décomposé en huit entités : occidentale, islamique, hindou, slave-orthodoxe, japonaise, africaine, latino-américaine et confucéenne. Toujours selon l’auteur, les conflits à venir seront inter-civilisationnels, et s’opèreront surtout aux différentes zones de ruptures, aux zones de contacts inter-civilisationnelles. Néanmoins, on constate que seuls les lignes de contact entre le monde islamique et les autres civilisations fait apparaître conflits et affrontements sanglants.

Parmi ces « conflits inter-civilisationnels », Huntington en recense un particulièrement révélateur de la profondeur et de la puissance de ses arguments : le conflit du Timor. Dans cette partie du monde nous serions, selon l’auteur, à une des zones de contact entre la civilisation islamique et la civilisation occidentale : CQFD. Pourtant, pour peu que l’on connaisse les origines de ce conflit, force est de constater qu’il est plus de nature politique que « civilisationnel », religieux ou même ethnique. Sur l’île de Timor, tant dans la partie indonésienne que dans la partie orientale, 98% de la population est chrétienne catholique, et d’une ethnie homogène. Seul le fait politique et le sentiment national expliquent ici le conflit, et il suffit de lire les noms de tous les chefs du camp pro-intégrationiste (donc indonésien) comme de leurs partisans pour constater qu’ils sont tous catholiques. L’Islam n’a donc rien à voir dans ce conflit ; il y a d’un côté ceux qui défendent l’idée du rattachement du Timor oriental à l’Indonésie et de l’autre ceux qui veulent l’indépendance. On cherche en vain le motif religieux, civilisationnel…

Nous pourrions développer sur la faiblesse de la thèse huntingtonienne en passant au crible d’autres conflits qualifiés de « civilisationnels » par l’auteur et présentés sur sa carte du monde, pour démontrer l’inanité de ce motif unique, sorte de deus ex-machina de son paradigme. Ce tableau montrerait que le motif civilisationnel n’est pas le seul et encore moins le premier des facteurs entrant en ligne de compte pour expliquer les différents conflits à travers le monde où la civilisation islamique entre en contact avec les autres civilisations.

Certes, nous pourrions admettre que si le paradigme civilisationnel est instructif, en ouvrant des possibles et des jeux nouveaux dans le concert des nations, il n’est pas pour autant suffisant ; l’élément géostratégique demeurant nécessaire à une bonne lecture du monde. En elle-même, cette explication des conflits est déjà une politique étrangère, une lecture idéologique du monde ; car ce qui frappe surtout dans la thèse huntingtonnienne, c’est la grille d’analyse proposée : binaire et mono causale.

Tout géopoliticien même commençant, sait que la civilisation n’est pas et ne peut être l’élément unique à même de permettre une analyse méthodiqu

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Il y a 50 ans, le 7 mai 1954, Dien Bien Phu tombait Alors que les mémoires deviennent sélectives, il est bon de rappeler certains faits

1- La garnison de Dien Bien Phu a fait taire les armes, sur ordre du Commandement en Chef de Hanoï ; elle ne s’est pas rendue. Des rumeurs sur un soit disant drapeau blanc ont courues ça et là. Véhiculée par la propagande communiste, ce mensonge n’en était qu’un de plus. Il est vrai que de nombreux tissus blancs (des parachutes) jonchaient la zone mais certains ont voulu voir dans ces voiles blanches flottant au gré du vent, le signe d’une reddition.

2- Nos morts ne sont pas morts pour rien, comme on peut aussi l’entendre. Nos morts ont accomplis leur devoir jusqu’au bout et se sont battus pour plusieurs raisons, et cela malgré l’incurie des politiques d’alors et l’incapacité de Généraux nommés par les premiers. L’honneur du drapeau et de l’Empire, la camaraderie, la foi, une certaine idée du service et de la mission, furent pour nos soldats autant de raisons de se battre et de mourir.

3- Dien Bien Phu fut une bataille perdue, mais une bataille seulement. L’Armée Française n’avait que moins de 15% de ses forces dans cette bataille, le reste étant toujours opérationnel ailleurs sur le territoire de l’Indochine. Certes, les meilleurs de nos soldats se trouvaient à Dien Bien Phu (Légionnaires, Parachutistes, Infanterie Coloniale, Tirailleurs, etc.) ; mais vu les pertes causés à l’ennemi par rapport à celle endurées, nos soldats n’ont vraiment pas à rougir du combat mené pendant 57 jours.

4- Vo Nguyen Giap ne gagna pas tout seul « sa » bataille… La victoire des Bo-Doï avancée par certains ignorants ou complices, comme celle des « combattants aux pieds nus », « en guenilles », « transportant leur ravitaillement sur des bicyclettes », « tirant à bout de bras les canons sur les crêtes », relève plus de la propagande et du mythe que de la réalité. En 1954, l’armée du Vietminh utilisait des centaines de camions Molotova de l’armée rouge de Mao Tsé Toung et des officiers et soldats de Pékin encadraient et aidaient les forces Vietminh.

5- Sur les 11 000 prisonniers, plus de 8 000 disparaîtront dans les camps Vietminh ; un pourcentage bien supérieur à celui des camps allemands pendant la seconde guerre mondiale. De Dien Bien Phu, tous nos soldats, blessés ou non, durent faire plus de 700 kilomètres à pieds avant d’être parqués – pour ceux qui survécurent à la marche forcée – dans des camps de la mort lente. C’est dans ce genre de camp que s’illustrèrent des traîtres comme Georges Boudarel, alors officier politique du Vietminh. Mauvais traitements, lavage de cerveaux à la méthode communiste, maladies (dysenterie, malaria, paludisme, Béri-béri, etc.) furent le lot quotidien de nos prisonniers.

6- Au moment où Dien Bien Phu agonisait, Pierre Mendès-France négociait à Genève avec les délégation russe, chinoise, vietminh, anglaise, américaine. Ce que Mendès avançait comme une solution « honorable » (retrait de la France en deçà du 17ème parallèle) relevait cependant plus d’une déculottée que d’autre chose. Pham Van Dong lui-même, alors Ministre plénipotentiaire du Nord Vietnam, avouait à Kroutchev qu’il n’avait jamais espéré tant de la France et que les forces armées du Vietminh étaient exsangues ; toutes leurs forces avaient été lancées dans la bataille de Dien Bien Phu et Giap n’avait plus aucune réserve. Les menaces du même Mendès sur l’envoi du Contingent si un accord n’était pas conclu rapidement, furent une vaste mascarade ; à aucun moment cette solution ne fut envisagée concrètement. Par ailleurs, pour tenir son fameux « pari » (obtenir un accord avant une date et une heure précises) Mendès fit reculer les aiguilles des horloges… C’est tout dire sur le personnage et son honnêteté.

7- Alors que la France quittait le Nord du Vietnam, commençait la tragédie des Boat-people vietnamiens, fuyant le territoire « libéré » par les communistes pour rejoindre le Sud du pays, encore hors de portée du Vietminh.

8- Alors que la guerre d’Indochine finissait, une autre allait commencer en novembre 1954, en Algérie. Une autre tragé

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Le jeu démocratique à l’oeuvre en Indonésie 14 avril 2004

C’est le 5 avril dernier que se sont déroulées, dans le calme, les élections législatives dans le plus grand pays musulman du monde (1) (avec près de 147 millions de votants et 585 000 bureaux de vote) : l’Indonésie. Bien que les résultats définitifs ne soient pas encore promulgués, il reste que les jeux sont faits pour l’actuelle Présidente Megawati Sukarnoputri : elle sort perdante de la consultation électorale avec son parti, le PDI-P (2) (Parti Démocratique Indonésien de Lutte), au profit de l’autre grand parti politique indonésien, celui de l’ancien Président Suharto : le Golkar (3).

Ces élections avaient pour but de pourvoir non seulement l’assemblée législative nationale (DPR) mais aussi la législature provinciale (DPRD I), les conseils locaux (DPRD II) ainsi que le conseil des représentants régionaux (DPD). Quatre consultations le même jour, non sans une certaine confusion d’ailleurs pour les votants qui ont eu du mal pour s’y retrouver entre les 24 partis retenus et les centaines de candidats. Toutefois, ce sont plutôt vers les résultats des législatives nationales (DPR) que se tournent les regards des observateurs, puisque le prochain président qui sera élu au suffrage universel direct (4) devra s’appuyer sur le MPR (5) (la haute assemblée de la République d’Indonésie) pour gouverner et poursuivre son action.

Ainsi, peut-on déjà désigner les vainqueurs : il y a - nous l’avons déjà dit - le Golkar (6) , le Parti du Réveil National (7) (le PKB, le parti de l’ancien Président « Gus Dur » Wahid), le petit nouveau prometteur Parti Démocrate (8) (le PD avec sa tête de file, l’ancien ministre des affaires politiques et de sécurité, ancien Général, Susilo Bambang Yudhoyono, communément appelé SBY) mais aussi le fulgurant Parti de la Justice et de la Prospérité (9) (le PK Sejahtera) et enfin, le Parti du Mandat National (10) (le PAN, conduit par l’actuel chef de la haute assemblée – le MPR – , Amien Rais). C’est au sein de ces partis vainqueurs que se trouve celui qui deviendra le futur Président indonésien. D’ores et déjà les tractations vont bon train, les coalitions se forment, les portes feuilles ministériels se répartissent virtuellement.

Mais quels sont les faits notables à retenir de ces élections en dehors de la défaite de Megawati ?

Tout d’abord que le Golkar tient toujours le haut du pavé, avec notamment une implantation forte à l’Ouest de Java, aux îles Riau (en face de Singapour), au Nord, à l’Ouest, au Centre et au Sud-Ouest de Sumatra ainsi qu’à l’Est des îles de la Sonde (Flores, Sumba et Timor occidental) comme à Célèbes (11).

Mais il y a d’autres faits marquants qu’il faut retenir car ils sont riches d’enseignement pour l’avenir :

D’une part la percée du Partai Demokrat de SBY qui, bien que n’atteignant pas les 10%, se positionne comme le mouvement avec lequel il faudra désormais compter. Ainsi, comparativement aux autres éventuels candidats à la présidentielle, la figure de SBY se positionne incontestablement comme la plus « idéale » et ce tant sur le plan national qu’international. Ancien Ministre de haut rang, ancien Général, non entaché de corruption, Susilo se pose comme le plus crédible et vraisemblable futur Président indonésien (12).

D’autre part, le PK Sejahtera qui, avec son travail de fond sur le terrain (campus, portes à portes, etc.), avec l’honnêteté avérée de ses dirigeants face à la corruption généralisée d’un grand nombre de partis politiques, récolte aujourd’hui électoralement parlant un succès notable, bien que les chiffres apparaissent modestes à première vue. Mais ne nous y trompons pas, ce parti très prometteur travaille et table sur les futures élections de 2009 où il se retrouvera vraisemblablement parmi les arbitres et faiseurs de Rois.

Enfin, il y a le PKB de l’ancien Président Wahid qui, avec une assise certaine (notamment sur l’île de Java (13) qui regroupe près de 70% de la population indonésienne), est le parti incontournable pour la future coalition qui p

Signature :
Ph. Raggi, membre de l'Académie Internationale de Géopolitique.

Notes :
(1) Plus de 205 millions d’habitants.
(2) avec 19,83% (sources : KPU, la Commission des Elections Générales, au 14 avril 2004).
(3) Ce parti tient à se différencier d’avec ce qu’il fut sous le régime de l’Ordre Nouveau suhartien, de la sorte il
avance qu’il faut plutôt voir en lui à présent un « nouveau Golkar » (Golkar Baru).
(4) le 5 juillet 2004 pour le premier tour et éventuellement un second tour en Septembre 2004 (si aucun candidat n’obtenait plus de 50% au premier tour).
(5) qui comprend les membres du DPR ainsi que des membres représentatifs.
(6) avec 20,84% (sources : KPU au 14 avril 2004).
(7) avec 12,25% (sources : KPU au 14 avril 2004).
(8) avec 7,51% (sources : KPU au 14 avril 2004).
(9) avec 7,12% (sources : KPU au 14 avril 2004) .
(10) avec 6,48% (sources : KPU au 14 avril 2004).
(11) précisément au Centre, à Gorontalo (dans le Nord), au Sud et au Sud-Est de Célèbes.
(12) Son dernier et récent voyage à la Maison Blanche apparaît pour beaucoup comme un « adoubement » et une « accréditation » de la part de Washington.
(13) au Centre et à l’Est de Java.
(14) Rappelons que le PKB bénéficie du soutien du Nahdlatul Ulama (le NU, le Renouveau des Ulémas), la plus grande organisation religieuse musulmane d’Indonésie et même du monde (avec ses 40 millions de membres)
(15) Adburrahman Wahid et Megawati Sukarnoputri.
(16) Cette dernière comprenant notamment la lutte contre la corruption, ainsi que le renouveau des valeurs.
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