
Sylvie Binet
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Titre(s), Diplôme(s) : Maîtrise de Lettres, DEA Télématique
Fonction(s) actuelle(s) : Conseil en TI
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Jeanne Hachette - Tallandier
LES CONTRIBUTIONS DE L’AUTEUR
LES ARTICLES DE L'AUTEUR
Madame de Prie une héroïne contemporaine
Agnès de Prie aura tout vécu : l'ordre et le chaos, l'incertitude et le doute, l'amour et la solitude.
Le livre : Mémoires apocryphes de Madame de Prie, s'inspire de sa vie (Agnès Berthelot de Pléneuf, son nom de jeune fille - 1698-1729). Devenue Madame de Prie en 1713, elle sera ruinée suite aux dépenses somptuaires de son mari. Sous la pression familiale et sociale, elle devient la maîtresse de Louis Henri de Bourbon. Sa relation avec le duc de Bourbon la confronte alors à des hommes d'affaires sans scrupules. Devenue dame du palais, elle ne parviendra pas à être reconnue. Elle mourra dans des conditions dramatiques.
Mais, au juste, que fût sa vie ? Quels choix a-t-elle eu, séparée de son mari juridiquement, au début du XVIIIème siècle? Quel soulagement lui apporte le Duc de Bourbon en l'accueillant à Chantilly en 1719 comme maîtresse avérée ?
Elle pense l'amour comme elle le vit avec emphase, joie, sans véritable questionnement. En réduisant l'amour aux dimensions de sa sécurité matérielle, affective, son amour pour le Duc l'amène à un processus inéluctable de repli sur elle-même. Elle se noie dans les fêtes, dans l'oubli de sa condition de femme abandonnée, dans une exaltation perpétuelle d'elle-même dans les bras du Duc de Bourbon.
Tout se joue autour d'images : le Duc de Bourbon au bal, à la chasse, au pavillon de Sylvie, aux Grandes Écuries, avec Law, le Duc toujours plus riche, le Duc Premier Ministre, plus influent tendre, rude, fougueux.
La vie d'Agnès de Prie est en apparence confortable. Elle vit au milieu du bruit, de bavardages, de commérages, de complots, de trahisons, de corruption (l'affaire Law).
Ses pensées, ses sentiments ne sont que murmures. Elle est dans un processus d'enfermement qui dissimule à ses yeux la vacuité et les dangers de son monde.
C'est bien là que réside la vraie difficulté. Parfois un élan de sa pensée l'amène à une communion avec la société qui l'entoure. Cela ne dure pas ! D'autres facteurs entrent en jeu : le plaisir, la fête, le conformisme. Elle est à la merci des caprices du temps et de cette vie pseudo royale au château de Chantilly.
Sa vulnérabilité exprimée tout au long de sa vie ne peut se comprendre sans la qualifier d' ingénue : une âme d'enfant, toujours gaie, jamais de révolte ouverte ; éduquée avec sérieux : du latin et de l'italien pour plaire et séduire.
Nommée Dame du palais auprès de Marie Leszczynska, future épouse de Louis XV, ce poste aurait pu lui apporter un soulagement face aux problèmes complexes de son existence : l'argent, la proximité du pouvoir et de ses alcôves, la politique, la fête, l'amour... elle échouera sans doute à cause de sa santé ; mais aussi par manque de soif d'être, de devenir, de se réaliser.
Une fois libérée de ses fonctions à Versailles, elle n'est pas libérée de ses fardeaux.
La banqueroute, le Duc de Bourbon cantonné dans ses terres à Chantilly concomitant à son départ pour Courbépine, amène Agnès de Prie à ne plus s'accrocher à rien à l'approche de sa mort. Tout cela encourage son esprit à observer sa solitude profonde et elle réalise que sa vie était vide et la solitude sienne.
Pourtant, elle aura essayé, constamment, tout au long de sa vie de se libérer de cette vacuité, de cette impasse des désirs sans fin. Ni Monsieur de Trouville, ni Richelieu, le Duc de Bourbon, Marie Leszczynska, Louis XV n'auront pu l'aider.
En l'absence de toute activité réellement créatrice, elle n'a fait que regarder sa vie et le processus d'isolement est devenu permanent. Rien ne réussit à combler ce vide d'être soi-même, ni les plaisirs, ni la recherche de la vérité, ni Dieu. Elle se sert de sa beauté et du plaisir pour masquer ce vide.
Pétillante, elle pourrait vivre au XXIème siècle car l'amour ne se cultive pas moins de nos jours, amours multiples, amour charnel, amour divin. Son esprit cherche sans cesse des intermédiaires au bonheur : châteaux, chevaux, objets, rituels, religion, politique... Rien n'y fait. Elle restera au stade des gratifications, des dépendances.
Ses limites sont les limites que le siècle ne lui a pas nécessairement imposé. Elle vivrait de nos jours, sa pensée serait aussi fragmentée, tatonnante, conforme et dépendante.
Ses désirs, ses ambitions, sont à l'image de bien des vies de nos contemporains.
Binet (Sylvie) - Mémoires Apocryphes de Madame Prie, L'Harmattan
Signature :
Sylvie Binet