
Arnaud Du Crest
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Descriptif auteur
Ingénieur, formateur et animateur de réseaux régionaux, sont les expériences à partir desquelles A. du Crest a élaboré sa réflexion. Ses publications portent sur les compétences et la formation, l'insertion profesionnelle, les difficultés de recrutement, les sytèmes et démarches d'analyse des relations emploi formation.
Ingénieur agronome chargé de développement dans les coopératives agricoles, A. du Crest a ensuite créé la délagation ouest d'un Fonds d'assurance formation (1982), puis la délégation Nouvelles Qualification des Pays de la Loire (1990/92). Ill est en1993 directeur de l'Observatoire régional emploi formation des Pays de la Loire (ainsi que du centre d'information sur la formation continue depuis 2000). Il a participé aux travaux de la commission Prospective des métiers et des qualifications du Commissariat général du Plan. Il devient directeur de l'observatoire régional économique et social des Pays de la Loire à sa création en 2007, jusqu'en 2013, puis prend sa retraite professionnelle.
Titre(s), Diplôme(s) : Ingénieur agronome
Fonction(s) actuelle(s) : Membre de SNC, de Paroles de chrétiens pour l'écologie, de FAIR
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AUTRES PARUTIONS
Gestion des âges et territoires, in La diversité des âges, dir. Nicole Raoult et Bernard Quintreau, éd. Liaison, 2005
Point de vue œconomique sur la crise et les territoires, Conseil de développement de Loire Atlantique, mai 2009
Simplicité et justice, Paroles de chrétiens sur l'écologie, Diocèse de Nantes, 2013 (ouvrage collectif)
LES ARTICLES DE L'AUTEUR
L'orientation professionnelle face aux mythes
Dans le cadre d'un programme de recherche sur la façon dont les différents sociétés s'organisent pour vivre ensemble, Philippe d'Iribarne s'est demandé quelle était la conception de la liberté dans trois pays, trois cultures. Cette approche spatiale l'a logiquement amené à s'interroger sur le rôle de l'histoire dans la construction de cette idée.
L'évolution du système scolaire
L'évolution du système scolaire en France s'est faite en trois étapes :
Après guerre : le niveau de formation est souvent inférieur au poste occupé pour les emplois dits qualifiés
Années 1970 : les niveaux de formation et d'emploi se rapprochent (création de la grille des niveaux1)
Années 2000 : des salariés de plus en plus nombreux ocupent des emplois ne correspondant pas à leur formation, Apparition des termes de postes déqualifiés, de personnes déclassées (début 2000, 23 % de la population éprouverait un sentiment de déclassement dans l'emploi occupé2).
Cete évolution s'accompagne, ou initie ?, deux évolutions en sens contraire dans le monde du travail et dans le monde de l'éducation :
Monde du travail
Monde de l'éducation
Début du XXème siècle
Revendication d'égalité radicale, d'abolition du salariat
Élitisme républicain, sélection des meilleurs
Fin du XX ème siècle
Égalité relative défense des statuts de métiers
Revendication d'une égalité d'accès pour tous
Il y a là sans doute, selon nous, plus qu'une coïncidence, une relation causale. Lorsque que l'ascenseur social fonctionne encore, la revendication d'un égalitarisme des emplois tout en acceptant une sélection des meilleurs est possible, l'égalité est vue comme un alignement vers le haut. Quand l'ascenseur social ne fonctionne plus, les salariés défendent leur situation acquise, et le système scolaire ne peut plus justifier la sélection. Le systèle d'orientation revinet donc aux idéaux de l'égalitarisme, en décalage avec la réalité du marché du travail. Par aileurs, la sélection revient par le biais de la lutte contre les discriminations, avec les filières ou sélections au sein des établissement de zones sensibles (le cas emblématique étant celui de Sc. Politiques).
Trois conceptions de la liberté
La conception de l'égalité est en fait isue de nos conception de la liberté, les deux sont indissociables. Ainsi, en Angleterre (et aux Etats-Unis) la notion de liberté est fondée sur l'idée de la propriété, du sol, et de soi. Cette conception a été formalisée par Locke3 dès la fin du XVII ème siècle : " il faut entendre ici [...] le droit de propriété qu'on a sur sa personne et sur ses biens ". Pour Locke, l'homme est, " dans l'état de nature, le seigneur absolu de sa personne et de ses possessions, égal au plus grand ". Soulignons ici le dernier terme de la phrase, égal au plus grand. La référence est la possession, non la comparaison à l'autre4.
La propriété est la source de la liberté, d'autant plus que dès avant la révolution industrielle, l'homme libre n'est pas attaché au sol contrairement au serf de France5 : " l'homme libre peut quitter son seigneur à son gré, du moment qu'il lui rend ses biens que celui-ci lui a confiés. [...] Il existe certes une notion de noblesse, mais elle demeure plutôt floue et n'est pas liée à celle de liberté ". " Sur le sol anglais le simple freeman en droit6, ne se distingue pas du gentilhomme7 ".
Les allemands considèrent au contraire cette " liberté de marché " comme contraire à la liberté : " la communauté de marché ne connaît pas la coercition formelle en vertu de l'autorité personnelle. Elle la remplace en produisant une forme spéciale de situation coercitive qui est appliquée [...] sous la forme impersonnelle du caractère inévitable des lois purement économiques. [...] Un ordre juridique qui contient très peu de normes prohibitives ou impératives et énormément de'droits à la liberté' et de'pouvoirs de droits' peut en pratique conduire non seulement à une intensification quantitative et qualitative de la coercition en
Cette conception des rapports de travail surdétermine le fonctionnement du système scolaire et de l'orientation. C'est pourquoi il ne nous semble pas possible de réformer l'orienation, ni le système des filières, sans changer sans doute d'abord les rapports de travail. Ceux-ci produisent la structure de l'orientation, qui elle même contribue à reproduire les rapports de travail. Mais il faut alors réfléchir collectivement, relire notre histoire et expliciter nos choix en faveur de l'égalité et de la liberté. Un travail d'analyse, presque de psychanalyse populaire. François Furet avant commencé à relire et réinterpréter l'histoire de la révolution en la qualifiant de bourgeoise. Pour P. d'Iribarne, c'est de révolution inachevée dont il faut parler, et parler ensemble. Ne serait-ce pas un object de débat démocratique plus pertinent qu'un nouveau débat sur l'école dont non voit bien qu'il ne peut aboutir ?
Pour agir sur la réalité de la société, il faut agir sur son imaginaire et ses mythes. N'agir que sur le réel apparent condamne, a contrario, à n'avoir d'influence qu'imaginaire....
Notes :
Voir Philippe d'Iribarne, Le chômage paradoxal, PUF, Paris, 1990, et Arnaud du Crest, Les difficultés de recrutement en période de chômage, Ed. L'Harmattan, Paris, 2001.
Philippe d'Iribarne, L'étrangeté française, Seuil, Paris, 2006. Toutes les citations sont extraites de cet ouvrage.Nos commentaires sont indiqués en italiques.
CAS, Note de veille n° 20, 17 juillet 2006