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Jean-louis Bischoff

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Jean-louis Bischoff

Descriptif auteur

Habilité à diriger des recherches (Université d’Artois), docteur en philosophie (École Pratique des Hautes Études), diplômé de l’institut de formation pour l’étude et l’enseignement des religions (IFER), Jean-Louis Bischoff est directeur scientifique de l'institut d'études et de recherche de la Fédération Européenne des Ecoles (FEDE)
Intervenant dans différentes écoles d’arts appliqués à Paris et chercheur associé à l'université d'Artois ses cours et ses recherches portent sur la philosophie des religions, la recomposition du croire et du sacré dans la pop-culture contemporaine et sur la philosophie de l’éducation.
Né en 1960.

Structure professionnelle : Fédération européenne des écoles; 25 rue Drouot 75009 Paris ,Ecole Française de la Bijouterie (UFBJOP) , université d' Artois

Titre(s), Diplôme(s) : Docteur en philosophie, habilité à diriger des recherches

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AUTRES PARUTIONS

Préface de "L'atlas de chirurgie esthétique du sexe de l'homme", Jacques Derhy, éd Springer, Paris, 2008.
Zoom sur la pop-culture, éditions Weka, 2013.
Comportements émergents et espaces culturels, éditions Weka, 2014.
Classe Mondiale, Mythes et légendes du football, Hachette, Paris, 2014.

LES ARTICLES DE L'AUTEUR

Le statut du moi dans le corpus pascalien Spécificités et actualité de la visée pascalienne

Ce texte est la reprise développée d'une conférence donnée à Orléans le 12 mars 2007, lors de la 23e session de l'Institut pour l'Etude et l'Enseignement des Religions (IFER). Le style oral a néanmoins été maintenu.

Entamer considérablement l'image d'un Pascal triste, janséniste, misanthrope et politiquement conservateur ; faire surgir en lieu et place un philosophe humaniste et rebelle ; c'est le chantier qui est le mien depuis une quinzaine d'années. Je ne vais pas pouvoir aujourd'hui vous restituer les résultats de ma modeste contribution à la science pascalienne.Vous les trouverez dans une thèse soutenue aux Hautes Études, dans un ouvrage intitulée Dialectique de la misère et de la grandeur chez Blaise Pascal et dans une série d'articles dont l'un est intitulé L'humanisme pascalien expliqué aux designers. Aujourd'hui je vais me contenter de rapporter ma petite contribution à la thématique de la semaine ; d'où une première interrogation : qu'est ce que la modernité ? Je réponds banalement : du point de vue philosophique, la modernité c'est l'émergence d'un sujet acteur et créateur de ses valeurs, c'est l'émergence d'un sujet conscient de soi ; en d'autres mots la modernité est toute entière commandée par la question du moi ; "si j'étais moi" le célèbre cri de Montaigne pourrait en ce sens être considéré comme le credo de la modernité tout autant que le trop célèbre "je pense donc je suis" cartésien. On devine alors la formulation de ma problématique du jour : quel est le statut du moi dans le corpus pascalien ? Pour répondre à la question, je vais répondre en quatre temps.
D'abord je montrerais que le moi pascalien est primordialement introuvable ; ce qui va apparaître ici est que le moi introuvable confronte l'homme du grand siècle à un vide inquiétant.
Ensuite je montrerais que l'homme essaie de combler ce vide de manière méprisable ; d'où la deuxième partie de l'exposé consacré au moi haïssable. En un troisième temps, je montrerais comment et pourquoi le vide vécu d'abord négativement peut être éprouvé positivement ; c'est le moment que j'intitulerais le moi réconcilié.
Enfin dans une quatrième et ultime partie, j'essaierais de faire saillir l'actualité du projet pascalien.
Les objectifs de ma contribution sont clairs :
j'aimerais traduire les notions pascaliennes dans le langage contemporain de la philosophie des religions,
je souhaiterais faire apparaître que la perspective du penseur de Port-Royal peut éclairer l'attitude du chrétien contemporain.

I - "Le moi introuvable"
Le moi comme élan vers la grandeur
Le moi apparaît d'abord chez Pascal comme introuvable ; un long fragment nous le dit clairement : "qu'est ce que le moi ; où est ce moi" se demande t'il dans le fragment 688. Cette question qui ne cessera de hanter la pensée moderne, Pascal la prend en charge de la manière qui suit : "celui qui aime quelqu'un à cause de sa beauté, l'aime t'il ? Non car la petite vérole, qui tuera la beauté sans tuer la personne, fera qu'il ne l'aimera plus. Et si on m'aime pour ma mémoire, m'aime-t-on moi ? Non car je puis perdre ces qualités sans me perdre moi-même ; où est donc ce moi, s'il n'est ni dans le corps, ni dans l'âme ? Et comment aimer ce corps ou l'âme, sinon pour ces qualités, qui ne sont point ce qui fait le moi puis qu'elles sont périssables ; car aimerait-on la substance de l'âme d'une personne abstraitement ; cela ne se peut et ce serait injuste" (ibid). Où est donc ce moi introuvable et qu'est-il s'il ne d'identifie ni avec les qualités du corps ou de l'âme, ni avec une substance abstraite ? Une phrase de Sartre extrait des Écrits de jeunesse nous aide à prendre en charge l'interrogation : "j'ai cherché mon moi et je ne l'ai pas trouvé". Sartre peut chercher ; dans son projet, comme dans celui de Pascal, le moi est bel et bien introuvable car en réalité il est mouvement permanent, élan vers la grandeur : "nous avons un instinct qui nous élève et que nous ne pouvons réprimer" (633) ; "l'homme passe infiniment l'homme" (131) écrit le génie de Port-Royal. Qu'est ce à dire précisément ? Ceci : pour Pascal, le moi n'est pas donné ; il n'est pas une chose toute faite que

Notes :
1. Pour une excellente introduction à la notion cf. Hélène Michon, L'ordre du cœur, Philosophie, théologie et mystique dans Les Pensées de Pascal, Honoré Champion, Paris, 1996, p. 278-306.
2. Nous ne signifions pas ici une synonymie parfaite entre le grund d'Eckhart et le cœur pascalien ; nous voulons simplement dire qu'un chantier visant à rapporter (différences / ressemblances) les deux notions, serait sans doute très intéressant.
3. Sur ce point, nous renvoyons à notre ouvrage Dialectique de la misère et de la grandeur chez Blaise Pascal, l'Harmattan, Paris, 2001.
4. Lors d'une conférence au Lycée Saint-Jacques-de-Compostelle de Poitiers (février 2003), Albert Rouet précise l'impossibilité d'enfermer l'homme dans une définition, dans une seule situation, dans une seule culture ou dans une seule manière de vivre, en faisant travailler la notion de pèlerinage et en convoquant la célèbre phrase pascalienne selon laquelle "l'homme passe infiniment l'homme". Le texte de cette conférence est disponible auprès de l'Association des Amis des Chemins de Saint-Jacques. En voici un extrait : "enclore (l'homme) dans un cadre (ou une définition) duquel il ne devrait jamais sortir, ce serait du totalitarisme. Ce peut être du totalitarisme politique, ce peut être le totalitarisme du confort, des habitudes" (p.6).
5. Œuvres complètes, Seuil, Paris, 1963.
6. In La France est-elle païenne ?, sous la dir. de Xavier Durand, éd. de L'atelier, Paris, 2001, p. 81.
7. On définit l'humaniste comme une foi témoignant d'un optimisme dans les capacités naturelles de l'homme
8. Vision et silence dans la poétique juive - Demain la seule demeure, éd. L'harmattan, 1999, p. 32 ; les lignes en italique sont des propos de Guershom Sholem (Le messianisme juif, Paris, Calmann-Lévy, 1974, p. 330). Ces lignes sont reprises par Vigée ; il les commente ensuite des p. 32 à 36. Le silence auquel il est fait allusion, n'est pas le silence habité de nos préoccupations, de nos ressentiments, un silence fou où notre tête tourne et retourne, jusqu'à l'obsession, problèmes et contrariétés. Le silence auquel Vigée pense est une expérience où se glisse, en nous, plus grand que nous, où, au-delà des mots, se dit la force de vivre et d'aimer, de continuer et de pardonner, de faire confiance et de risquer.
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La lecture / Expérience Expérience de la lecture et lecture de l'expérience

Ce texte est extrait d'une conférence donnée à l'Institut de Formation pour l'Etude et l'Enseignement des religions (IFER de Dijon) en novembre 2003. (Seizième session de formation)

Introduction

"Pascal a décidé de ma vie ici-bas et peut-être de mon éternité... ; c'est l'écrivain à qui je dois le plus et qui m'a le plus marqué", écrit F. Mauriac dans un texte intitulé "La dette envers Pascal" (in Pascal, Textes du tricentenaire, Fayard, 1963, pp.338-339). Sa déclaration soulève d'emblée une question : Que s'est-il passé lors du rendez-vous entre Mauriac, et les écrits Pascaliens ? G. Steiner prend en charge mon interrogation "Qu'est-ce que lire un classique ?" se demande t' -il dans Errata (Folio, Gallimard, p.37). Et de poursuivre : "Je définis un classique comme une forme signifiante qui nous lit plus que nous le lisons... le classique nous demande : es-tu prêt à agir sur les potentialités d'être transformés ?". Ainsi interprété, l'acte de lire cette mise en présence d'un lecteur et d'un texte aurait deux caractéristiques : primo, il serait enraciné dans une passivité primordiale ; secundo, cette passivité se déplierait néanmoins sous le mode d'un acte, d' une transformation émanant du lecteur lui-même ; la lecture serait donc une sorte de passivité active. Il faut le dire sans détour : l'acte de lecture, appréhendé de la sorte, entre en consonance avec la définition heideggerienne de l'expérience. Sous la plume du penseur allemand (Acheminement vers la parole, Tel, Gallimard, 1976, p.143) nous lisons en effet "faire une expérience avec quelque chose, un homme ou un Dieu, cela veut dire, le laisser venir sur nous, qu'il nous tombe dessus, nous renverse et nous transforme" ; dans l'approche heideggerienne de l'expérience, on retrouve les idées de passivité, et de transformation. Fort de la proximité de son et de fond entre les affirmations steinerienne et heideggerienne, je vais, pour ma part, tenter de forger la notion de lecture/expérience. D'où mon hypothèse de lecture : Mauriac, confronté au texte pascalien, a vécu une "lecture expérience" ; la relation Pascal/Mauriac n'est donc qu'une illustration de la lecture/expérience. Mais qu'est-ce que la lecture/expérience ? Comment établir avec précision le statut de cet acte ? Pour répondre à mon ultime question, je vais, en un premier temps, après avoir ausculté la notion heideggerienne d'expérience, scruter la dimension passive de cet acte de lire. Ce qui va émerger ici est qu'il apparaît d'abord pour le lecteur comme un appel. Fort de l'analyse selon laquelle, l'appel entendu suppose la collaboration de l'appelé, je vais, dans un second temps, faire surgir le caractère dynamique, de cette lecture. En troisième lieu, après avoir montré que la disponibilité est sa condition de possibilité, j'aurais à approfondir la détermination conceptuelle de ma notion en l'envisageant sous le régime de l'émotion.

Faire apparaître que la lecture/expérience bouleverse mon existence de fond en comble en reconfigurant le champ de mes possibles est la tâche ultime que je m'assigne.

La lecture comme appel

L'expérience selon Heidegger, n'est rien d'autre que l'épreuve de l'altérité ; c'est la thèse que je vais d'abord défendre.

Expérience et altérité

Le terme expérience vient du latin experiri, éprouver. Le radical est periri où l'on trouve la racine indo-européenne per qui s'actualise en latin dans le mot periculum (danger). Etymologiquement, l'épreuve, l'expérience noue des liens avec l'idée de danger. L'allemand retrouve la liaison : dans le mot Gefahr (1) (péril) on a la racine "FAR" présente dans le mot Erfahrung (expérience) ; mais il y ajoute un supplément de sens ; dans le mot Erfahrung est en effet également présente l'idée de traversée, faran en ancien allemand, d'où est issu fahren (transport). Ce faisceau de significations n'est pas aussi disparate qu'il semble l'être ; en effet dans une traversée, ne fait-on pas irrémédiablement l'épreuve du danger ? Fort de notre brève enquête on comprend que p

Notes :
1. Nous suivons ici les instructions données par Claude Romano (L'Evénement et le monde, P.U.F, Paris, 1998, p.196.
2. Pour une magistrale interprétation de Don Quichotte, effectué à partir du couple chèm / cham nous renvoyons au chapitre 1 (pp.83 -90) de l'ouvrage de Marc-Alain Ouaknin (Bibilothérapie, Seuil, Paris, 1994) ; ce sont ces pages que nous résumons.
3. Cette distinction m'a été suggéré par Marc-Alain Ouaknin ; voir par exemple Invitation au Talmud, (pp.76-83, Flammarion, 2001), Bibliothérapie (pp.241-247) et même Lire aux éclats (pp.131-137, Seuil, 1994).
4. Nous rencontrons ici ce que Ricoeur appelle l'identité narrative (cf Temps et Récit, Seuil, 1984). Sans entrer dans la richesse et la complexité des analyses de l'auteur (ce qui dépasserait largement le cadre de nos préoccupations présentes, disons simplement ici que pour Ricoeur interpréter c'est s'interpréter, c'est s'inventer en inventant.
5. Se reporter au chapitre II du second livre (pp.331-337) de l'ouvrage de Ouaknin (Bibliothérapie) qui ici nous sert de guide.
6. Sur ce point, nous renvoyons à l'ouvrage de Michel Lacroix intitulé Le culte de l'émotion (pp.159-174, Flammarion, 2001).
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