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Richard Abibon

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Richard Abibon

Descriptif auteur

Je me consacre à la transmission de la psychanalyse et l'élaboration d'une théorie fondée sur la pratique, articulant transfert et analyse des rêves.

73-77 : études de Psychologie à l’université de Besançon. Formation d’Animateur.
Maîtrise de psychologie en juin 77.
DEA de Sciences de l’Education à Paris VIII en juin 78.
Oct. 78, avril 86 : psychologue au Centre Hospitalier spécialisé de Lorquin (57 790, Moselle). Enfants et adultes.

Diplôme d’Etudes Supérieures Spécialisées en Psychopathologie, en juin 79

Juin 83 : Doctorat en Psychologie à l’université Louis Pasteur de Strasbourg. Thèse : « Psychose et Féminité », sous la direction de Jean-Pierre Bauer.

Avril 86, novembre 90 : Psychothérapeute vacataire aux CMPP de Pontarlier, Morteau (Doubs), Luxeuil (Haute-Saône). Formateur (vacataire) de personnels sociaux à l’IRFA (Besançon).
Décembre 90, mai 98 : Psychologue au Centre Hospitalier Spécialisé de La Valette, (23 320, St Vaury). Enfants, adultes, notamment autistes.
Juin 98, février 2000 : Psychologue à l’Etablissement Public de Santé Charcot, (78). CMP enfants et Hôpital de Jour adolescents.
Mars 2000, jusqu’à présent : Psychanalyste au Centre Henri Duchêne (Aubervilliers) de Ville Evrard et chez moi.

Structure professionnelle : 64 rue Emeriau 75015 Paris

Titre(s), Diplôme(s) : dess psychopathologie ; doctorat de psychologie

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3 livres

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AUTRES PARUTIONS

-« DE l’ « Autisme », Topologie du Transfert dans l’exercice de la Psychanalyse ». Tome I et II juin 99 / Juin 2000 ; EFEditions, 6 rue Fizeau, 75015 Paris.. ou chez l’auteur.
-La bouteille à l’ancre, roman, sous le pseudonyme de Léon Parkeur
EFEditions, 6 rue Fizeau, 75015 Paris. ou chez l’auteur.
- le rêve de l'analyste, 2008 éditions le manuscrit.

LES CONTRIBUTIONS DE L’AUTEUR

Articles de presse

Le rêve est-il une psychose de courte durée ?

LES ARTICLES DE L'AUTEUR

l'impossible : réel de la physique ou Réel de la psychanalyse?

cet article est une version écourtée d'un des chapitres de mon livre "Abords du Réel". cette version est parue dans la revue "Chimères" d'octobre 2015

Science et religion interrogent toutes deux l'origine : pour l'une, ce sera le big bang, pour l'autre le père céleste. La troisième voie qui tente de donner une réponse à l'origine : ce sera celle de chaque sujet, source à laquelle il boit pour étancher sa soif des origines du monde.
Les expériences de pensée

Pour Galilée un raisonnement juste vaut mieux que mille expériences. Un raisonnement juste, c'est ce qu'on appelle une "expérience de pensée". "Il s'agit d'imaginer des situations inaccessibles en pratique mais capable de révéler ce qu'une théorie a vraiment dans le ventre, d'expliciter ses implications les plus radicales, soit faire remonter à la surface ses contradictions internes" (Etienne Klein, sur France culture, le 10 janvier 2015)

Aristote disait que les corps plus lourds tombent plus vite que des corps plus légers. Salviati invente donc une expérience de pensée visant à réfuter cette loi : imaginons que l'on attache par une corde une petite pierre et une grosse. L'ensemble étant plus lourd que chacune des deux, il devrait tomber plus vite. Mais, la petite pierre tombant moins vite, elle devrait rester à la traine et freiner la chute de la plus grosse. Par conséquent, l'ensemble devrait tomber à la fois plus vite et moins vite. Contradiction qui réfute la véracité de la théorie aristotélicienne.
Galilée change donc la loi pour éviter le paradoxe : les deux corps doivent choir à la même vitesse. C'est l'expérience de pensée qui a fait changer la loi et non l'expérience de la chute de corps jetés du haut de la tour de Pise. Du moins est-ce la thèse de Koyré : Galilée n'aurait fait que des expériences de pensée.
Mais comment Galilée change-t-il la loi dans ce sens là ? C'est que, il faut quand même faire appel à quelques observations. On constate que lorsqu'on fait tomber une boule de plomb et une boule de bois dans de l'eau, l'une va tomber plus vite que l'autre. Le responsable de cette différence est la résistance du milieu. L'air étant moins résistant que l'eau, la différence entre les vitesses sera moindre. Mais il résiste quand même. Le raisonnement théorique, l'expérience de pensée, est alors la suivante : si la différence entre les vitesses dépend de la résistance du milieu, alors, moins le milieu sera résistant, moins la différence sera grande. Et, en arrivant à la limite, c'est-à-dire un milieu vide, absolument non résistant, les corps tomberont à la même vitesse, quelle que soit leur masse. Ce passage à la limite, voilà le réel comme impossible car, à l'époque de Galilée, obtenir un vide sur terre était impossible. Le résultat juste dépend uniquement de la justesse du raisonnement.

On voit qu'il y a deux manières de mettre en œuvre l'impossible :
- la contradiction : c'est l'expérience des deux pierres liées. La contradiction est interne à la logique de la théorie, mais elle est aussi contradictoire avec l'observation commune.
- le passage à la limite : c'est la découverte de la résistance du milieu entrainant une conformité du réel à la loi seulement à une limite impossible à atteindre en pratique, mais théoriquement plus juste.

Autrement dit : ce qui est ici appelé "réel", c'est le pur symbolique, comme limite de la réalité. Et, à la limite, la mathématique, pur symbolique, c'est le réel. Où l'on retrouve la parole de Galilée : "le réel s'écrit en langage mathématique". Or, la mathématique, c'est ce qui a le moins à voir avec la réalité : elle ne s'appuie que sur sa logique interne sans confrontation avec l'expérience sensible. Et pourtant les physiciens constatent chaque jour la puissance de la mathématique à prédire le réel. D'où l'idée que le réel et la mathématique ne font qu'un, "réel" étant pris au sens de "réalité physique".

Ce qui prouve le "réel", c'est, a contrario, ce qui s'appuie sur la contradiction interne d'une théorie fausse. Dans ce dernier cas, ce n'est pas que la contradiction soit impossible : elle est tout à fait possible puisqu'on peut, à partir d'Aristote, tenir un discours parfaitement repéré sur les deux pierres liées. Simplement, ce discours aboutit à une contradiction et, d'un point de vue logique, on s'interdit la contradiction. Dans cette approche aussi, il s'agit de la logique interne du symbolique. Quant à la contradiction d'avec l'observation commune, elle confronte le théoricien dans sa méfiance pour les expériences pratiques. Tout le développement de la physique depuis cette origine, autant en termes de relativité que de théorie quantique, va d'ailleurs dans ce sens : ce que l'on découvre du réel est parfaitement contre-intuitif, contre l'expérience sensible.
La théorie quantique va même jusqu'à nous obliger d'admettre la contradiction dans le champ du réel (réalité).
Limite des expériences de pensée : le recours à l'expérience dans la réalité.

Mais il se trouve que la théorie quantique repose sur quelques observations de base, dont celle-ci. Lorsqu'on fait passer une onde, par exemple la lumière, à travers un filtre ne comportant que deux trous, c'est comme si on transformait une source de lumière unique en une source double de même longueur d'onde. Ce qu'on constate sur un écran recevant ces ondes, ce sont des franges d'interférences : une source interagit sur l'autre et au lieu d'apercevoir un beau cercle, on voit des hyperboles. Comme on le sait, si un cercle à un centre, l'hyperbole en a deux. Jusque-là, je raisonnais avec la théorie ondulatoire de la lumière. Si je me réfère à présent à la théorie quantique, la lumière est alors composée de quantum d'énergie soit, des particules, les photons. Je peux alors filtrer ces photons de façon drastique, jusqu'à n'en laisser passer qu'un seul. A ce moment là, on observe toujours les franges d'interférences. Donc, la théorie quantique est juste : je peux compter les photons, je peux même compter celui qui passe seul. S'il est seul, il passe par un trou ou par l'autre mais pas par les deux. Or, on constate les interférences, comme s'il était passé par les deux trous en même temps. Donc la lumière est une onde et non un faisceau de particules. En fait, selon les moments de l'expérience, les deux théories sont vraies. Or, elles s'excluent logiquement l'une l'autre : la contradiction entre deux théories est mises en évidence par une expérience pratique.
Jusqu'à ce jour, on ne sait toujours pas quoi faire avec cette contradiction.

Ce qui était prévu par des calculs, soit, du pur symbolique, il est cependant nécessaire de le vérifier par des observations. On a vraiment trouvé par l'observation le Neptune théorique prévu par les calculs de Le verrier. Dans le grand cyclotron de Genève, on a réellement trouvé le boson prévu par les calculs de Higgs, qui datent des années 30. Et aujourd'hui une théorie qui marche bien nous permet de nous rendre compte que les galaxies ne tournent pas à la bonne vitesse compte tenu de la masse observée. Donc : soit toute la théorie est à revoir, soit il existe une "matière noire" que nous n'avons encore pas détectée. Mais au moins, ces calculs nous indiquent ce qui ne va pas dans la relation à la réalité observée, et donc, par où il faut chercher. Dans ce cas seulement le réel de la physique est identique au Réel de la psychanalyse : il n'y a pas de représentation de cette matière noire. Mais c'est pour l'instant : on peut raisonnablement penser que, comme pour le reste, on trouvera une représentation de cette matière noire soit comme telle, soit en changeant la théorie.
J'en arrive donc au Réel de la psychanalyse tel que je le définis : c'est l'impossible certes, mais l'impossible à symboliser. Ce qu'on n'arrive pas à symboliser n'a pas de représentation. Comme pour la matière noire, on ne sait donc pas de quoi on parle. On sait juste qu'il y a "quelque chose" sur quoi on se heurte, mais on ne sait pas le décrire. Ce n'est en aucun cas un vide ou un manque. Par contre, ça manque de représentation, ce qui n'est pas du tout la même chose. On voit dès lors la différence avec l'impossible tel qu'il est utilisé dans les expériences de pensée de la physique : ces dernières requièrent des représentations articulées et l'impossible est assimilé à la contradiction.
Le Réel de la psychanalyse tel que je l'ai découvert par mes expériences oniriques n'est jamais le réel de la physique pris comme réalité matérielle de notre univers. L'expérience de l'analyse des rêves a été déterminante dans cette découverte. L'expérience de pensée a consisté à s'être dégagé de la fascination qu'engendre la rhétorique du maître pour repérer les contradictions internes à sa théorie, comme l'a fait Galilée pour la physique d'Aristote. La principale étant ce réel défini comme impossible à symboliser, et pourtant assimilé à la réalité, qui elle, l'est. J'en rends compte par le menu dans mon livre à paraître, "Abords du Réel". Mais cette expérience de pensée théorique, je n'ai pu la faire qu'après ma propre expérience onirique, qui m'a contraint à distinguer ces deux réels. C'est par là que commence mon livre. L'expérience onirique, dite aussi par Freud voie royale de la découverte de l'inconscient, voilà ce qui, comme en physique, nous sort de la pure expérience de pensée théorique. Le rêve, c'est le laboratoire de la psychanalyse.
De quoi est-il donc fait, ce Réel que j'ai découvert et distingué dès lors d'une majuscule ? Des perceptions qui se sont inscrites à l'orée de la formation de la psyché et qui n'ont pas été écrites, c'est-à-dire pas encodées selon les lois du langage. Je pense qu'elles correspondent aux signes de perception de Freud. Telle est l'autre différence d'avec le réel de la physique : en même temps qu'il est hors du symbolique, ce dernier est extérieur à nous, tandis que le Réel de la psychanalyse est intérieur.

La physique n'est pas non plus l'observation pure. Elle ne consiste pas à relever tout ce qu'on voit sur un calepin. Néanmoins, la base expérimentale est indispensable : expliquer ce qui est par l'impossible est une formule qui va beaucoup trop loin. L'expérience de pensée est "un des moyens". A côté, il faut des expériences dans le monde de la réalité, et aussi les mathématiques qui sont venues se greffer en intermédiaire entre la pensée et la réalité. Le tissu scientifique s'étoffe de toutes ces choses.
Freud indique précisément ce qui, dans sa pratique, entre en discordance avec sa théorie, pour expliquer pourquoi il change de théorie. Pour mémoire, l'article "Au-delà du principe de plaisir" qu'il inaugure par l'énumération de tout ce qui ne colle pas avec son principe de plaisir qui faisait jusqu'à présent le socle de sa théorie. C'est là qu'il énonce le jeu du fort-da. L'enfant, en jetant ou en détruisant ce qu'il ne comprend pas, la Chose, fait monter sur scène, à la place, la représentation. Le symbolique se heurte au Réel : il s'agit de ce qu'on ne peut pas symboliser, et qui n'a donc rien à voir avec les maths, puisque les maths sont le symbolique à l'état pur. Ce qui s'en symbolise n'entame pas le Réel. Les représentations s'agglutinent en réseau au-dessus de cette inscription primordiale impossible à effacer.
Le réseau, la machine, dans ce registre, c'est celle qui produit des représentations : c'est le symbolique certes, mais qui n'existe pas en dehors d'un sujet qui en manipule les rouages autant qu'il se trouve manipulé par eux. La proportion de l'un et de l'autre détermine alors ce qu'il en est du ou des symptômes, proportion que l'on pourra faire varier dans le cadre d'une analyse. La machine, dès lors, je m'en suis aperçu dans mes propres rêves, n'est rien d'autre qu'une représentation du sujet. C'est elle qui se tient au bord du Réel, synonyme de son échec à l'entamer. Elle inclut la castration au cœur même de son mécanisme.
Impossible, le rapport sexuel ?

Je soutiendrais avec Lacan que le rapport sexuel est impossible, non pas de pure théorie, mais de mon expérience d'analysant. Celle-ci, obtenue à travers l'analyse de mes rêves, me dit que c'est la symbolisation du sexe féminin qui est impossible (et non la femme qui n'existe pas). Ou plutôt - et ce n'est pas contradictoire -, cette symbolisation se fait par le biais de la castration. Les enfants s'imaginent la différence des sexes comme cela, qu'ils soient filles ou garçons. C'est l'explication - théorique - qu'ils se donnent pour expliquer ce qui pour eux reste impossible à expliquer : sur le ventre féminin, ça manque. Quoi ? Le phallus. Les explications anatomiques scientifiquement prouvées données par la suite (ovaires, utérus, vagin, caractère interne du sexe féminin) n'effaceront en rien cette conviction profondément refoulée. C'est de là que découle, non pas l'impossible, mais l'interdit posé sur le rapport sexuel, car du fait de l'explication par la castration, nous sommes entré dans le monde symbolique. La castration s'accompagne en effet de sentiment de culpabilité : si j'ai été castrée, si je risque la castration, c'est parce que je n'aurais pas respecté un interdit, nommément : l'interdit de l'inceste. La confrontation au sexe de l'autre (c'est-à-dire : le rapport) va entrainer : pour le garçon la peur de perdre son phallus, et la nécessité de se prouver qu'il est toujours là, et qu'il n'est donc pas coupable ; pour la fille la honte d'avoir été castrée, d'où ses dérobades continuelles et son souci de vengeance envers un sort injuste incarné par la gent masculine qu'il va falloir castrer d'une manière ou d'une autre pour rétablir l'égalité et la justice, car elle, la fille, n'a pas été coupable. D'où, encore, pour les garçons, de par les nécessités des preuves de phallicité, le désir du rapport sexuel avant tout - ce qui peut entrainer l'amour de celle qui l'octroie - et pour les filles, de par les nécessités de preuve d'être susceptible d'amour malgré la mutilation, le désir d'être aimées - ce qui peut entrainer le désir de rapport sexuel à condition que l'autre l'aime. L'inversion des priorités entre sexe et amour rend le rapport, non pas impossible puisque parfois il se produit, mais pour le moins difficile, chacun se trouvant "interdit" au sens de stupéfait devant le désir de l'autre, incompatible avec le sien.
Le rapport sexuel, pas plus que l'acte, ne doit donc au Réel et à l'impossible que par conséquence de l'imaginaire de la castration, du fait de la symbolisation de la différence sexuelle par ce biais. Par contre, il y a un rapport sexuel qui est non pas impossible puisqu'il a eu lieu, mais impossible à se représenter : c'est celui qui m'a conçu, la scène primitive. Et comme je l'ai dit plus haut, ce n'est pas ce qui empêche d'imaginer des multitudes de représentations substitutives.
Qu'est-ce qui me permet d'avancer tout cela ? La pratique de l'analyse des rêves. Ici, la meilleure des théories ne suffit pas, car il s'agit de faire la théorie des théories sexuelles infantiles. Ces dernières ne sont pas accessibles directement comme un "réel" extérieur. On ne peut donc pas faire confiance au sensible, en effet. Mais on n'a pas d'autres moyens que de faire confiance au récit d'un rêveur qui devient sujet en le confiant à un autre. Et la seule protection contre les projections interprétatives de cet autre, c'est de faire aussi confiance au rêveur pour l'interprétation. C'est pourquoi j'ai travaillé sur mes rêves et non sur ceux des autres. J'ai consacré trois livres à l'exploration de ces rêves pour montrer au lecteur comment, pas à pas, cette conviction s'est installée. Je l'ai fait pour donner à la communauté des lecteurs un moyen de critique et de réfutation de ce que j'avance au lieu de simplement asserter le "fait" comme je le fais ici de manière théorique. Ma "preuve" est dans un autre ouvrage. On peut en lire des extraits et bien plus encore sur ma page Face book, dont je fais le réceptacle de mes expériences de laboratoire nocturne. La réalité de l'expérience psychanalytique, c'est l'analyse des formations de l'inconscient, au premier chef, les rêves, les siens propres.
Peut-on exporter un mode de pensée d'un champ à un autre ?

La différence entre le physique et la psychanalyse, c'est que la physique se donne un objet en dehors d'elle-même tandis que la psychanalyse est cette pratique qui consiste à se prendre soi-même comme objet. Ce qui est un paradoxe car, par définition, l'objet est ce qui est "jeté devant" le sujet. Alors on peut dire qu'en jetant devant lui, c'est-à-dire derrière, en direction de l'analyste, ses paroles concernant ses fantasmes inconscient, il en fait des objets. Mais c'est surtout que, par ce processus, il devient sujet. Loin de "jeter devant" ses fantasmes les plus inconnus de lui-même, au contraire, en les parlant, il se les réapproprie dans son être de sujet qui s'étoffe de cet envers oublié. Il joue au fort-da avec ses représentations refoulées comme avec ce qui n'est pas représentation, le Réel. Les premières sont refoulées du fait même de la contradiction, les secondes échappent à toute description.
L'impossible dans le réel ne concerne que la contradiction. Il est impossible de soutenir des affirmations contradictoires. Mais, si affirmations contradictoires il y a, c'est que nous sommes dans le symbolique ! Il ne s'agit pas du Réel. Il ne s'agit pas non plus du sujet avec ses désirs, c'est-à-dire ses relations avec les autres. C'est plutôt l'observateur, avec tout ce qu'il emporte, sachant que l'enjeu reste l'objet, le dit-réel, c'est-à-dire la réalité. Lorsqu'on prend en compte l'observateur ou l'expérimentateur de cette façon, c'est toujours dans le but de le neutraliser. La connaissance recherchée est celle du réel, pas celle du sujet. La science se base sur l'exclusion du sujet, à l'envers de la psychanalyse dont le but est la naissance du sujet. Ainsi la psychanalyse n'est-elle pas une science. Est-ce à dire qu'elle peut alors, en théorie, tenir un discours pétri de contradictions, puisque c'est ce dont s'étoffe le sujet ? Oui à condition, comme en science, de les repérer et d'en extraire la valeur heuristique. Je considère qu'il s'agit de conserver, hors science, au moins l'esprit scientifique. Ce qui m'amène à poser ce paradoxe assumé : la psychanalyse n'est pas une science, et elle est une science.
Au lieu de prendre un autre sujet en objet d'expériences, la psychanalyse retourne véritablement le point de vue sur le sujet lui-même, le seul qui peut rendre compte de ce qui se passe en lui en termes, non plus objectifs, mais subjectifs. Par quoi on quitterait le domaine de la science. C'est le renversement inauguré par Freud : "La technique que j'exposerai dans les pages qui suivent diffère de celle des anciens par ce fait essentiel qu'elle charge du travail d'interprétation le rêveur lui-même ". Ce bouleversement est assimilable à celui provoqué en physique par la théorie de la relativité : je ne suis pas extérieur à ce que j'étudie, je fais partie du monde et ma position et ma vitesse déterminent le point de vue que je vais avoir sur le monde. Ainsi Einstein se voyait-il à cheval sur une onde électromagnétique. Tel un surfeur, le système des ondes autour de lui apparaît alors comme immobile.
Les sujets ont besoin de significations comme autant de points de repères où accrocher leur vie. C'est ce qu'on appelle donner du sens à sa vie, ce en quoi les sujets sont en quête. Que, philosophiquement, on puisse dire qu'il n'y en a pas, de sens - ce à quoi, philosophiquement, j'adhère - ne m'empêche pas d'avoir besoin de savoir d'où je viens pour savoir où je vais - ce que je ne peux découvrir que psychanalytiquement. Cela suppose, en deçà des signifiants que j'énonce, au-delà des signifiés que je peux produire, d'avoir besoin de retrouver les significations que j'avais refoulées, notamment ces significations fondamentales que sont l'Œdipe et la castration. Ce qui ne veut pas dire non plus qu'il faille y rester fixé.
Or, l'attention portée sur la pure énonciation, les processus de pensée et la logique - par exemple, la négation - revient à faire de celle-ci, paradoxalement, un retour sur le conscient de la réflexion philosophique, au détriment du dévoilement des contenus inconscients.

Freud nous a transmis cette découverte : l'inconscient ignore le temps et la contradiction. A charge pour nous de le vérifier sur notre divan. Il ne s'agit pas de le prendre pour une maxime, ça pas plus que le reste. Il est vrai que les contradictions internes sont extrêmement difficiles à soutenir. Elles sont la raison même de l'inconscient : soit l'une des représentations entrant en jeu dans la contradiction est refoulée, laissant à l'autre le terrain du conscient, soit les deux sont refoulées, et il ne reste dans le conscient aucune trace du conflit... sauf un symptôme.


Ce n'est donc pas parce que nous sommes dans la réalité que nous ne sommes pas dans le symbolique qui organise entre elles les images (acoustiques, visuelles, tactiles, gustatives, odorantes) qui nous viennent de ce monde.
Par contre le Réel, que je distingue par une majuscule de l'adjectif "réel" correspondant au substantif "réalité", c'est ce qui ne saurait se décrire, bien que sa présence se manifeste. Cette présence sans nom et sans image reste donc hors symbolique et hors imaginaire. Nous avons vu quels impossibles pouvaient surgir dans la réalité, des impossibles symboliquement repérés. Ce qu'il faut dire, par rapport à ce Réel, c'est qu'il est impossible à symboliser. On ne peut pas trouver de représentation pour en parler. Au fondement de ce Réel se trouvent toutes les perceptions qui se sont inscrites dans la mémoire mais qui n'ont pas trouvé écriture selon les codes de la langue dans laquelle nous avons été élevés. En psychanalyse, on peut tout dire. C'est possible. Ce n'est pas obligatoire, sinon ce serait contre-productif. On peut donc parler de tout ce à quoi on se heurte, que ce soit des impossibles de la réalité ou les interdits de notre vie psychique, celle-ci transcendant ceux-là dans la logique du rêve. Jusqu'à ce qu'on se heurte aux traces visibles ou audibles, mais indescriptibles des premiers mouvements de notre vie psychique. Là, bien que les informations apprises ultérieurement nous aident à fondre ces traces Réelles dans des images bien symbolisées (comme la castration), elles resteront néanmoins toujours impossibles à symboliser.

26/01/2015

Notes :
1 Voir, à titre d'exemple :
http://une-psychanalyse.com/souvenirs_anterieurs_au_langage.pdf

http://une-psychanalyse.com/papier_sulfurise_tordu.pdf

http://une-psychanalyse.com/Escalier_pour_le_transfert.pdf

2 Dans son schéma de l'appareil psychique au chapitre 7 de la Traumdeutung.
3 Ou sur mon site : http://une-psychanalyse.com
4 Freud, "Die Traumdeutung" GW II/III, p. 102 ; PUF p. 92
5 Y compris les différentes formes qu'on va s'ingénier à distinguer : la dénégation (Verneinung), le déni (Verleugnung), le renoncement (Verzicht), la forclusion (Verwerfung)…
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un rêve abordant le Réel

Citation :
C'est ce que j'appelle le Réel : traces de perceptions visuelles et sonores qui ne sont pas devenues représentations.

27 octobre, 00:42 · Modifié
rêve :
Je visite La Rochelle avec toute la famille. Rues en pente, fortifications … Cette famille c'est "quelques personnes familières" que je ne vois pas. Nous montons une colline au-dessus du port. Sur une placette, pas tout à fait en haut, un café. Pourtant sur la gauche, plus haut, je devine une terrasse arborée avec vue sur la mer. Ce serait un endroit idéal pour déjeuner. Il semble qu'il soit impossible d'y accéder directement. Il est possible que ce soit la terrasse de ce café tout proche. J'essaie de voir la carte afin de confirmer qu'il s'agit bien d'une restaurant. Il faut grimper sur le mur car c'est trop haut ; je grimpe, mais c'est pour constater que ce n'est pas la carte. Je rentre donc pour me renseigner. C'est un très grand café meublé de bois sombre. Beaucoup de gens sont attablés. La salle possède plusieurs recoins, comme si plusieurs salles étaient attenantes. Jetant un œil rapide, je ne vois pas comment l'une de ces salles pourrait donner sur la terrasse que je cherche.
Pour des gens attablés à côté de moi, le cuistot est en train de verser d'une poêle dans une assiette des petites boulettes… c'est totalement inconnu pour moi. Je vois ces boulettes de manière précise, mais je n'ai aucun mot pour ça. Là, à l'écriture il me vient fallafel ou tortellinis, mais alors de petits tortellinis bruns.
Je me rends donc compte que le restaurant est ici et qu'il n'y a pas de terrasse avec vue sur la mer.
Je me retrouve en voiture en train d'explorer la zone des quais. Je vois un resto en terrasse, cette fois devant le port, ça a l'air très luxueux. Je me dis, tiens, on va manger là. On va chercher les autres en même temps je me dis que c'était ridicule de se séparer.
Nous visitons les remparts. Ils sont assez minces, environ 30 cm de large, on ne monte pas par un escalier, mais un pan de mur ruiné assez vertical offre quand même la semblance de marches. Beaucoup de monde se presse là en file indienne pour monter. Il faut se tenir ferme avec les mains sur les marches du haut pour assurer la progression.
Au moment où je vais monter vers la "marche" du haut, je sens qu'on me retient le pied. Deux plaisantins en dessous, me retiennent alternativement un pied puis l'autre. Je leur dis de me laisser, la plaisanterie a assez duré. C'est comme si j'étais monté sur une table de café et qu'ils étaient attablés de part et d'autre ; mais cette table reste très étroite comme la muraille que j'escalade. Je dis :
"- Lâchez moi ! et l'autre me répond :
- ah, on aime bien jouer !
- mais ici y'a pas de jeu ! C'est dangereux.
- ah, on aime bien les jeux dangereux".
Et voilà que, non content de me retenir, ils impriment à ma jambe un mouvement de balancier à droite et à gauche ce qui fait que je me retrouve alternativement au-dessus de chacun des vides. Je risque vraiment de tomber et c'est très haut ! Je m'affole, je crie au secours ! Au secours !
J'avise alors un bouton rouge sur le bord gauche du lavabo (la table de café qui était le mur est devenue un lavabo). Je comprends que c'est une alarme. J'appuie avec le pied dessus ; alors ils me lâchent. Mon affolement a du les percuter un peu. Je monte alors un peu. Je jette un dernier regard derrière moi et je vois le serveur leur amener le plat que j'ai commandé, c'est-à-dire un "sacatin amilly". J'avais commandé ça quand j'étais à leur table pour tenter de m'échapper. Mais j'en ai plus besoin puisque je me suis échappé. Quand la police arrivera, je leur dirai qu'ils ont tenté de me faire tomber.
La terrasse arborée au-dessus de la mer est le pubis maternel : un endroit avec des plantations de poils qui surplombent un vide au-dessus de la mer, c'est-à-dire le sexe maternel. Évidemment qu'il est impossible d'y accéder ! Enfin, c'est plutôt interdit, mais dans le rêve, ça apparaît impossible. Or, il s'agit de se chercher un endroit pour manger. Il me semble que c'est bien archaïque : on dirait le nourrisson cherchant une satisfaction orale en même temps que sexuelle, puisqu'il lui faut la terrasse arborée.
Qu'est-ce qui me permet de dire que c'est archaïque ? Il faut grimper pour aller regarder la carte du restaurant : cela suppose que je suis trop petit pour y accéder normalement. La question de la nourriture apportée par un serveur revient à deux reprises. Dans le premier cas, je vois très bien ce que c'est, mais je n'ai aucun mot. Dans le second je ne vois rien, mais j'ai un mot totalement inconnu au vocabulaire français et qui ne m'évoque absolument rien. Je suis donc dans la situation du bébé dans sa chaise haute qui se fait servir et qui n'a pas les mots pour décrire les plats qu'on lui sert ou que l'on sert à table à côté de lui. J'ai pu voir des choses qui me sont restées en mémoire sans jamais être jamais liées à une représentation de mot, comme dans le premier restaurant. J'ai pu entendre des sons qui désignaient ces plats, mais je ne pouvais les relier à rien d'autre, ni à aucun visuel. Ce sons apparaissent donc tels quels, vraisemblablement déformés par mon écoute et par des années de mise au congélateur de la mémoire.
C'est ce que j'appelle le Réel : traces de perceptions visuelles et sonores qui ne sont pas devenues représentations. Mon bouquin qui vient de paraître explique comment ja'i été mis sur cette piste.
Les mots qui me sont venus à l'écriture ne sont que des tentatives approximatives d'en faire quelque chose, mais ce sont des mots d'aujourd'hui. J'en suis certain car, dans ma famille, on ne mangeait pas de fallafels, on ne savait même pas ce que c'était. Je n'ai connu ça qu'en arrivant à Paris à l'âge de 48 ans, par la fréquentation de mes amis juifs. Quant aux tortellinis, on n'en mangeait pas non plus chez moi. Je ne les ai connus que par l'intermédiaire d'une de mes petites amies, rencontrée à l'âge de 32 ans.
Qui sont ces plaisantins qui m'empêchent de grimper les remparts ? Qui m'empêchent de prendre mon pied ? Mes deux frères jumeaux, bien entendu ! Avec 11 ans de plus que moi, je sais qu'ils ont passé leur vie à me faire des crasses diverses et variées dictées par la jalousie. Ceci est l'indice d'un jeu (c'est ce qu'ils disent) où ils ont dû se renvoyer la balle, la balle étant moi qui craignait à tout instant de tomber. Même chose que pour les plats : je n'ai pas retenu la totalité de la scène car je n'avais pas les mots. J'ai du retenir le mot "jeu" associé à la panique face au vide, mot qu'ils ont dû répéter pour faire passer la pilule. Ils ont dû aussi jouer à me retenir un pied, puis l'autre, peu après l'accomplissement de mes premiers pas. J'ai dû crier pour qu'on vienne à mon secours. Peut-être m'ont-ils retenu un jour où ils étaient chargés de me faire manger et que je cherchais à toute force à leur échapper. J'ai souvenir de n'apprécier aucunement les repas. Je n'ai commencé à prendre plaisir à manger que vers l'adolescence. Avant, les repas me semblaient une corvée : manger était une obligation, pas un plaisir. Le seul plat qui était à ma convenance devait se trouver sur une terrasse arborée au bord de la mer ; mais ça, ça ne dure qu'un moment vite devenu interdit !
Voilà ce que je cherche à grimper, à la fin : l'objet de mon désir que la jalousie de mes frères interdit.
La même scène a pu se produire au-dessus d'un lavabo pour la même raison : un jour, ils ont dû recevoir la mission de me laver. Ce jour-là, j'ai dû désirer très fort qu'il puisse exister un système d'alarme sur le dit lavabo. Le rêve se charge de réaliser ce désir bien après coup. Il est possible aussi que cela ait été le prétexte à attouchements sexuels : le pied qu'ils m'empêchent de prendre, mais qui est pourtant évoqué, le bouton rouge, peut-être phallus de secours pour ne pas se laisser grimper. L'excitation sexuelle éveillée trop tôt aurait laissé des traces en creux : si je ne peux pas grimper, c'est eux qui grimpent. Si je ne peux pas me servir de ce phallus de substitution (l'alarme rouge) alors ça leur laisse le champ libre pour s'en servir. Le désir d'apparition de ce bouton rouge s'explique alors doublement.
Pourquoi La Rochelle ? Je venais de voir le dernier épisode de "Ainsi soient-ils", la série d'Arte. Le jeune curé homo s'est pris de passion pour les écrits de son vieux prédécesseur, écrits sur des cahiers d'écolier retrouvés au presbytère de l'église qu'il est chargé de liquider avant démolition. Il enquête et retrouve la trace de ce "père" à La Rochelle où il est devenu conducteur d'une énorme grue auto tractée, à peu près aussi grande qu'une église. Déception pour notre jeune curé, cet homme a perdu la foi, il est aigri, il ne veut plus entendre parler de son passé de religieux.
Peut-être que c'est aussi ce que je suis venu chercher à La Rochelle dans ce rêve : un père, mais un père qui m'aurait défendu contre l'emprise de ces frères, un père qui aurait fait la police. Avec sans doute l'illusion qu'il ne serait pas un rival interdicteur, lui. Il n'avait pas besoin de remplir ce rôle puisque mes frères s'en chargeaient fort bien

ce rêve et son analyse donne un exemple du travail réalisé dans'Abords du Réel". il ne fait pas partie du livre, puisque je viens de faire ce rêve, largement après la fin de l'écriture. il donne une bonne idée du travail qui se poursuit.

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