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Thierry Foucart

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Thierry Foucart

Descriptif auteur

Après avoir longtemps enseigné les mathématiques appliquées à l'université, Thierry Foucart travaille en tant qu'indépendant dans le domaine du calcul financier et de la gestion de patrimoine.
De 1975 à 2007 : enseignant -chercheur à l'université. Publications de nombreux articles scientifiques en mathématiques appliquées.
A partir de 2008 : agent mandataire d'assurance. Développement de l'Institut de Mathématiques Appliquées à la Finance (site imaf.fr).

Structure professionnelle : 5 rue François Mouthon 75015 PARIS

Titre(s), Diplôme(s) : agrégé de mathémlatiques, docteur DDR

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AUTRES PARUTIONS

Scènes ordinaires de la vie universitaire (Fabert, 2004)
Reconstruire l'école (Nuvis, 2012)

LES ARTICLES DE L'AUTEUR

L'opium des intellectuels

Citation :
"L'alternative de la droite et de la gauche a-t-elle encore un sens ? Celui qui pose cette question devient immédiatement suspect".

C'est ainsi que commence L'opium des intellectuels, essai publié en 1955 dans lequel Raymond Aron a tenté de comprendre et d'expliquer "l'attitude des intellectuels, impitoyables aux défaillances des démocraties, indulgents aux plus grands crimes pourvu qu'ils soient commis au nom des bonnes doctrines." L'attitude des intellectuels vis-à-vis du stalinisme a changé sous les coups de boutoir des événements. Mais on peut se demander si leur démarche fondamentale a évolué : ne seraient-ils pas inféodés de la même façon à d'autres idéologies, à d'autres "bonnes doctrines" ?

Si l'attitude des intellectuels vis-à-vis du stalinisme a changé sous les coups de boutoir des événements, leur démarche fondamentale n'a pas toujours évolué : certains restent inféodés de la même façon à d'autres idéologies, à d'autres "bonnes doctrines". Le socialisme reste leur référence morale pour la société. Le féminisme, l'écologisme, exercent aussi une influence prépondérante dans les politiques sociales, sans que personne ne puisse en contester le bien-fondé sans s'exposer à des discours haineux qui consistent plus à dénigrer l'interlocuteur qu'à critiquer son argumentation.
La trahison des intellectuels, déjà dénoncée en 1927 par Julien Benda, est encore plus d'actualité maintenant : la passion et la recherche du succès est incompatible la raison et l'esprit critique. Et avec la modestie : la raison, le savoir, la connaissance ne sont détenus par personne. Certains veulent malgré tout imposer leurs idées, donner au politique non seulement le rôle d'assurer les missions fondamentales de l'État (assurer les libertés individuelles, la sécurité des citoyens, la défense nationale etc.) mais aussi de guider les esprits, de "changer les mentalités" pour préparer l'avenir suivant leurs propres idées.
L'adhésion aveugle à une idéologie a tendance à faire perdre à l'individu l'esprit critique, le sens de la mesure et le respect normalement dû à ceux qui ne pensent pas comme lui. Le féminisme, comme le communisme d'autrefois, continue à pratiquer le terrorisme intellectuel. Les conflits entre climato-sceptiques et partisans de l'origine anthropique du réchauffement de l'atmosphère dégénèrent de la même façon. Cette violence verbale a atteint un sommet lorsque Nicolas Sarkozy a été élu président de la République : Alain Badiou (encore lui) l'a désigné comme "l'homme aux rats" et ses électeurs comme des "rats" Tout débat devient impossible quand les insultes de ce niveau remplacent les arguments.
Le terrorisme intellectuel pratiqué hier par le marxisme et aujourd'hui par les extrémistes convaincus de leur supériorité s'est répandu sous la forme du "politiquement correct" actuel. Cette obligation d'un discours complètement lisse provoque un déficit intellectuel dans les débats de plus en plus inquiétant et font perdre conscience que "notre intelligence tient dans l'ordre des choses intelligibles le même rang que notre corps dans l'étendue de la nature." [Pascal, 1670].
C'est bien peu pour se satisfaire de ses certitudes et surtout pour les imposer aux autres : les limites bien comprises de la raison humaine devraient logiquement avoir pour conséquence de restreindre le pouvoir politique à l'essentiel pour l'empêcher de jouer à l'apprenti sorcier. Mal comprises, elles ouvrent la porte aux personnalités charismatiques, à l'obscurantisme et à des dérives dont le passé récent a montré la dangerosité possible.

Signature :
Thierry Foucart

Les limites à la liberté d'expression imposées par la loi ou par la violence verbale, reviennent à donner aux idéologies la forme d'un totalitarisme nouveau sans débat possible. Cela refait de la vérité un acte d'autorité, de foi qu'il faut imposer alors que Louis Althusser avait réussi à replacer la vérité sous le contrôle de la raison dans l'idéologie marxiste.
La certitude affirmée contredit facilement la raison prudente. Mais "notre intelligence tient dans l'ordre des choses intelligibles le même rang que notre corps dans l'étendue de la nature." [Pascal, 1670]. C'est bien peu pour se satisfaire de ses certitudes et surtout pour les imposer aux autres : les limites bien comprises de la raison humaine devraient logiquement avoir pour conséquence de restreindre le pouvoir politique à l'essentiel pour l'empêcher de jouer à l'apprenti sorcier. Mal comprises, elles ouvrent la porte aux personnalités charismatiques, à l'obscurantisme et à des dérives dont le passé récent a montré la dangerosité possible.

Notes :
BIBLIOGRAPHIE
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BENDA J., La trahison des clercs, Paris, Grasset, 1975, 1927.
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FOUCART T. [1], Idéologies scientifiques en sciences sociales, Les cahiers rationalistes, n° 587, 2007.
FOUCART T. [2], Limites et conséquences de la modélisation dans les sciences de l'homme. Contribution à l'ouvrage collectif Humanités numériques, dir. B. Reber C. Brossaud, Paris, Hermès, 2007.
FOUCART T., Reconstruire l'école, Paris, Nuvis, 2012.
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ZWEIG S., 1936, Conscience contre violence, Le Castor astral), Paris, 1997.
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